UNIVERSITE DE SFAX POUR LE SUD
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion de Sfax (F.S.E.G)
Commission d’Expertise Comptable
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expertise comptable
Sujet : Le jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers
Préparé par : Karim AMOUS Encadré par : Abderraouf YAICH Année Universitaire 2002/2003 Sommaire
Première partie : Cadre théorique du jugement professionnel
L’essence d’une profession libérale réside dans le fait que son exercice exige un niveau élevé de jugement. La valeur associée à l’information financière est influencée par la qualité des jugements professionnels de l’expert-comptable qui s’appuient sur les jugements formulés collectivement par l’ensemble de la profession dans les normes professionnelles. Le jugement professionnel se situe donc au cœur de l’exercice de l’expertise comptable. La plupart des ordres professionnels utilisent fréquemment le terme jugement professionnel sans le définir. Est-ce que parce que sa définition est évidente ou au contraire, elle nécessite un travail de précision. Avant les années soixante dix, le jugement professionnel avait fait l’objet de peu de recherches scientifiques[1]. Depuis, les publications se sont multipliées sur ce sujet parce qu’on associe davantage l’efficacité et l’efficience des missions liées aux états financiers à la qualité des jugements professionnels. Selon l’ICCA, beaucoup d’études ont examiné, au cours des dernières années, la façon dont les experts-comptables portent des jugements ou prennent des décisions dans le cadre des missions liées aux états financiers. Certaines recherches ont étudié le processus de prise de décision de l’expert-comptable pour comprendre, évaluer et améliorer ses jugements[2]. Afin d’atteindre ces objectifs, les chercheurs abordent le processus de décision de deux points de vue : descriptif et normatif. Les études descriptives examinent la façon dont les experts-comptables exercent leur jugement et prennent leurs décisions. Ces études focalisent sur le comportement réel et le processus de réflexion des experts-comptables. Les études normatives examinent la façon dont on peut améliorer le processus de prise de décision dans les missions liées aux états financiers. Elles cherchent surtout à découvrir et à mettre au point des aides à la décision, comme les systèmes experts, afin d’obtenir de meilleurs jugements dans la pratique[3]. Les pays qui mènent des recherches sur le jugement professionnel de l’expert-comptable sont essentiellement les Etats-Unis et le Canada. Les publications les plus connues sur le sujet sont essentiellement le rapport de la commission Macdonald, le rapport Estey, le rapport du Public Oversight Board de l’AICPA et les rapports de recherche de l’ICCA intitulés « jugement professionnel et information financière » et « le jugement professionnel en vérification ». L’étude du jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers peut donc s’avérer d’une grande utilité pour l’ensemble de la profession. Les interrogations sont alors les suivantes : - Peut-on éliminer le jugement professionnel en instaurant des règles plus détaillées? - Quelle définition peut-on donner au jugement professionnel? - Quels sont les facteurs qui influent sur le jugement professionnel? - Quel processus de prise de décision faut-il suivre dans l’exercice du jugement professionnel? - Quelles sont les qualités d’un bon jugement? - Quels sont les critères déterminants d’un bon jugement? - Quelles sont les qualités nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement professionnel? On prend alors conscience de toute l’ampleur de la réflexion et du débat qu’engendre ce sujet pour les experts-comptables et de son importance pour l’exercice des missions liées aux états financiers. La première partie du présent mémoire, réalisée à partir d’une revue de littérature, portera sur le cadre théorique du jugement professionnel. Cette partie comportera trois chapitres. Le premier sera réservé à l’analyse de la relation existant entre le jugement professionnel et les normes professionnelles, à l’examen des conséquences de l’existence de cette relation et à la proposition d’une définition du jugement professionnel. Le deuxième chapitre consistera à analyser le jugement professionnel sous l’angle de processus de la prise de décision. Il comportera d’une part, une analyse synchronique du processus du jugement professionnel afin de dégager les facteurs qui influent sur le processus du jugement professionnel, et une analyse diachronique, permettant de dégager les différentes étapes du processus, d’autre part. Le troisième chapitre portera sur les qualités caractéristiques d’un jugement professionnel, les critères déterminants d’un bon jugement, et les qualités, personnelles et professionnelles, nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement professionnel. La deuxième partie axera sur la pratique. Elle comportera trois chapitres. Le premier chapitre sera consacré aux illustrations du jugement professionnel dans les missions d’audit. Après examen de l’importance accordée au concept du jugement professionnel dans les normes d’audit, deux études de cas de jugement professionnel relatifs à la détermination du seuil de signification et à l’audit des estimations de la direction seront examinées pour enfin apprécier le comportement a posteriori. Dans le deuxième chapitre, nous présenterons une analyse de l’importance accordée au jugement professionnel dans les normes comptables suivie d’une étude de cas de jugement professionnel dans les missions de présentation des états financiers. Enfin, nous essayerons d’illustrer la démarche d’appréciation du comportement professionnel a posteriori. Le troisième chapitre sera consacré à la présentation de propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession. Ces propositions concernent les rôles de l’université, du professionnel et des instances professionnelles. Ce chapitre est enrichi par une enquête sous forme de questionnaire réalisé auprès des professionnels, des universitaires et des dirigeants de sociétés sur la perception de l’aptitude des professionnels à l’exercice de bons jugements. IntroductionDans les missions liées aux états financiers, le jugement de l’expert-comptable se fait dans le cadre des normes professionnelles qui traduisent des jugements collectifs de la profession (chapitre 1). L’exercice du jugement aboutit à la prise d’une décision face à une situation particulière qui se présente (chapitre 2). Le recours de l’expert-comptable aux normes professionnelles ne suffit pas à lui-même. L’expert-comptable doit faire preuve de certaines qualités personnelles et professionnelles (chapitre 3). Chapitre 1 : Jugement professionnel et normes comptablesAvant de tenter de définir le concept de jugement professionnel, il convient d’examiner si l’on peut envisager la possibilité d’éliminer le jugement professionnel de l’expert-comptable en instaurant des règles plus détaillées. Section 1 : Peut-on éliminer le jugement professionnel ?« Dans un éditorial critique portant sur l’élasticité des principes comptables généralement reconnus, paru dans The Financial Post du 29 janvier 1994, Diane Francis reproche aux responsables de l’information financière de ne pas faire preuve d’un jugement professionnel adéquat lorsqu’il y a lieu de faire appel au jugement et de jouer avec les règles »[4]. La question qui se pose est de savoir si on peut éliminer la nécessité de faire appel au jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers en définissant des règles plus détaillées? La solution proposée par The Financial Post est de faire disparaître les occasions où peut intervenir le jugement. Cette solution a suscité des critiques. En effet, le directeur des normes comptables de l’ICCA « a notamment écrit que des règles détaillées n'améliorent pas la qualité de l'information financière et qu'elles sont plus susceptibles d'être contournées »[5]. La réponse est donc en principe négative. Afin d’expliquer cette réponse, on peut se référer aux définitions d’un actif, d’un passif et d’un événement à prendre en compte dans la comptabilité, et à l’importance du jugement professionnel dans l’expression de l’opinion de l’auditeur sur les états financiers. « L’actif est constitué par les ressources économiques obtenues ou contrôlées par l’entreprise à la suite d’événements ou transactions passés, à même d’engendrer des avantages économiques futurs au bénéfice de l’entreprise ayant un potentiel de générer directement ou indirectement des flux positifs de liquidités ou d’équivalent de liquidité ou de réduire la sortie de fonds»[6]. « Le passif est constitué par les obligations actuelles de l’entreprise, résultant des transactions ou d’événements passés, nécessitant probablement le sacrifice ou le transfert futur à d’autres entités de ressources représentatives d’avantages économiques »[7]. Par ailleurs, selon le cadre conceptuel de la comptabilité tunisienne, « un événement qui satisfait à la définition d’un élément des états financiers doit être pris en compte au cas où il est probable qu’un avantage économique futur qui lui est rattaché sera obtenu ou abandonné... »[8]. Ces définitions font mention d’avantages économiques et de transfert d’avantages économiques futurs. Les termes utilisés dans ces définitions sont « ayant un potentiel», « il est probable » et « probablement ». Les définitions des éléments fondamentaux des états financiers impliquent donc un critère de probabilité et par conséquent d’incertitude. L’avenir est toujours incertain et l’appréciation d’une probabilité exige presque toujours l’exercice du jugement. En d’autres termes, la présentation de certains actifs et de certains passifs dans les rapports financiers repose sur le jugement professionnel. En matière d’audit financier et selon le cadre conceptuel des normes internationales d’audit, « l’opinion de l’auditeur renforce la crédibilité des états financiers, en fournissant une assurance élevée, mais non absolue. L’assurance absolue en audit ne peut exister, en raison de nombreux facteurs, tels que le recours au jugement, etc. »[9]. Lors de ses travaux, l’auditeur a donc recours au jugement professionnel pour former son opinion. Selon l’ICCA, « le conseil des normes de vérification est conscient de l’impossibilité d’énoncer des règles si générales qu’elles puissent convenir à tous les cas, des plus simples aux plus complexes. Il est d’ailleurs convaincu qu’aucune règle ne saurait se substituer au jugement professionnel quand il s’agit de décider de la bonne pratique à suivre dans un cas donné »[10]. Ainsi, nous pouvons conclure que « toutes les règles du monde ne remplaceront jamais l’exercice du jugement professionnel »[11]. Le jugement professionnel puise sa source dans les normes professionnelles. Il est nécessaire pour les appliquer. D’un autre côté, les normes professionnelles sont nécessaires pour porter un jugement. Il convient donc d’étudier la relation dialectique entre le jugement professionnel et les normes professionnelles. Sous section 1 : Pourquoi les normes sont-elles nécessaires pour porter un jugement?On peut distinguer quatre raisons essentielles justifiant la nécessité de canaliser le jugement par des normes : §1. Le cadre normatif assure une bonne qualité de l’information financière L’information financière, pour être utile à la prise de décision économique, doit revêtir les quatre caractéristiques qualitatives à savoir l'intelligibilité, la pertinence, la fiabilité et la comparabilité. Les normes établies par les organismes de normalisation doivent rechercher la bonne qualité de l’information financière véhiculée par les états financiers. §2. le cadre normatif est un outil de protection Le jugement professionnel comporte des risques qui découlent de l’incertitude qui entoure les conséquences des choix, des ambiguïtés ou du manque d’information. Aussi, viennent s’ajouter à ces risques ceux attribuables aux limites propres à la personne qui pose le jugement. Ces risques d’erreurs concernent non seulement le professionnel mais aussi l’ensemble des utilisateurs des états financiers et dans une plus large mesure l’ensemble de la profession. Ces risques ont donc créé, à l’échelle des professions comptables, un besoin de protection. La réponse à ce besoin a été d’établir des normes permettant de limiter le risque d’erreur d’une part, et de légitimer