Comportements professionnels

Série n° 8

L'appétit pour la formation professionnelle comptable

 

La crainte de ne pas être à même de maîtriser efficacement la situation en cas de contrôle (par la direction, les auditeurs, l’administration fiscale, les associés, les banquiers, les analystes ou les tribunaux etc…) associée au risque d’erreur ou de mauvaise optimisation fiscale ou de non détection de fraudes ou d’anomalies et à celui de ne pas être à même de faire face à des aléas et événements nouveaux ou imprévus qui exposent les comptables à un risque permanent de dépassement et donc d’incompétence révélée, propulse les comptables dans une spirale très constructive de développement des savoirs, comme modalité d’assurance tant professionnelle que psychologique nécessaire à l’estime de soi et à la confiance en soi.

Dans une situation difficile, ce qui donne de l’angoisse, ce n’est pas tant son caractère menaçant ou difficile mais le sentiment de ne pas pouvoir faire face (Katz et Kahn, 1966 ; Laborit, 1981).

La hantise du comptable de se sentir incompétent et surtout d’ignorer des savoirs que d’autres comptables de même niveau possèdent est source d’anxiété. Ce caractère anxiogène des métiers comptables développe chez les comptables deux modèles d’attitudes :

- Le modèle classique du comptable envieux, anxieux, méfiant, négatif, voire belliqueux et généralement perçu comme antipathique.

- Le modèle du comptable apprenant, coopératif, qui ne craint pas l’erreur comme moyen d’apprentissage et qui élève la règle du savoir évoluer en devise.

Un modèle d’attitude intermédiaire donne le sentiment à quelques uns de comportements futés en se noyant dans la masse moyenne des professionnels.

Le besoin de formation en réponse aux aléas du métier amène à deux questions clés :

- la première a trait aux modes d’accès aux compétences,

- et la seconde au problème de reconnaissance des compétences.

I- Les modes de construction des compétences comptables

Si la première tâche voire le premier métier de l’homme fût celui d’apprendre, le comptable sait qu’il ne peut faire autrement que d’apprendre tout au long de la vie. Aussi, de part le monde et avec l’ensemble de ses branches, la profession comptable développe-t-elle, par essence, une dynamique de profession apprenante.

C’est ainsi que quelles que soient les compétences techniques de base acquises par les enseignements avant l’entrée dans la vie active reconnues par un diplôme, le comptable ressent un double besoin d’apprentissage continu, à savoir :

- La mise à jour permanente des connaissances et techniques  dans un contexte où les connaissances changent continuellement et sont totalement renouvelées en moins de dix ans ;

- L’amélioration continue et l’acquisition de compétences nouvelles aussi bien dans les domaines non couverts par les études de base (l’intelligence comportementale, par exemple) que pour suivre les développements vertigineux des disciplines comptables.

Que ce soit dans un but de mise à jour, d’amélioration ou d’acquisition de nouvelles compétences, la formation comptable continue repose sur trois idées clefs :

1- La première met en avant l’importance de la documentation professionnelle. Cette idée s’exprime par la formule suivante : un comptable qui lit est un comptable qui vit.

2- La deuxième a trait à la nécessité d’accéder à une formation qualifiante adaptée aux besoins d’amélioration professionnelle continue.

3- La troisième rappelle que si la reconnaissance de la compétence comptable s’effectue à un niveau individuel, elle ne doit pas méconnaître l’importance de l’image et de la dynamique professionnelle collective. Lorsqu’un non comptable parle de comptables, c’est toujours au pluriel.

Or, le caractère anxiogène de l’activité dû aux aléas qu’elle génère, qui peut laisser croire que l’étendue des savoirs à mobiliser est infinie, associé à la méconnaissance des difficultés inhérentes au domaine d’activités par l’environnement, accroissent considérablement le besoin en reconnaissance des comptables.

II- Le besoin de reconnaissance des compétences

La reconnaissance de la compétence dans l’exercice professionnel suppose au préalable que le travail et ses critères de qualification soient connus.

L’obtention de diplôme qualifiant est un gage de compétence mais cela ne dispense nullement des épreuves de validation en situations concrètes. En effet, la compétence telle que définie par TROADEC «la compétence est le corrélat de toute activité efficace menée avec succès» suppose non seulement que l’on soit capable de faire face à des aléas effectivement rencontrés en incorporant l’expérience des événements mais d’être capable, aussi, de faire face à une situation nouvelle. Florence OSTY souligne que si cette dynamique de construction de compétence «ne garantit pas une fiabilité totale dans le mode de traitement d’un événement nouveau, elle assure le professionnel dans la mise à l’épreuve de la compétence acquise».