l’application d’une solution, d’autre part. §3. le cadre normatif est un outil de généralisation L’application des principes comptables généralement admis peut s’avérer être parfois subjective et dépendre d’une appréciation personnelle. Les normes, en tant que réponse collective à l’application de ses principes sur un sujet précis, permettent de généraliser les pratiques professionnelles et de constituer une source réglementaire. De plus, le processus de normalisation, par son caractère permanent, permet de s’adapter au contexte évolutif du monde des affaires et donc de résoudre les nouveaux problèmes nécessitant l’emploi de nouvelles solutions. §4. le cadre normatif est un outil d’amélioration Le processus de normalisation réunit des personnes dont le champ de connaissances et d’expérience est vaste et soumet les projets de normes à un large débat libre et contradictoire. Dans ce sens, les procédés de normalisation employés au niveau international, tels que l’emploi d’exposés sondages, la rédaction de projets, permettent d’apporter des solutions plus efficaces. La publication de ces normes permet donc d’apporter une base, reflet d’un consensus professionnel, au jugement du praticien ce qui en améliore la qualité moyenne d’application. Sous section 2 : Pourquoi le jugement est-il nécessaire pour appliquer les normes?S’il est nécessaire de canaliser l’application du jugement du praticien par les normes, il est également nécessaire de faire appel à son jugement lorsqu’il s’agit d’appliquer ces normes. Nous distinguerons trois raisons principales : §1. Les normes comptables sont de caractère général La rédaction d’une norme est longue et difficile car la règle établie doit être à la fois générale et consensuelle. Dans leurs prises de position, les normalisateurs ne prennent pas en compte toutes les situations possibles. Il est donc du ressort du praticien de faire le lien entre les circonstances dans lesquelles il doit exercer son jugement et l’application de la norme : si les normes sont un outil de protection, elles ne sauraient se substituer à la nécessité pour le professionnel de porter un jugement sur la pertinence de son application. §2. Les normes comptables sont sujettes à interprétation L’application d’une norme comptable, même lorsqu’elle ne fait pas directement référence au terme « jugement », est souvent sujette à interprétation : - L’emploi d’expressions comme « il est souhaitable », « dans la mesure du possible », « il peut être nécessaire », « de façon prédominante », etc., revient régulièrement dans les normes. - Une norme peut offrir plusieurs alternatives au professionnel dont le choix est laissé à son jugement. - Le sujet de la norme comme le traitement des estimations, la correction d’erreurs, les changements de méthodes, faisant largement appel à la notion d’importance relative, repose sur le jugement professionnel de l’expert-comptable. §3. Les normes sont complexes du fait de l’instabilité de l’environnement Nous voyons apparaître chaque jour de nouveaux défis et de nouveaux outils que ce soit en matière de production, de commercialisation ou de finances : le cadre dans lequel sont établis les états financiers évolue constamment. C’est pourquoi un référentiel comptable qui ne laisserait aucune place au jugement deviendrait vite caduc. La mise en place d’une norme est quelque chose de complexe ce qui explique qu’il arrive qu’elle soit en retard par rapport à l’évolution du monde des affaires, comme en témoigne la difficulté éprouvée par l’IASB pour mettre au point une norme sur les nouveaux instruments financiers. Il a donc fallu que des professionnels soient confrontés au problème posé par l’utilisation de ces instruments pour dégager des solutions pratiques qui ont été à l’origine de l’élaboration de la norme. En ce sens, on peut affirmer qu’il existe une relation dialectique entre les normes et le jugement professionnel. Sous section 3 : Conséquence de l’existence des normes sur l’exercice du jugement professionnelLes normes contribuent à réduire le champ d’application du jugement professionnel dans la mesure où elles constituent une référence ayant normalement un caractère obligatoire pour les états financiers qui s’y réfèrent. Il existe cependant des domaines réservés au jugement tels que l’importance relative ou la primauté du fond sur la forme pour lesquels le processus normatif se limite aux principes généraux. L’objectif d’une norme est de pouvoir éclairer et harmoniser le jugement des praticiens qui, du fait de la complexité de l’environnement, expriment le besoin de solutions consensuelles aux problèmes fréquents. L’éclairage doit être suffisant pour baliser le chemin qui mène à la prise de décision mais ne doit pas aveugler le professionnel par un cadre trop strict qui lui ôterait sa capacité de jugement. C’est ce que faisait d’ailleurs remarquer la commission Cohen aux Etats-Unis dès 1978 : « C’est dans le cadre comptable existant que devrait s’exercer le jugement, non pas indépendamment de celui-ci »[12]. Pour le travail comptable, le jugement s’exerce dans un cadre de référence hiérarchisé qui comporte les objectifs des états financiers, les qualités caractéristiques, les principes comptables et les normes. Mais, un jugement pertinent n’exclut pas l’acceptation de compromis. Section 2 : Quelle définition peut-on donner au jugement professionnel?Bien que le système comptable tunisien, les normes de l’IASB, ainsi que les normes internationales de l’IFAC fassent appel dans une large mesure au jugement professionnel, aucune définition de ce concept n’est fournie. Selon le dictionnaire, le Petit Robert, un jugement est une « faculté de l’esprit permettant de bien juger de choses qui ne font pas l’objet d’une connaissance immédiate certaine, ni d’une démonstration rigoureuse »[13]. L’ICCA définit le jugement comme étant « un processus par lequel on fait un choix, ou on prend une décision débouchant sur une action »[14]. Le jugement consiste donc à estimer les résultats de différentes lignes de conduite possibles et à évaluer les conséquences de ces résultats afin de choisir l’une de ces lignes de conduite. Il ne présuppose pas de niveau particulier de connaissances ou d’expérience. Pour passer de la notion de « jugement » à celle de « jugement professionnel », on suppose que la deuxième expression désigne un jugement émis par un professionnel et qui découle des exigences et des responsabilités liées aux fonctions[15]. Dans le contexte des missions liées aux états financiers, le jugement professionnel de l’expert-comptable désigne une démarche plus élaborée qui fait appel à des compétences pertinentes et à la connaissance des normes et qui nécessite des valeurs professionnelles telles que la diligence, l’objectivité et l’intégrité. Selon l’ICCA, « l’objectivité signifie la volonté et la capacité d’évaluer diverses solutions et divers modes de comptabilisation d’une opération et de procéder à cette évaluation de façon neutre et dans des perspectives différentes »[16]. Sans objectivité, le résultat risque de subir des biais dus à l’influence de l’intérêt personnel des partis pris, des fois opposés, et des pressions externes. C’est dans ce sens que le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC stipule qu’un « professionnel comptable doit être équitable et ne doit pas laisser des préjugés ou des partis pris, des conflits d’intérêt ou l’influence de tiers nuire à son objectivité »[17]. L’intégrité complète l’objectivité. Elle suppose que l’expert-comptable soit droit et honnête. L’ICCA précise que, « les personnes qui ont l’objectivité nécessaire pour examiner un problème à partir de différents points de vue ne seront peut-être pas en mesure de le faire si elles ne sont pas suffisamment intègres pour y consacrer le temps et les efforts nécessaires, ou si elles craignent que l’examen attentif d’une solution qui les désavantagerait personnellement puisse mener à l’adoption de cette solution »[18]. Le jugement professionnel peut donc être défini comme étant un « jugement exercé avec diligence, objectivité et intégrité, dans le contexte des normes professionnelles pertinentes, par des personnes expérimentées et renseignées »[19]. L’ICCA précise que « le processus menant au choix de la solution à un problème de présentation de l’information financière peut être décrit comme étant « un jugement professionnel » lorsqu’il est analytique, basé sur l’expérience et les connaissances, objectif, prudent et intègre, et que la personne qui pose le jugement assume sa responsabilité à l’égard des personnes touchées par les résultats. Le jugement professionnel sera vraisemblablement le plus utile lorsque les situations sont complexes, mal définies ou changeantes, en particulier lorsque les normes sont incomplètes, et il devrait normalement comporter la consultation d’autres personnes compétentes, la détermination des conséquences possibles et la documentation des processus analytiques ayant mené à la prise de décision »[20]. Cette définition donnée pour le jugement professionnel dans les missions de présentation de l’information financière, s’applique aussi pour les missions d’audit des états financiers. Le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC établit les règles minimales auxquelles doit se conformer l’expert-comptable. Il mentionne également de nombreuses qualités requises de l’expert-comptable, notamment l’objectivité, l’intégrité, la prudence, la connaissance et l’expérience. Ces qualités sont nécessaires au jugement professionnel. La définition du jugement professionnel de l’expert-comptable peut être donc formulée de la manière suivante : Le jugement professionnel de l’expert-comptable consiste à appliquer des connaissances et une expérience pertinente avec les habilités professionnelles et personnelles, dans le cadre défini par les normes professionnelles et le code d’éthique des professionnels comptables, pour prendre une décision dans le cas où il faut choisir entre différentes lignes de conduite. L’analyse de la définition du jugement professionnel et de la nécessité du jugement a permis de relever deux aspects importants : - Le jugement professionnel est un processus de prise de décision. Cette analyse sera menée dans le deuxième chapitre. - Le jugement professionnel nécessite des qualités personnelles et professionnelles de l’expert-comptable afin d’augmenter la probabilité pour qu’il puisse être qualifié de bon jugement. Cette qualification nécessite l’identification des qualités caractéristiques d’un bon jugement, et des critères déterminants. Cette analyse sera menée dans le troisième chapitre. Chapitre 2 : L’exercice du jugement professionnel est un processus de prise de décisionLe jugement professionnel est un processus de prise de décision. Il est considéré comme une activité qui a un début, un enchaînement et une fin, et qui subit diverses influences liées à l’environnement et aux circonstances. L’analyse synchronique[21] du jugement professionnel nous permettra de comprendre ces influences. Par contre, son analyse diachronique[22] nous permettra de dégager les différentes étapes de ce processus complexe. Section 1 : Analyse synchronique du jugement professionnelCette analyse nous permettra de dégager l’ensemble des facteurs entrant en ligne de compte, que ce soit au niveau du cadre environnemental, au niveau de la mise en situation du processus ou au niveau de son déroulement. Sous section 1 : Le cadre environnemental du processusLe processus de jugement professionnel se déroule dans un environnement constitué de divers facteurs : incertitude, risque, stimulants et menaces, contraintes de temps, etc.[23]. L’environnement présente à la fois un élément de stabilité qui soutient les processus habituels de jugement et un élément d’instabilité résultant des changements ou des menaces qui remettent en question ou perturbent les processus normaux. Selon GIBBINS et MASON, les facteurs qui composent l’environnement des missions de l’expert-comptable sont[24] : - L’incertitude ; - Le risque ; - Les stimulants et les menaces ; - Et, les contraintes de temps. Les missions de l’expert-comptable se déroulent dans un univers plus ou moins incertain. Il se doit donc d’évaluer le degré d’incertitude dans lequel il se trouve afin de le minimiser. Cette évaluation peut lui poser problème lorsque la probabilité ou l’improbabilité qu’un événement se réalise est a priori élevé. Selon GIBBINS et MASON, les conclusions suivantes peuvent être formulées concernant l’incertitude : - Les gens croient que la probabilité ou l’improbabilité d’un évènement est plus extrême qu’elle ne l’est en réalité ou ils l’ignorent tout simplement. A titre d’exemple, quand les évènements qui influent sur un jugement, exercé par l’expert-comptable pour la présentation de l’information financière, sont fortement probables (tel que la poursuite de l’exploitation) ou hautement improbables (tel qu’une poursuite résultant d’un jugement exercé en matière de divulgation), on peut s’attendre à ce que les professionnels aient de la difficulté à évaluer ces évènements de façon appropriée[25]. - Les gens surestiment leur capacité d’évaluation exacte alors que leurs hypothèses sont généralement inexactes. Parmi une variété de personnes d’expérience, ayant fait l’objet d’une enquête dans le cadre du rapport de recherche de l’ICCA, jugement professionnel et information financière, seul un nombre limité semblait avoir une connaissance exacte des termes utilisés en matière de probabilités, par exemple « probable », « vraisemblable » ou « quasi certain »; Certains d’entre eux ont cependant donné une interprétation raisonnablement cohérente de la signification de ces mots[26]. Selon l’ICCA, « le risque est un choix et non le fait du destin » [27]. En effet, le risque est le corollaire du degré d’incertitude évalué par l’expert-comptable. L’appréciation du risque est un processus très complexe à analyser et dépend, là aussi, de la manière dont est perçu l’environnement par l’expert-comptable. Les difficultés énoncées au niveau de l’incertitude s’appliquent au risque dans la mesure où l’incertitude fait partie de l’évaluation du risque. Selon GIBBINS et MASON, trois observations générales semblent être pertinentes : - En premier lieu, les risques de catastrophe ne sont pas très bien évalués, en partie parce que les probabilités en ce domaine sont habituellement extrêmes, et en partie parce que les gens ont de la difficulté à en juger l’impact[28]. - En second lieu, les gens évaluent de façons différentes les gains et les pertes potentiels, donnant en général une importance démesurée aux pertes. La décision de miser sur un gain ou une perte dépend de chaque individu, mais en règle générale les gens préfèrent les gains les plus sûrs à ceux qui le sont moins, alors qu’ils privilégient les pertes moins certaines aux pertes probables. L’application de ces constatations au jugement professionnel de l’expert-comptable n’est pas claire, parce que les experts-comptables ne misent habituellement pas, du moins lorsqu’ils agissent en qualité de professionnels, sur les résultats et les probabilités. Cependant, l’évaluation du risque est elle-même une opération complexe, en particulier lorsque des gains potentiels ou des pertes potentielles sont en cause[29]. - En troisième lieu, «selon les recherches menées dans le domaine de l’expertise comptable, l’environnement professionnel semble renforcer les tendances du fait qu’il pénalise davantage l’erreur qu’il ne récompense les résultats positifs»[30]. Selon l’ICCA, un professionnel peut s’attendre à avoir un problème sérieux (condamnation pénale, condamnation civile importante) une fois en moyenne tous les vingt cinq ans[31]. §3. Les stimulants et les menaces Les stimulants, qu’ils s’agissent de récompenses ou de sanctions, ont une influence sur l’environnement dans lequel se déroule le processus de jugement. Ainsi, les sanctions auxquelles s’expose l’expert-comptable qu’elles soient pénales, civiles ou disciplinaires, jouent un rôle important dans les prises de décisions de l’expert-comptable. La manière, dont l’expert-comptable perçoit sa responsabilité, aura une influence sur la manière dont il va exercer son jugement. L’expert-comptable doit s’adapter à la contrainte des délais imposés par son client ou par les institutions publiques (administration fiscale, bourse des valeurs mobilières, etc.). Sous section 2 : La mise en situation du processusPlus les facteurs liés à l’environnement touchent de près les gens qui posent les jugements dans une situation donnée, plus ces facteurs peuvent être perçus comme faisant partie de la situation elle-même. Selon GIBBINS et MASON, cette situation couvre trois grandes catégories de facteurs : les normes, les données et les personnes[32]. §1. L’importance des normes professionnelles Nous avons examiné dans le premier chapitre la relation entre le jugement et les normes professionnelles. Cette relation dialectique qui, située dans le cadre du processus que l’on met en place, prend toute sa dimension : les normes permettent de réduire les risques liés au caractère subjectif du jugement humain mais le jugement professionnel demeure essentiel pour appliquer, aux cas particuliers, les normes professionnelles. Dans l’exercice de son jugement professionnel, l’expert-comptable doit prendre en compte l’existence ou l’absence de normes. En effet, lorsque la norme existe et que les circonstances de son application ne sont pas équivoques, l’ensemble des normes s’inscrit dans le contexte du processus décrit ci-dessus. En revanche, lorsque l’expert-comptable rencontre des circonstances dans lesquelles aucune norme ne s’applique directement, il doit considérer l’esprit des normes existantes et déterminer quel changement il convient d’effectuer afin de présenter les circonstances particulières conformément au principe de la norme ou de la règle comptable[33]. Enfin, l’expert-comptable se trouve parfois confronté à des situations où la norme est contradictoire avec une autre. Tel est le cas, par exemple, de la présentation dans l’état de résultat selon le modèle autorisé, au niveau des produits d’exploitation, de la production immobilisée. La nomenclature des comptes précise que la production immobilisée enregistre le coût des travaux faits par l’entreprise pour elle-même et portant sur des immobilisations. Elle ne concerne pas l’exploitation de l’entreprise. Par ailleurs, la norme comptable, relative aux éventualités et aux évènements postérieurs à la date de clôture (NC 14), prévoit parmi les évènements liés à des conditions existant à la date de clôture les fluctuations de change. Elle prévoit le même cas dans les évènements non liés à des conditions existant à la date de clôture. §2. Les circonstances : les données factuelles du problème L’examen attentif des données d’un problème nécessitant un jugement particulièrement pointu est le facteur le plus important à prendre en compte. Il est logique que les données factuelles, objectives par définition, jouent un rôle significatif dans la prise de décision. Cependant, il ne faut pas négliger, comme nous le verrons par la suite, les facteurs humains car un jugement professionnel ne saurait être remplacé par des déductions mécaniques à partir des seules données. Ces données se présentent généralement de manière brute et doivent faire l’objet d’un traitement, d’une sélection et d’une analyse avant de pouvoir être exploitées. L’exercice du jugement intervient dans l’évaluation des données et la comparaison des différentes solutions lors du choix. D’autre part, il faut tenir compte du biais psychologique qui modifie l’interprétation positive ou négative d’un fait en fonction de la manière dont il est perçu. D’ailleurs, il est souhaitable que le professionnel analyse les faits sous plusieurs perspectives afin de corriger ce biais[34]. Les facteurs humains comportent la perception, la mémoire et les aptitudes intellectuelles et émotionnelles[35]. L’étude de la psychologie montre que toute personne a des préjugés. L’expert-comptable envisagera la situation dans laquelle il exercera son jugement, en prenant en considération ses idées préconçues et ses croyances. Comme tout être humain, il est incapable de déceler ce biais du caractère inconscient d’une partie importante du jugement. La perception est à la base de tous les autres comportements : percevoir va permettre à l’expert-comptable de prendre connaissance de son environnement professionnel et d’agir sur lui via les jugements induits par sa perception. La perception est le point de départ de toute activité humaine, y compris l’exercice d’un jugement professionnel par un expert indépendant. D’ailleurs, l’évaluation de l’incertitude et du risque dépend en partie de la façon dont l’expert-comptable perçoit l’environnement[36]. Un autre facteur entrant en ligne de compte dans la mise en situation du processus est la mémoire dont fait preuve l’expert-comptable. Selon RENNIE et GIBBINS, la mémoire est organisée, elle fait appel à des structures qui permettent de rappeler des informations et de les appliquer à la situation en cause[37]. Ces structures sont généralement appelées « structures des connaissances », « schéma » ou « modèle »[38]. Les recherches, en matière de psychologie cognitive, indiquent que les experts-comptables développent des structures pour les divers types de connaissances dont ils ont besoin pour exercer. Elles s’appuient à la fois sur la formation et l’expérience de l’expert-comptable. Le vécu professionnel de l’expert-comptable, par l’intermédiaire de son expérience et de ses connaissances, lui confère une mémoire plus ou moins importante. Cette mémoire jour un rôle important dans la formation de son jugement : - La mémoire est l’outil principal dont il dispose pour faire preuve de compétence en matière de jugement. Elle va lui permettre de mettre en place des points de repères afin de structurer sa pensée. - La mémoire de l’expert-comptable va lui permettre de donner une cohérence à l’ensemble des jugements professionnels qu’il devra exercer au cours de sa carrière. De la capacité à stocker une quantité importante d’informations, va dépendre sa capacité à choisir, dans un délai très court, la réponse la plus adéquate, à une situation donnée, en fonction d’une expérience passée. Les problèmes de jugement peuvent être résolus grâce aux modèles mémorisés, acquis grâce à l’expérience : La mémoire constitue le centre nerveux de l’analyse car, c’est à l’aide de sa mémoire que l’expert-comptable va pouvoir structurer les informations éparses qu’il recueille. 3) Les aptitudes intellectuelles et émotionnelles Selon GIBBINS et MASON, « il semble évident que certaines personnes sont mieux équipées que d’autres pour exercer leur jugement professionnel, que ce soit naturellement ou grâce à leur formation ou leur expérience »[39]. L’expérience est examinée dans la sous section suivante. Les aptitudes intellectuelles regroupent les aptitudes innées et la formation. Elles découlent essentiellement de la culture, du niveau d’enseignement et des efforts d’auto-apprentissage de l’expert-comptable et de ses capacités mentales. Selon BELKAOUI, les aptitudes émotionnelles entrent en ligne de compte dans la mise en situation du processus du jugement professionnel. En effet, le comportement de l’expert-comptable dépend des types de relations qu’il mène avec les autres. Son comportement social est conditionné par son environnement culturel. Cet environnement est composé de la religion, des valeurs et attitudes, des lois, de l’éducation et de l’organisation sociale[40]. Le fait de concevoir la mémoire sous forme de « structures mnémoniques »[41] qui se développent par la formation et l’expérience, laisse présumer que les professionnels expérimentés disposent d’aptitudes intellectuelles et émotionnelles plus importantes et pertinentes que les nouveaux professionnels. Selon RENNIE et GIBBINS, l’exigence professionnelle que les nouveaux professionnels accomplissent un stage d’une période déterminée constitue peut être une bonne façon de s’assurer qu’ils développent des structures mnémoniques dont est censé être doté l’expert-comptable. La qualité de ces structures est fonction de l’expérience sur laquelle elles se fondent[42]. Les aptitudes au jugement professionnel sont donc évolutives. Sous section 3 : Le déroulement du processusLe jugement professionnel est un processus continu et dynamique par l’acquisition de l’expérience. §1. Le processus de développement des aptitudes au jugement professionnel est un processus continu Les connaissances alliées à l’expérience sont des facteurs déterminants pour la résolution de problèmes. Le processus du jugement doit être analysé comme un processus continu : un jugement professionnel relatif à une situation donnée permettra à l’expert-comptable d’emmagasiner de l’expérience