La faible connaissance des difficultés inhérentes à la profession par son environnement et l’importance des aléas qu’elle génère accroissent, corrélativement, le besoin en reconnaissance des comptables.

Or, selon Florence OSTY, «plus la compétence opératoire est méconnue, voire déniée dans un système, plus la quête de reconnaissance devient périlleuse et inassouvie». Elle ajoute que, de toute façon, la reconnaissance des compétences «déborde de manière intrinsèque, la partie visible et reconnue des savoirs engagés dans le travail».

Reconnaître les compétences se joue concrètement sur trois scènes :

1- La première est celle du travail proprement dit où le professionnel est en prise directe avec des situations réelles. L’efficacité du professionnel témoigne de ses habilités professionnelles et agit alors comme la reconnaissance de ses performances.

2- La deuxième est celle du «collectif de travail, où les interactions de travail constituent le support de la circulation des savoirs et de la construction du sentiment de confiance. Le jugement esthétique est fourni par les pairs, appréciant le style développé par l’un d’entre eux».

3- Le troisième est celui de l’entreprise qui met en évidence l’importance de la hiérarchie de proximité pour la reconnaissance du travail comptable mais aussi l’aptitude du professionnel à travailler avec les décideurs.

Conclusion :

Bescos regroupe les compétences comptables en deux groupes :

- Le savoir théorique y compris celui acquis par la formation continue ;

- Le savoir être qui regroupe les compétences tacites en management et l’aptitude à résoudre les problèmes.

Il rapporte Burns et al. (2001) qui mentionnent les compétences suivantes ;

les capacités d’analyse et d’interprétation,

la connaissance du secteur d’activité,

l’aptitude du travail en équipe,

les facilités de communication et les connaissances en informatique.

Tandin (2000) et Jordan (1998) soulignent également l’importance des aptitudes à la communication et au travail avec les décideurs internes.

La réactivité est également retenue comme une compétence importante.

Mais, alors que les comptables risquent deux types d’écarts, l’écart de ceux qui ont tendance à se montrer excessivement prudents voire craintifs et l’écart de ceux qui ont une vision idyllique d’eux-mêmes et ont tendance à surévaluer leurs qualités, il est utile de souligner que de nombreuses études consacrées à la question montrent que le regard que les pairs portent sur leurs confrères est l’indicateur le plus fiable de ses performances professionnelles réelles (compétences techniques et intelligence comportementale).

Le changement, entraînant un désapprentissage et de nouveaux apprentissages, est toujours difficile.

Le désapprentissage est très difficile car il s’accompagne souvent de sentiments de dévalorisation de soi.

Le savoir individuel, la culture, le caractère et les valeurs forment l’identité d’une personne. Quand on est en situation où ce savoir ou cette culture deviennent obsolètes, cette obsolescence est perçue comme une attaque de l’identité.

Le désapprentissage est d’autant plus douloureux que l’apprentissage initial a été aussi douloureux et que les nouveaux apprentissages sont difficiles. Dans le cas où les nouveaux apprentissages sont perçus comme étant inaccessibles comme dans le cas où il faut changer de caractère ou de culture, le problème peut générer une grande souffrance qui peut se transformer en misère émotionnelle si on s’y résigne.

Finalement, les comptables ne peuvent faire autrement que de vivre continuellement le changement et développer une logique d’amélioration continue qui n’a d’égal que leur appétit à la formation.

 

 

------------------- o -------------------

 

Question 1 : Citer une dizaine d'émotions négatives.

Question 2 : Quelles sont les attitudes pouvant être qualifiées d'excessives en matière de développement des compétences comptables ?

Question 3 : Expliquer pourquoi un comptable qui lit est un comptable qui vit ? Peut-on dire la même chose d'un groupe ?

Question 4 : Quelles sont les différentes manifestations de reconnaissance des compétences comptables ?

Question 5 : Pourquoi les comptables ont un besoin pressent de reconnaissance ?

Question 6 : Pourquoi le besoin en reconnaissance des comptables est rarement satisfait ?

Question 7 : Sur quoi doit porter la reconnaissance des compétences comptables ?