et aura une incidence sur les choix qu’il devra exercer ultérieurement[43]. Le processus continu du jugement est un facteur de sa complexité : il est difficile lorsqu’on procède rétroactivement à l’analyse d’un jugement de déceler quel en a été le phénomène déclencheur, comment il s’est progressivement formé puis concrétisé. §2. L’acquisition de l’expérience base de la dynamique du processus Il appartient à l’expert-comptable de savoir tirer profit de ses connaissances et de son expérience afin d’affiner ses jugements tout au long de sa carrière professionnelle. Le professionnel ne doit pas avoir une attitude passive sur le sort de ses jugements mais jouer un rôle actif de capitalisation des apprentissages à partir des jugements exercés. Chaque fois qu’il émet un jugement, l’expert-comptable doit donc développer des dispositifs de fonctionnement pouvant emmagasiner de l’expérience et des connaissances, autrement dit, des structures cognitives lui permettant d’être une véritable machine à apprendre pour porter un jugement[44]. Section 2 : Analyse diachronique du jugement professionnelCette analyse nous permettra d’analyser, d’une part, l’apport de la psychologie cognitive dans la compréhension du processus du jugement professionnel, et d’autre part, les étapes du processus du jugement professionnel. Sous section 1 : L’apport de la psychologie cognitive dans la compréhension du processus du jugement professionnelL’analyse menée à la section précédente a permis de mettre en évidence l’importance de ce qu’on a appelé les structures cognitives dans le processus d’apprentissage de l’expert-comptable. L’apport de la psychologie cognitive, dont un des fondements consiste à s’interroger sur la manière dont l’homme apprend, raisonne, juge et résout les problèmes, paraît intéressant pour comprendre le processus de prise de décision dont relève le jugement professionnel. §1. Les activités mentales comme système de traitement de l’information La psychologie cognitive pose comme postulat que les activités mentales peuvent être assimilées à des modèles de traitement de l’information. BELKAOUI distingue trois phases[45] : - Le point de départ des activités mentales est la perception par l’homme de son environnement et des informations s’y rattachant. Dans le cas du jugement, cette phase consiste à déterminer les questions cruciales, c’est-à-dire définir correctement la problématique et de procéder à la collecte des informations nécessaires. - L’homme utilise ensuite ses facultés mentales pour donner un sens aux éléments qu’il a pu recueillir de cette perception : c’est le phénomène de représentation. Les représentations sont déterminées en fonction de la problématique dégagée et des informations recueillies; elles s’inscrivent donc toujours dans un contexte précis et en fonction d’un objet précis. En l’occurrence, il va s’agir, pour l’expert-comptable, de déterminer les solutions possibles au problème posé. - Les activités mentales permettent enfin à l’homme de prendre des décisions : il s’agit du comportement induit de la représentation. On distingue le comportement externe qu’est l’action du comportement interne qui est constitué d’informations mémorisées par l’homme qui viennent enrichir les structures cognitives issues de l’apprentissage. Dans notre cas, l’expert-comptable va procéder à la résolution de son problème en évaluant la solution qu’il juge la plus adéquate et en formulant sa conclusion. §2. Le fonctionnement cognitif Tout au long de la réalisation séquentielle de ce processus, l’homme procède à la régulation et au contrôle de son activité[46]. La régulation va consister à sélectionner les différentes tâches à effectuer et à les ordonner dans le temps. Ce choix est effectué tant au niveau du processus de construction des représentations qu’à celui de l’élaboration de la prise de décision. Quant au contrôle, il joue un double rôle : en amont de la mise en place du système de représentation, il permet de planifier l’ensemble des tâches à effectuer afin d’aboutir à une solution. En aval, il assure la réalisation du résultat. A cet égard, l’activité de contrôle peut être la source d’une nouvelle orientation de l’activité par la mise en cause du système de représentation ou par la formulation de nouveaux objectifs. Sous section 2 : Les différentes étapes du processus du jugement professionnelQu’il soit analysé d’un point de vue diachronique ou synchronique, le processus de prise de décision doit être décomposé en plusieurs étapes. Ces étapes se présentent comme suit[47] : - La description du problème posé ; - La collecte de la documentation ; - L’identification des solutions possibles ; - L’évaluation des solutions ; - La formulation des conclusions. §1. La description du problème posé La description du problème posé consiste à dégager une problématique. La détermination de la problématique qui se pose constitue une opération non courante, qui va donc faire appel à un jugement qui sera complexe du fait de la nature du problème. Il conviendra donc de tenir compte du niveau de l’intervenant choisi, pour traiter ce type de problème. On peut distinguer plusieurs tâches à accomplir lors de la réalisation de cette phase. En fonction de la complexité du problème, l’expert-comptable doit accomplir le nombre nécessaire de tâches pour étayer son opinion ou sa décision. Quelles que soient les difficultés que comporte cette étape, elle comprend généralement : - L’obtention des données ; - Des investigations complémentaires ; et, - L’œil critique. Il s’agit d’obtenir les données internes et externes à la société nécessaires à la bonne compréhension du problème à traiter. 2) Investigations complémentaires L’expert-comptable pourra estimer nécessaire de mener des investigations complémentaires concernant : - La survenance d’événement similaire : s’il n’arrive pas à extraire de sa mémoire le traitement qu’il convient de donner par analogie à une situation similaire ou présentant de nombreuses ressemblances, il consultera d’autres professionnels pour prendre connaissance et évaluer la démarche suivie. Il enrichira sa base de représentation. - Les objectifs cachés du client : l’expert cherchera alors à savoir si les objectifs poursuivis sont autres que ceux que la régularité, la sincérité et l’image fidèle. L’expert-comptable ayant collecté un nombre important de données, doit garder un œil critique par rapport au travail fourni. Il sera particulièrement attentif au piège de la confirmation qui consiste à accorder une plus grande importance aux éléments qui confirment son jugement plutôt qu’aux éléments qui l’infirment. D’autre part, il fera preuve de scepticisme professionnel pour les informations reçues. §2. La collecte de la documentation La collecte de la documentation doit permettre à l’expert-comptable d’affiner cette problématique. Cette étape comprend généralement l’examen des normes et de la doctrine et éventuellement la consultation[48]. Le premier réflexe de l’expert-comptable quand il doit traiter un problème est de se dire : que disent les normes à ce sujet? Au-delà des normes à l’aspect forcément généraliste, il convient de balayer l’ensemble de la doctrine professionnelle. S’il s’agit d’un secteur d’activité très spécialisé, il peut s’avérer nécessaire de consulter la documentation professionnelle relative à ce type de métiers pour approfondir ses connaissances. L’utilisation de bases de données et le recours à l’Internet sont de nature à rendre cette étape plus rapide et plus riche. §3. L’identification des solutions possibles Pour parvenir à une décision, il faut inventorier les solutions possibles. Selon l’ICCA, « si la certitude est souhaitable, il faut bien reconnaître que, souvent, une question de comptabilité ou de vérification peut se résoudre de diverses façons »[49]. Le professionnel devrait donc éviter de retenir la première solution valable, mais continuer sa recherche jusqu’à ce que la possibilité de solutions de rechange additionnelles soit réduite au minimum. Cette étape consiste donc à envisager toutes les solutions possibles sans exclusion. §4. L’évaluation des solutions Cette étape consiste à évaluer les avantages et les inconvénients de chacune des solutions possibles afin d’éliminer les solutions erronées. Selon l’ICCA, le professionnel doit choisir la solution la plus appropriée en prenant du recul et en tenant compte des personnes qu’elle touchera et des conséquences qui en découleront. Il faut donc prévoir les questions que pourraient soulever les clients, les tiers et les autres professionnels. Il ne faut pas négliger la nature fondamentale de la situation en gardant à l’esprit la primauté du fond sur la forme. Enfin, la consultation des pairs peut être utile[50]. 1) Prise en compte de l’attente des utilisateurs financiers Les normes professionnelles font un lien entre la notion de l’importance relative et l’utilisateur des états financiers. L’expert-comptable devra prendre en compte l’importance accordée à la signification du problème par les lecteurs en fonction du contexte de la mission pour évaluer quelle semble être la meilleure solution. 2) Primauté du fond sur la forme Cette convention comptable doit être prise en compte lorsque l’on porte un jugement de praticien sur la dérogation à un principe comptable généralement admis ayant trait à l’obtention d’une image plus fidèle des comptes à la réalité. Cette démarche est à distinguer des investigations complémentaires consistant à consulter un confrère pour orienter la démarche relative à la phase de collecte de l’information. Il s’agit à ce stade du processus, de consulter un expert-comptable ou autre spécialiste du domaine relatif au problème soulevé et non un généraliste. §5. La formulation des conclusions Après avoir effectué les étapes précédentes, le professionnel doit formuler des conclusions qui permettent de résoudre le problème posé. Selon l’ICCA, la formulation des conclusions peut comporter les étapes suivantes[51] : - Revue des données et hypothèses prises en compte; - Résoudre effectivement le problème; - Faire valoir son point de vue; - Obtenir un consensus. 1) Revue des données et hypothèses prises en compte L’expert-comptable doit s’assurer de la cohérence de son jugement car, comme nous l’avons vu, la vérité repose sur la non-contradiction d’un système de jugement. Il est essentiel pour respecter cette contrainte, que le fonctionnement cognitif décrit ci-dessus ait fonctionné correctement. Les hypothèses et données retenues doivent avoir été passées sous contrôle et évaluées afin de démontrer que la solution retenue est la meilleure. En outre, la justesse d’un raisonnement nécessite non seulement qu’il soit bâti par un ensemble cohérent d’hypothèses mais aussi par l’exactitude des données de départ. 2) Résoudre effectivement le problème Il est nécessaire que dans la formulation de sa conclusion, l’expert-comptable résolve le problème qui lui a été soumis dans toute sa complexité. Plus ce problème est ardu, plus la rédaction de la conclusion prendra du temps car l’expert-comptable ne pourra négliger aucun aspect tout en restant synthétique pour que sa solution soit facilement accessible. 3) Faire valoir son point de vue Afin de faire valoir son point de vue, il convient, après s’être donné les moyens d’avoir suffisamment confiance en soi, de mettre en place un argumentaire pertinent et une communication adaptée : il s’agit de convaincre de la justesse de son analyse. Il sera d’autant plus facile de le faire si l’expert-comptable fait preuve de suffisamment de pédagogie pour faire ressortir l’adéquation de sa solution face à la complexité du problème soulevé. Lors de la confrontation des points de vue, l’expert-comptable ne cherchera donc pas à imposer sa solution à tout prix mais il recherchera un consensus aboutissant à une solution jugée acceptable. Chapitre 3 : Les qualités d’un bon jugement, déterminants et qualités nécessaires au jugement de l’expert-comptableCe chapitre traite des qualités d’un bon jugement (section 1), des déterminants d’un bon jugement (section 2) et des qualités nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement (section 3). Section 1 : Les qualités d’un bon jugement« L’évaluation de la qualité d’un jugement est difficile à effectuer »[52]. L’ICCA rapporte qu’un des répondants au questionnaire qu’elle a lancé, a commenté la difficulté de l’évaluation d’un « bon » jugement en disant que « si on entend par bon résultat un jugement professionnel correct, il s’agit de synonymes. Si on entend « bon » du point de vue du client, il pourrait y avoir une réponse très différente. Si on entend « bon » du point de vue de l’expert-comptable, cela signifie probablement que les relations avec le client demeurent bonnes et que le jugement était le bon jugement professionnel ou que rien de mauvais n’est survenu, c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu de plaintes ou de recours » [53]. La même étude de recherche de l’ICCA établit la liste des composantes importantes d’un bon jugement professionnel, d’après les réponses données par 69 experts-comptables sondés, dans le tableau 1 suivant[54] :
Nous proposons de regrouper ces composantes en trois. Les qualités d’un bon jugement sont donc l’objectivité, la pertinence et la globalité. Sous section 1 : ObjectivitéL’objectivité d’une décision suppose sa vérifiabilité. Le jugement professionnel est un processus de prise de décision; son objectivité réside donc dans sa justification. C’est ainsi que l’expert-comptable doit recueillir des éléments probants pour appuyer sa décision mais il ne suffit pas qu’elle soit appuyée mais justifiée et correctement documentée. Selon EMBY et GIBBINS, 9,4% des répondants au questionnaire qu’ils ont lancé considèrent que l’objectivité constitue la qualité dominante d’un bon jugement[55]. Sous section 2 : PertinenceLa pertinence s’apprécie par rapport à l’efficacité et l’efficience d’un jugement professionnel. L’efficacité suppose une analyse des données obtenues afin d’assurer une probabilité maximale de bonnes conséquences et une probabilité minimale de mauvaises conséquences, et réside dans le fait que seules les bonnes conséquences sont produites et que les mauvaises conséquences sont évitées. Selon EMBY et GIBBINS, 40,5% des répondants au questionnaire estiment que la pertinence est la qualité la plus dominante pour pouvoir qualifier un jugement d’un bon jugement[56]. Par ailleurs, l’efficience du jugement professionnel s’apprécie en termes de temps et d’argent. Un bon jugement effectué après le délai prévu pourra produire de mauvaises conséquences sur les activités du client. Selon la même recherche, 37,4% des répondants estiment que le critère de l’efficience et du consensus est le critère le plus dominant dans l’évaluation d’un bon jugement. D’ailleurs, l’absence de consensus, à défaut d’exactitude du jugement de l’expert-comptable, peut « manifestement jeter un doute sur l’exactitude, ainsi que sur l’efficience et l’efficacité de la vérification »[57]. Sous section 3 : GlobalitéUn jugement professionnel doit tenir compte du cadre environnemental, de l’éthique professionnelle et des diverses conséquences éventuelles de la mise en œuvre de la décision. En effet, l’expert-comptable doit satisfaire les contraintes liées au jugement à émettre, mettre en œuvre toutes les diligences nécessaires, dans le respect de l’éthique professionnelle, et veiller à la mise en œuvre correcte du jugement. Dans ce sens, M. FALISE et J. REGNIER affirment que « la décision définie mais non réalisée, reste tronquée et vide de sens »[58]. Aussi, faut-il que l’expert-comptable mette en perspective le jugement qu’il émet. En effet, l’exercice d’un jugement débouche généralement sur de nouveaux problèmes à résoudre. Ainsi, le jugement émis doit viser à minimiser ses problèmes à défaut de pouvoir les éliminer et en tout cas, il ne peut les occulter et doit, par conséquent, les intégrer dans son raisonnement. Section 2 : Les déterminants d’un bon jugementL’exercice du jugement professionnel procède d’un processus complexe. Cette complexité est due au grand nombre de contraintes et règles de fonctionnement qui le distinguent, et à l’ensemble des tâches pouvant être accomplies à chaque étape. Evaluer le processus n’est donc pas une chose facile. Notre objectif est de pouvoir dégager, à la lumière des analyses, les aptitudes que l’expert-comptable doit développer au cours de sa carrière. Ces aptitudes qui sont le consensus, la justesse du diagnostic et la justifiabilité, si elles caractérisent la décision prise, pourront être signe que le processus a correctement fonctionné. Sous section 1 : L’aptitude à rechercher un consensus§1. La solution idéale : l’exactitude L’exactitude d’un jugement signifie que l’on est en mesure de l’évaluer à l’aide de règles très précises, à la fois objectives et mesurables. Or, plus le problème auquel sera confronté l’expert-comptable sera complexe, moins il sera aisé de trouver des critères neutres permettant de procéder à cette évaluation qui tient compte du moment et du contexte dans lequel le jugement est exercé. De plus, l’importance accordée à la dimension humaine lors de l’exécution de la mission ne permet pas à ces critères d’être totalement objectifs. Un bon jugement sera donc plus facilement mesuré par sa capacité à recueillir l’adhésion de l’ensemble des parties concernées. §2. A défaut de solution idéale, la recherche d’un consensus Le consensus consiste à avoir un consentement universel de la solution proposée à un problème donné. Le consentement universel, dans la discipline des sciences humaines, peut se définir comme une : « adhésion générale à un principe, à une assertion, à une croyance, qu’on donne parfois comme critère de vérité, comme si cette unanimité était l’expression de la raison »[59]. Puisque l’expert-comptable recherche l’expression de la vérité à travers l’exercice de son jugement, il aura donc d’autant plus l’assurance raisonnable que son opinion exprime la vérité que les jugements qui la soutiennent ont recueilli l’aval du plus grand nombre. Selon la théorie des systèmes, plus un système est le centre de confrontations d’idées et de débats contradictoires, plus il est capable d’identifier les meilleures solutions[60]. Le consensus est d’autant plus difficile à trouver lorsque les intérêts du client et de l’expert-comptable divergent. L’éthique personnelle de l’expert-comptable prend alors toute son importance car elle va lui permettre de tracer les limites rouges à ne pas dépasser. « La conviction et la responsabilité sont les deux pôles de la décision. Mais s’il y a opposition entre les deux extrêmes, il y a aussi complémentarité » nous enseigne Pascal DELANNOY[61]. En effet, la morale de conviction incite le professionnel à agir sans référence aux conséquences. Elle guide donc l’action de l’expert-comptable quelles qu’en soient les conséquences. Par contre, la morale de responsabilité ordonne d’envisager les conséquences possibles d’une décision et de tenter d’introduire dans la trame des évènements un acte qui aboutira à certains résultats. La morale de responsabilité interprète l’action en terme de moyens par rapport à des fins. L’expert-comptable peut donc s’inspirer de ces deux morales. Cependant, la conciliation de deux éthiques n’est pas facile comme le souligne Jean MOUSSÉ : « Les convictions qui donnent sens aux décisions pratiques de la morale se heurtent en permanence à la complexité mouvante des réalités économiques, politiques et sociales. (…) Les convictions restent abstraites et dangereuses tant qu’elles ne s’incarnent pas dans les comportements des hommes et l’organisation de la société. Inversement, les conditions de la vie réelle sont privées de sens humain tant qu’aucune conviction ne les éclaire »[62]. La dialectique entre l’éthique de la conviction et l’éthique de la responsabilité permet de dépasser cette opposition et donne naissance à ce que Jean Moussé appelle l’éthique du compromis : « la plupart des responsables n’ont guère le choix entre deux biens, mais plutôt entre deux options dont aucune n’est parfaite et dont l’une est seulement moins mauvaise que l’autre. Il ne s’agit ni de démission, ni de lâcheté, mais d’intelligence au service du mieux »[63]. Il ne s’agit donc pas pour l’expert-comptable de choisir entre sa solution et la solution du client, mais plutôt de mettre sa compétence et son éthique de la conviction au service de la prise de ses responsabilités, en demeurant conscient que le pragmatisme est le complément nécessaire aux valeurs. Les interrogations éthiques au sujet de sa responsabilité conduisent souvent l’expert-comptable à se référer à son système de valeurs. Avoir une éthique du consensus signifie pour l’expert-comptable de tenir compte des structures de la réalité en dehors desquelles aucune éthique ne peut prendre forme lorsque l’on se réfère à son système de valeur. §3. Le consensus : facteur de stabilité et de cohérence du jugement professionnel L’obtention d’un consensus doit contribuer à la stabilité et à la cohérence du jugement professionnel. L’exercice d’un jugement professionnel d’un expert-comptable sera stable s’il parvient à prendre une décision similaire à un problème similaire pour différents clients, à un moment différent mais dans un contexte présentant des ressemblances. Il ne saurait y avoir pluralité de poids, pluralité de mesures pour un expert-comptable intègre et objectif. Lorsqu’il aboutit à un consensus, l’expert-comptable doit donc faire entrer la solution retenue et son contexte dans sa mémoire et savoir que cette solution sera sa référence pour l’avenir : l’instabilité d’un jugement nuit à son exactitude. Toutefois, la stabilité d’un jugement n’implique pas que le jugement n’est pas évolutif. Le jugement doit être cohérent à toutes les étapes de la démarche. L’expert-comptable doit donc veiller à ce que le consensus qui sera adopté soit cohérent avec l’ensemble des jugements adoptés. L’obtention d’un consensus ne saurait donc se faire au détriment de la stratégie mise en place lors des travaux d’orientation et de planification. Sous section 2 : L’aptitude à délivrer un diagnosticL’expert-comptable doit être à l’écoute de son client. Il doit donc être apte à déceler les indices pouvant indiquer que quelque chose ne va pas, à l’instar du médecin qui doit pouvoir interpréter les symptômes pour agir de façon proactive. Il existe une multitude d’indices aussi bien qualitatifs que quantitatifs pouvant faire l’objet d’interprétation : climat social dégradé, baisse de la rentabilité, absentéisme accru, niveau d’investissement insuffisant, etc. Ce sont les interprétations de ces indices qui vont avoir une incidence sur le jugement, car de sa capacité à appréhender intuitivement ces problèmes va dépendre la qualité d’une partie des données initialisées dans le système de traitement de l’information. De même que la qualité d’un diagnostic est basée sur ses connaissances, son expérience, son intuition et sa perception de l’environnement ; la compréhension intuitive des indices qu’un expert-comptable rencontre au cours de sa mission est un facteur clé pour évaluer la pertinence de son jugement. Sous section 3 : L’aptitude à pouvoir démontrer la logique du jugementEn faisant appel à son jugement professionnel, l’expert-comptable doit être en mesure de démontrer la logique de son jugement. Cette aptitude est en parfaite relation avec la compétence, l’indépendance et la personnalité de l’expert-comptable. L’aptitude à pouvoir démontrer la logique du jugement professionnel de l’expert-comptable n’implique pas systématiquement une documentation de celui-ci. En effet, un jugement peut être qualifié de logique tout en n’étant pas documenté. Sous section 4 : L’aptitude à démontrer la diligenceL’expert-comptable est toujours susceptible de devoir justifier les positions prises notamment lorsque sa responsabilité est mise en cause et qu’il se trouve délié du secret professionnel vis-à-vis d’un juge par exemple. Il se peut que les personnes en charge de porter une appréciation aient une vue différente de celle de l’expert-comptable. Cependant, ce qui importe le plus, c’est qu’il soit en mesure de justifier sa position afin d’être en mesure de prouver qu’il s’est donné les moyens de porter un bon jugement. Il importe donc que l’ensemble des tâches que nous avons détaillées soit correctement documenté afin que le juge soit en mesure de reconstituer le processus de prise de décision et la logique dégagée. Selon l’ICCA, il existe différents types de connaissances[64] : - Les connaissances générales de base, qui se traduisent par une compréhension générale de l’environnement économique, juridique et commercial dans lequel les entreprises et les autres organisations exercent leurs activités ; - Les connaissances particulières ou connaissances directement liées à une ou plusieurs compétences. Il s’agit des compétences que l’expert-comptable a besoin dans le cadre de son travail professionnel quotidien. Ces connaissances peuvent provenir de trois sources : la mémoire (les connaissances retenues), les documents de référence, et les autres professionnels qui peuvent fournir de l’information et des connaissances. Selon l’ICCA, les connaissances particulières peuvent être divisées en deux sous catégories, soit les connaissances à retenir et les connaissances accessibles[65]. - Les connaissances à retenir : ce sont les connaissances, retenues en mémoire par l’expert-comptable, et qu’il utilise sans avoir recours à une autre source pour démontrer qu’il possède les compétences d’un expert-comptable. - Les connaissances accessibles : les experts-comptables sont censés savoir que certaines connaissances et information existent et sont pertinentes, et savoir où et comment y accéder, les extraire ou les obtenir. Lorsqu’il aura un jugement particulièrement important à effectuer, l’expert-comptable devra porter son attention sur les éléments clés à documenter : avant d’annoncer sa décision, il devra donc s’assurer qu’il possède la documentation nécessaire, au niveau de ses connaissances accessibles, telle que la recherche dans les publications, électroniques ou non, pour profiter de l’expérience des autres, étayer sa décision et justifier la mise à l’écart des solutions possibles pouvant être envisagées. On peut résumer ci-après le plan de la documentation reprenant les étapes du processus : - La problématique de la question soulevée, - Les recherches effectuées, - Les solutions possibles envisagées, - Les conséquences de chacune des solutions, - La conclusion dégagée et les raisons de son choix, - La communication au client et les échanges de point de vue. Nous avons vu que la consultation pouvait s’avérer nécessaire notamment lors des phases de la collecte des éléments probants et de la détermination des solutions possibles. La consultation peut être conseillée lors des autres phases. En fait, l’expert-comptable devra procéder à une consultation chaque fois que des incertitudes persistent pour porter un jugement ou qu’il considère que son jugement peut être altéré. La consultation lui permettra d’enrichir alors la qualité de sa documentation. Les questions qui se posent en matière de consultation sont : - Quand consulter? En règle générale, les situations qui exigent l’application de principes techniques complexes ou nouveaux ou lorsque l’expert-comptable se retrouve dans une situation de recherche d’opinion, requièrent la nécessité de consulter. Cette liste n’est bien sûr pas exhaustive et c’est au cas par cas qu’il faudra envisager la question de la consultation. - Qui consulter? La réponse vient de la nature du problème soulevé. En ce qui concerne les questions d’ordre technique, il conviendra de trouver un expert-comptable susceptible d’apporter le niveau d’éclairage professionnel jugé nécessaire, d’où une définition précise de l’étendue de sa mission. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une recherche d’opinion, il peut s’agir de confrères avec lesquelles on souhaite partager un point de vue. On entre alors dans une démarche de recherche de consensus qui aboutira à une solution plus facilement défendable vis-à-vis du client et a fortiori des tiers. L’évaluation d’un processus de jugement complexe peut donc se faire d’après la pertinence de la consultation, tant au niveau du problème posé qu’au niveau du choix de l’interlocuteur. La consultation peut être gratuite ou payante. Sur le plan juridique, l’article 89 du code des obligations et des contrats stipule qu’un « simple conseil ou une recommandation n’engage pas la responsabilité de son auteur,etc. »[66]. Ainsi, l’expert-comptable conserve sa responsabilité totale en cas de recours à la consultation. Pour améliorer l’évaluation de l’exercice du jugement professionnel, il peut être intéressant pour l’expert-comptable de mettre en place une procédure de revue indépendante des dossiers précédant l’émission de l’opinion. Cette procédure se doit d’être graduée en fonction de la complexité des dossiers afin de garder une certaine souplesse dans la gestion interne du cabinet. Il est néanmoins souhaitable qu’un expert-comptable n’ayant pas participé à la mission s’assure que le processus de planification a bien été respecté et que la réponse d’audit qui a été apportée est en adéquation, notamment en ce qui concerne la couverture des risques, avant l’émission du rapport pour l’ensemble des dossiers. Il s’agit en quelque sorte, d’une précaution supplémentaire pour s’assurer que la documentation de base a été mise en place pour étayer l’opinion. En ce qui concerne les dossiers plus complexes, par exemple ceux pour lesquels le risque professionnel est jugé supérieur à la normale ou ceux pour lesquels on pressent un risque sur la continuité de l’exploitation, une revue en profondeur du dossier peut être souhaitable afin que le réviseur indépendant puisse être assuré de la stabilité et de la cohérence des jugements portés à l’échelle du cabinet. Dans ses conditions, la revue indépendante est un facteur efficace d’aptitude à évaluer le jugement professionnel et, par conséquent, un outil au service de la qualité professionnelle des jugements émis, préoccupation majeure des instances professionnelles, tant sur le plan national qu’international. Section 3 : les qualités nécessaires a l’expert-comptable pour exercer son jugementSous section 1 : De la nécessité d’avoir une règle de conduiteLe comportement de l’expert-comptable est défini par les normes nationales et internationales, par le code d’éthique professionnelle et par les bonnes pratiques professionnelles. Cependant, toutes les interrogations que rencontre l’expert-comptable dans l’exercice de son jugement ne trouvent pas systématiquement une réponse dans les normes déontologiques. Afin de réaliser le bon choix dans son espace de liberté, l’expert-comptable doit faire preuve de qualités éthiques. Après avoir défini l’éthique, nous étudierons ses composantes fondamentales à savoir : l’intégrité, la probité, l’objectivité, la courtoisie professionnelle, la compétence professionnelle, soin et diligence, la confidentialité, le professionnalisme, l’indépendance et le respect des normes techniques et professionnelles. L’éthique est « un dynamisme personnel, une préoccupation globale et créative de donner un sens à ce que l’on fait, de choisir en conséquence ses valeurs et ses priorités, d’y conformer sa pratique »[67]. L’éthique s’exprime dans les principes, les règles et les pratiques. Jean Moussé, distingue entre l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité[68]. L’éthique de conviction est celle que « chacun élabore avec plus ou moins de cohérence, de lucidité et de liberté à partir de sa propre expérience, dans ses confrontations aux situations du monde et aux idées des autres »[69]. L’éthique de conviction incite donc « chacun à agir selon ses sentiments sans référence implicite ou explicite aux conséquences »[70]. Quant à l’éthique de responsabilité, « elle est celle que ne peut pas ne pas adopter l’homme d’action. Elle ordonne d’envisager les conséquences possibles d’une décision et de tenter d’introduire dans la trame des évènements un acte qui aboutira à certains résultats, ou déterminera certaines conséquences. L’éthique de responsabilité interprète l’action en terme de moyens par rapport à des fins »[71]. L’éthique présente trois caractéristiques principales : - Lorsque pour prendre une décision, l’expert-comptable réfléchit sur la manière dont il doit se comporter au point de vue éthique, il a une démarche déontologique : les réflexions sur l’éthique renvoient chacun au cœur de sa propre liberté, la permanence de cette interrogation et de cette remise en question fait que les convictions des individus sont en perpétuels mouvements. - L’éthique est une construction intellectuelle : un comportement ne peut être qualifié d’éthique que si l’individu a porté les choix qui se sont offerts à lui au niveau de sa conscience : exercer son jugement professionnel, c’est également faire un examen de conscience en vue de prendre une décision en toute connaissance de cause. - L’éthique est un mode de comportement : Selon FALISE et REGNIER, l’éthique n’a de sens que dans la mesure où avant d’être une théorie, elle est une pratique. Elle peut être difficile à vivre au quotidien puisqu’elle peut réclamer de faire ce que les autres ne font pas ou de ne pas faire ce que beaucoup font. Prendre une décision en adoptant un comportement éthique peut nécessiter courage et force de caractère[72]. Par rapport à l’éthique, la déontologie, quant à elle, a une signification plus restreinte. Elle signifie littéralement « la science de ce qu’il faut faire ». La déontologie est la science traitant des devoirs que crée pour un individu l’exercice d’une certaine profession. Le code déontologique contient l’ensemble des préceptes qui régissent la conduite des personnes appartenant à des professions organisées en ordre. En matière professionnelle, le code déontologique recouvre l’ensemble des actes élaborés non pas par le législateur, mais par les représentants des ordres professionnels. En ce qui concerne la profession d’expert-comptable, l’ensemble de ses règles est consigné dans un code d’éthique professionnel. L’objectif de ce code est de présenter un droit professionnel et de donner une garantie de qualité. Contrairement à l’éthique qui a une portée universelle, le champ d’action de la déontologie se limite à un groupe de personnes qui exercent la même profession. De plus, la déontologie limite le champ de liberté car elle présente des devoirs professionnels comme un impératif hypothétique. Cependant, le code de déontologie professionnelle équivaut, selon MIKOL, « à une charte qui garantit les intérêts des usagers grâce à l’existence d’une éthique professionnelle forte et respectée par les membres de la profession »[73]. En ce sens, le code d’éthique professionnelle est un code de déontologie. Comme l’écrit Pascal DELANNOY, « nous serions tentés de dire que le code de déontologie professionnelle est un minimum éthique découlant d’une pratique antérieure non codifiés qui, ayant fait les preuves de sa nécessité en vue du bien commun, est reconnue positive tant sur le plan interne que sur le plan externe »[74]. Si la déontologie professionnelle aide l’expert-comptable dans son jugement, il semble que se contenter de respecter ces normes ne soit pas suffisant. En effet, le code n’évoque que les lignes principales de l’état d’esprit qui doit le guider dans l’exercice de sa mission. Il apparaît donc nécessaire que l’expert-comptable possède également une éthique personnelle, certes en adéquation avec la déontologie, mais qui la dépasse et lui donne des repères pour exercer son jugement au cas par cas, en s’adaptant aux situations. Jean MOUSSÉ confirme cette nécessité de dépasser la déontologie : « L’éthique apparaît chez l’individu quand il s’interroge et ne peut plus se contenter du conformisme social, religieux ou professionnel »[75]. §2. Les composantes de l’éthique Les composantes de l’éthique sont : l’intégrité, la probité, l’objectivité, la courtoisie professionnelle, la compétence professionnelle, soin et diligence, la confidentialité, le professionnalisme, l’indépendance et le respect des normes techniques et professionnelles. Le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC dispose qu’un professionnel comptable intègre est un professionnel droit et honnête lorsqu’il rend des services professionnels[76]. Dans ce sens, l’ordre des comptables agréés d’Angleterre prévoit que « l’intégrité n’implique pas seulement l’honnêteté, mais aussi des transactions équitables et de la sincérité. Les avis et le travail d’un comptable ne doivent être ni corrompus par son intérêt personnel ni influencés par des partis pris »[77]. La probité est défini comme étant « le caractère d’une personne d’une honnêteté stricte et scrupuleuse, qui observe rigoureusement les principes de la justice et de la morale »[78]. 3) L’objectivité L’ordre des comptables agréés d’Angleterre définit l’objectivité comme étant « l’état d’esprit qui tient compte de toutes les considérations pertinentes pour le travail considéré mais uniquement de ces considérations »[79]. Ainsi, un professionnel comptable est un professionnel équitable et qui ne doit pas laisser des préjugés ou des partis pris, des conflits d’intérêt ou l’influence de tiers nuire à son objectivité. 4) La courtoisie professionnelle Selon LEMAIGNAN et LAMPERT, les experts-comptables se doivent assistance et courtoisie réciproques. Ils doivent s’abstenir de toutes paroles blessantes, de toute imputation malveillante et d’une façon générale de toutes manœuvres susceptibles de nuire à la situation de leurs confrères[80]. Par ailleurs, selon l’ICAEW, l’expert-comptable doit se comporter avec courtoisie avec toutes ses relations au cours de l’exercice de ses fonctions[81]. Aussi, doit-il se comporter avec courtoisie professionnelle avec ses confrères, ses collaborateurs, ses clients ainsi que les administrations publiques. La courtoisie professionnelle suppose donc, non seulement que l’on s’interdise tout dénigrement ou toute parole fausse ou trompeuse à l’égard d’un confrère, mais aussi que l’on conserve toujours le ton professionnel adéquat lorsqu’on s’engage dans un conflit professionnel[82]. 5) La compétence professionnelle, soin et diligence Le code d’éthique de l’IFAC dispose qu’un professionnel comptable doit fournir des services professionnels avec compétence, soin et diligence et est tenu de conserver en permanence un niveau de connaissances et de compétences professionnelles justifiant les attentes du client ou de l’employeur. Ceci suppose que le professionnel comptable s’informe des derniers développements de la pratique professionnelle, de la législation et des techniques. Selon le syndicat patronal de France, « la compétence professionnelle est une combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et comportements s’exerçant dans un contexte précis. Elle se constate lors de sa mise en œuvre en situation professionnelle à partir de laquelle elle est validable. C’est donc à l’entreprise qu’il appartient de la repérer, de l’évaluer, de la valider et de la faire évaluer »[83]. Ainsi, « la compétence n’existe que dans l’agir, c’est-à-dire dans la maîtrise des processus et des outils enrichis par la connaissance ou l’expérience »[84]. Aux termes de l’article 8 de la loi 88-108 du 18 août 1988, « sous réserve de toutes dispositions législatives contraires, les personnes physiques et morales inscrites au tableau de l’Ordre et leurs salariés sont tenus au secret professionnel. Ils sont en outre astreints aux mêmes obligations pour les affaires dont ils ont à connaître à l’occasion de l’exercice de leurs missions ». « Le professionnalisme est l’attitude qui consiste à se comporter en professionnel, à exercer sa profession avec une grande compétence, à mettre en œuvre tous les soins sans négligence et à faire le nécessaire en toute circonstance »[85]. Ainsi, « le professionnalisme consiste à faire le nécessaire selon une démarche pertinente et avec compétence »[86]. Le code d’éthique des professionnels comptables prévoit que l’expert-comptable « ne doit pas nuire à la bonne réputation de la profession et doit se garder de tous agissements susceptibles de la discréditer »[87]. Il doit donc faire preuve de professionnalisme. Le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC distingue entre l’indépendance d’esprit et l’apparence d’indépendance[88] : - L’indépendance d’esprit, c’est-à-dire l’attitude d’esprit qui donne la possibilité d’émettre une opinion en restant à l’abri d’influences portant atteinte au jugement professionnel et en permettant à un individu de se comporter avec intégrité, probité et de faire preuve d’objectivité et de scepticisme professionnel ; - L’apparence d’indépendance, c’est-à-dire le fait d’éviter des situations ou des circonstances revêtant une apparence telle qu’un tiers pourrait raisonnablement conclure que l’intégrité, l’objectivité ou le scepticisme professionnel d’un cabinet ou d’un membre de l’équipe chargée d’une mission d’expression d’assurance ont subi un préjudice intolérable. 9) Le respect des normes techniques et professionnelles Le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC dispose qu’un « professionnel comptable doit rendre des services professionnels conformes aux normes techniques et professionnelles applicables et est tenu de suivre avec diligence et compétence les instructions de son client dans la mesure où elles sont compatibles avec les exigences d’intégrité, d’objectivité et d’indépendance »[89]. En outre, le professionnel comptable doit respecter les normes techniques et professionnelles et la législation en vigueur. Sous section 2 : Les qualités nécessaires pour réduire la part de subjectivité de l’expert-comptableCertaines qualités de l’expert-comptable peuvent influer sur l’exercice du jugement professionnel. L’expert-comptable doit être indépendant et objectif, posséder les connaissances et l’expérience appropriées, maintenir sa compétence professionnelle tout en étant conscient des facteurs d’altération du jugement et faire preuve de scepticisme professionnel. Ces valeurs nécessaires à l’expert-comptable peuvent être résumées dans le tableau 2 ci-dessous[90] :
Chacune de ces caractéristiques mérite d’être étudiée en profondeur. Nous distinguerons les qualités personnelles des qualités professionnelles. §1. Les qualités nécessaires sur le plan personnel Les qualités personnelles de l’expert-comptable peuvent être regroupées comme suit : - La compétence ; - L’objectivité, l’intégrité et l’indépendance ; - Et, la personnalité. 1) Pouvoir être un professionnel compétent et consciencieux La compétence peut être définie comme étant « une combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et comportements s’exerçant dans un contexte précis. Elle se constate lors de sa mise en œuvre en situation professionnelle à partir de laquelle elle est validable »[91]. Selon l’ICCA, « la compétence comprend une vaste gamme de connaissances, d’attitudes et de comportements observables qui, pris ensemble, constituent la capacité de rendre un service professionnel déterminé »[92]. La compétence est une valeur reprise dans la devise de la profession comptable sous le terme « science ». Un homme compétent est un homme capable de bien juger d’une chose, qui a des compétences approfondies dans une matière. « Le devoir de compétence permet au professionnel de s’acquitter au mieux des deux impératifs à la base de l’exercice professionnel : - Accomplir un travail de qualité irréprochable; - Accomplir son devoir de conseil »[93]. La compétence est évoquée dans le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC. Elle distingue deux phases distinctes, d’une part l’acquisition d’une compétence professionnelle et d’autre part l’entretien de la compétence professionnelle. L’acquisition d’une compétence professionnelle requiert un niveau élevé de formation générale, suivie d’un enseignement, d’une formation et d’examens spécialisés ainsi que d’un stage professionnel. L’entretien de la compétence professionnelle requiert que l’expert-comptable soit en permanence au courant des développements intervenus dans la profession comptable, notamment les recommandations nationales et internationales adoptées en matière de comptabilité, d’audit et d’autres disciplines ainsi que les prescriptions réglementaires et légales concernées. D’un autre côté, l’entretien de la compétence professionnelle requiert que l’expert-comptable adopte un système de contrôle qualité dans l’exécution de ses travaux professionnels. A titre d’exemple, l’article 40 du code d’éthique professionnelle français, énonce : « afin de maintenir le haut degré de compétence qu’exige sa mission, tout professionnel doit consacrer annuellement un certain nombre d’heures à sa formation permanente et veiller également à celle de ses collaborateurs »[94]. Les objectifs que l’on peut assigner à ces normes témoignent de deux préoccupations : - Homogénéiser le comportement professionnel : bien que l’expert-comptable dispose d’une grande liberté d’action pour assumer sa mission, il est cependant souhaitable qu’à un niveau de connaissance identique, corresponde un comportement homogène des professionnels dans l’application de ces connaissances. - Actualiser les connaissances : l’expert-comptable se doit de se tenir informé des évolutions de la législation, de la doctrine, des techniques comptables et d’audit. « La conscience vient du latin « conscienta », formé de « cum » (avec) et « scienta » (savoir, connaître). Conscience signifie donc " savoir avec" ou " connaître avec " »[95]. La conscience signifie littéralement la connaissance partagée avec quelqu’un et évoque un sentiment intime avec l’idée de bien et de mal. « Lorsque cette connaissance porte sur la valeur d’une chose ou d’un acte, la conscience devient morale »[96]. Ainsi, lorsqu’il prend une décision ou porte un jugement, « l’expert-comptable se situe en totalité dans un choix libre, avec la possibilité d’accepter ou de refuser le fait dont il a pris conscience »[97]. b) Les qualités nécessaires pour être compétent et consciencieux Pour mettre à jour ses connaissances, l’expert-comptable doit savoir se remettre en question et être animé par la volonté naturelle de se trouver à la pointe de l’information. Un sentiment de suffisance lui ferait renoncer à cette perpétuelle remise en question. La remise en question de l’expert-comptable doit aller de pair avec une volonté de découverte. L’ouverture d’esprit de l’expert-comptable doit lui permettre d’aborder sans a priori, mais également sans ignorance, les différents interlocuteurs ou situations qu’il pourra rencontrer et d’apprécier la situation de l’entreprise dans son environnement. Si l’expert-comptable doit disposer de la compétence technique nécessaire à ses investigations, il doit également avoir un esprit ouvert et posséder une mobilité intellectuelle et une sensibilité lui permettant d’appréhender les contraintes de l’entreprise qu’il audite ou conseille. L’expert-comptable doit alors être prêt à accepter les points de vues des autres et à consulter les professionnels et les spécialistes. Il ne sera capable de bien exercer son intuition que dans la mesure où il comprend l’environnement dans lequel il opère. iii) La culture générale L’expert-comptable doit avoir une culture générale adéquate. Il ne saurait limiter le développement des connaissances, nécessaires à l’exercice d’un jugement, aux seuls domaines qui touchent la profession. En développant sa culture générale, l’expert-comptable affermit son aptitude au jugement. iv) La probité et l’honnêteté intellectuelle Cette caractéristique doit permettre à l’expert de savoir refuser une mission pour laquelle il se sent incompétent. Mais l’audit ou le conseil étant un travail d’équipe, cela suppose qu’il s’assure également qu’il dispose de collaborateurs suffisamment compétents pour assurer les travaux qu’il va leur déléguer. Le professionnel doit donc veiller constamment à ce que son équipe dispose des compétences nécessaires et, par conséquent, prendre en charge la formation de son équipe. L’expert-comptable doit également être un homme honnête, c’est-à-dire qu’il doit se montrer consciencieux en réalisant correctement son travail et en agissant suivant sa conscience. Il importe donc qu’il sache extraire de tels repères de ses connaissances et de son vécu et qu’il ne succombe pas à la tentation de s’accommoder aux situations en ayant des repères plus ou moins élastiques. Ce mode de comportement nécessite donc force et obstination pour vivre en harmonie avec ses valeurs. Reconnaître son incompétence et recourir éventuellement à un expert nécessite de savoir faire preuve de discernement et d’humilité. En sollicitant l’assistance d’un spécialiste, l’expert-comptable a l’occasion de recueillir un niveau d’information supérieur au niveau de ses compétences pour étayer son jugement, de fournir une prestation de qualité à son client et de s’enrichir sur le plan intellectuel au contact de cet expert. vi) Le travail en équipe Selon A. YAICH, « le travail d’équipe est un facteur d’amélioration de la qualité des jugements professionnels en raison de la confrontation des points de vue différents que l’équipe suscite pourvu que ce soit réalisé dans une ambiance empreinte de courtoisie et de respect mutuel. Dans ce sens le principe de vérité dans la théorie des systèmes établit que plus un système est le siège d’interactions multiples et variées, plus il est capable de bien agir »[98]. Les missions liées aux états financiers nécessitent un travail d’équipe. Les collaborateurs doivent donc développer outre les compétences professionnelles et personnelles requises, des compétences pour le travail d’équipe. Selon le guide de compétence du cabinet d’expertise comptable, les compétences nécessaires pour le travail d’équipe sont essentiellement les suivantes [99]:
2) Pouvoir être un professionnel objectif, intègre et indépendant L’indépendance est le troisième pilier de la devise des professions comptables. Cette notion d’indépendance est interdépendante de deux autres qualités que sont l’objectivité et l’intégrité dont il convient, en préambule de préciser les liens. L’indépendance caractérise les circonstances dans lesquelles l’expert-comptable doit fonder son opinion ou prendre une décision. L’objectivité se caractérise par l’état d’esprit qui anime l’expert-comptable traduisant sa volonté de formuler des jugements impartiaux. Cette objectivité se manifeste par une intégrité et une attitude professionnelle dénuées de tout parti pris. Le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC fait la part belle à l’indépendance en consacrant à cette valeur une section dans sa partie applicable aux professionnels comptables libéraux. Il propose de traiter les questions d’indépendance selon une approche conceptuelle mettant en place les grands principes applicables à l’indépendance. Il « donne également des indications spécifiques sur la façon de considérer les menaces potentielles sur l’indépendance dans certaines situations et précise les sauvegardes qui doivent être envisagées afin de minimiser le risque d’atteinte à l’objectivité »[100]. Les menaces identifiées pour l’indépendance sont les suivantes[101] :
« Si les menaces, prises individuellement ou collectivement, ne sont pas manifestement négligeables, le professionnel devra mettre en place des sauvegardes afin d’éliminer ces menaces ou prendre des mesures propres à les ramener à un niveau ne portant aucune atteinte, réelle ou perçue, à l’intégrité »[102]. Il existe trois catégories de sauvegardes[103] :
b) Les qualités personnelles nécessaires pour respecter la règle d’indépendance L’indépendance d’esprit désigne « l’état d’esprit qui permet d’émettre une opinion sans être affecté par des influences qui compromettent le jugement professionnel permettant à un professionnel d’agir avec l’intégrité et d’exercer l’objectivité et le scepticisme professionnels adéquats »[104]. « L’apparence d’indépendance implique que le professionnel doit éviter les faits ou les circonstances qui sont tels qu’une troisième partie objective et raisonnable, bien informée et ayant connaissance de tous les éléments pertinents y compris les mesures préventives appliquées, peut raisonnablement conclure que l’intégrité, l’objectivité ou le scepticisme professionnels sont compromis »[105]. Outre les qualités ci-dessus étudiées, l’expert-comptable doit avoir une forte personnalité qui lui permettra d’avoir suffisamment confiance en soi pour utiliser sa compétence, son objectivité et son intégrité dans ses jugements professionnels en toute indépendance. §2. Les qualités nécessaires sur le plan professionnel Les qualités nécessaires sur le plan professionnel sont l’esprit critique et l’expertise. 1) L’esprit critique Pour se soumettre aux règles d’éthique professionnelle, l’expert-comptable doit avoir un esprit critique. En effet, afin de respecter les conventions de prudence et de diligence, l’expert-comptable se doit de se montrer sceptique sans tomber dans le piège de la méfiance absolue : il s’agit là d’un équilibre délicat à trouver qui nécessite une part d’intuition. L’expert-comptable, en accordant une trop grande confiance dans son client, risque de ne pas être suffisamment critique par rapport aux éléments qu’il aura recueillis lors de ses investigations ou de ne pas porter attention à des éléments susceptibles de menacer la continuité d’exploitation. Les dirigeants qui arrêtent les comptes des entreprises sont, en règle générale, honnêtes, consciencieux et dressent donc des comptes annuels réguliers et sincères. Si l’expert-comptable, en tant que commissaire aux comptes, exécute sa mission dans un climat de méfiance et en remettant en cause chaque opération, il sera dans l’impossibilité de formuler son opinion car il ne terminera jamais sa mission. Il doit donc faire preuve d’esprit critique, nécessaire pour bâtir son opinion, en ne se fondant pas uniquement sur ses préjugés. L’équilibre entre le doute cartésien et la confiance absolue, garant de l’esprit critique de l’expert-comptable, peut être trouvé grâce à l’intuition dont il doit faire preuve. Comme le signale Mireille Barrière DION, l’intuition est un des éléments de l’environnement qui nous force à transgresser « les règles de la méthode » de Descartes en vue de distinguer le vrai du faux pour porter un jugement : « l’intuition ou l’instinct se définit comme ce qui n’exige pas d’apprentissage. C’est une connaissance innée qui est difficilement dissociable de l’intelligence »[106]. 2) Etre expert : optimiser à la fois ses connaissances et son expérience Une étude réalisée en 1992 par des chercheurs américains[107] a tenté de recenser quels pouvaient être les attributs de l’expertise en audit en les classant par ordre d’importance. Ces qualités sont reprises dans le tableau 3 ci-dessous[108] :
Pour réunir l’ensemble des attributs repris dans ce tableau, l’expert-comptable doit optimiser à la fois ses connaissances et son expérience. Son expérience acquise sur le terrain alliée à ses connaissances techniques le mettent en situation de faire preuve d’expertise comme le montre les exemples ci-dessous[109] :
On constate donc que l’expertise est un concept très vaste qui demande la réunion de nombreuses qualités. Un des paramètres déterminants réside dans la capacité de l’expert à résoudre des problèmes, ce qui sous-tend la capacité de raisonner d’une manière analytique et d’interpréter les données. Cela s’acquiert par l’expérience mais cette habilité est probablement en partie innée car elle fait appel à des qualités telles la créativité et l’intuition qui peuvent difficilement s’acquérir. Deuxième partie : Pratique du jugement professionnel IntroductionLa deuxième partie traite des illustrations du jugement professionnel dans les missions d’audit (chapitre 1) et dans les missions de présentation des états financiers (chapitre 2). Pour ce faire, nous examinerons la part accordée au jugement professionnel et l’appréciation du comportement a posteriori. Des propositions seront effectuées en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession (chapitre 3). Chapitre 1 : Illustrations du processus de prise de décision dans les missions d’auditCe chapitre porte sur l’importance du jugement professionnel dans les normes d’audit, d’une part, et illustre le processus du jugement professionnel dans les missions d’audit, d’autre part. Section 1 : La part accordée au jugement dans les normes d’auditLa première recherche effectuée consiste en une recherche manuelle de l’occurrence « jugement » dans les normes internationales d’audit. La synthèse de cette recherche est présentée dans l’annexe 1. Le terme « jugement » est utilisé quarante neuf fois dans les normes internationales d’audit. La moyenne par rapport aux thèmes des normes internationales d’audit est de cinq. Le titre, relatif aux éléments probants, comporte dix neuf occurrences du terme « jugement », soit à peu près quatre fois la moyenne. Ce titre regroupe essentiellement l’audit des estimations comptables et l’utilisation des sondages en audit. La moyenne par rapport aux thèmes des normes internationales d’audit, hors celui relatif aux éléments probants, est de quatre. Le titre relatif aux responsabilités de l’auditeur comporte sept occurrences du terme « jugement ». Par contre, le titre relatif à la planification des travaux d’audit reprend le terme « jugement » à six reprises. Enfin, le terme « jugement » est repris cinq fois dans le titre relatif aux conclusions de l’auditeur et à son rapport. La seconde analyse menée consiste à relever le nombre d’occurrences, où la norme, du fait du vocabulaire et du sens des phrases employées, fait référence à un jugement. Les références au jugement dans les normes internationales d’audit figurent dans l’annexe 2. Parmi les situations qui font référence au jugement, on peut citer : - La norme d’audit ISA 120, relative au cadre conceptuel des normes internationales d’audit, prévoit que l’objectif de l’audit des états financiers est d’exprimer une opinion sur les états financiers dans tous ses aspects significatifs. Par ailleurs, l’audit des états financiers procure un niveau d’assurance élevé et non absolu. En effet, dans les missions d’audit, l’auditeur fait recours à son jugement, utilise des techniques d’échantillonnage, procède à des estimations comptables, etc. - Selon la norme d’audit ISA 320, relative au caractère significatif en matière d’audit, l’évaluation du caractère significatif d’un élément des états financiers relève du jugement professionnel de l’auditeur. Par ailleurs, dans l’évaluation de l’impact des anomalies, le cumul des anomalies englobe celles décelées au cours de l’audit des états financiers et celles impossibles à identifier avec précision. Ces dernières résultent d’une estimation de la part de l’auditeur. Ces estimations font appel à son jugement. - La norme d’audit ISA 400, relative à l’évaluation du risque et du contrôle interne, prévoit que l’évaluation du risque d’audit et des risques qui le composent, relève du jugement professionnel. Par ailleurs, dans le cadre de l’audit des petites entreprises, l’auditeur peut utiliser des tests substantifs sans recourir aux tests sur les contrôles internes. Toutefois, aucun critère n’est indiqué pour apprécier qu’une entreprise soit petite ou non. L’appréciation qu’une entreprise soit petite ou non fait appel au jugement de l’auditeur. - Selon la norme d’audit ISA 530, relative aux sondages en audit et autres méthodes de sélection d’échantillons, l’auditeur sélectionne les procédures d’audit nécessaires pour réduire le risque d’audit à un niveau acceptable faible. Cette sélection dépend du jugement professionnel de l’auditeur. Le recours aux sondages est une méthode parmi d’autres pour sélectionner des éléments. La décision d’utiliser une approche d’échantillonnage statistique ou non dépend du jugement de l’auditeur. La taille de l’échantillon dépend aussi du jugement de l’auditeur pour décider s’il fait recours à la théorie des probabilités pour l’exercice de son jugement. - Dans la norme d’audit ISA 540, relative à l’audit des estimations comptables, l’auditeur estime le caractère raisonnable des estimations faites. Ces estimations peuvent être complexes et nécessiter l’exercice de jugement. L’utilisation d’une estimation comptable indépendante nécessite par ailleurs un jugement de la part du professionnel. - La norme d’audit ISA 570, relative à l’hypothèse de continuité d’exploitation, a prévu des critères qui peuvent indiquer que la continuité d’exploitation est compromise. Toutefois, ces critères ne sont pas exhaustifs, d’une part, et n’indiquent pas systématiquement que l’exploitation est compromise. L’évaluation de la continuité de l’exploitation relève du jugement de l’auditeur. La moyenne des occurrences où la norme fait référence au jugement est de vingt sept. Cette moyenne est déjà élevée par rapport à celle des occurrences du terme jugement dans les normes internationales d’audit. Le nombre d’occurrences où la norme fait appel au jugement se trouve élevé par rapport à la moyenne, en parfaite corrélation avec le thème de la norme. C’est le cas de l’utilisation des sondages en audit, de l’audit des estimations comptables, du rapport de l’auditeur ou encore de l’évaluation du risque et du contrôle interne. L’ensemble de ces constatations a permis de mettre en évidence l’importance du jugement professionnel dans les normes internationales d’audit, que ce soit dans leur libellé ou dans la manière dont elles sont rédigées. Section 2 : Etudes de cas de jugement professionnel dans les missions d’auditLe jugement professionnel de l’expert-comptable est exercé à toutes les étapes d’une mission d’audit. Cette section est consacrée aux deux thèmes suivants : - la détermination du seuil de signification pour la détermination des tests substantifs, et; - l’audit des estimations comptables. Sous section 1 : Détermination du seuil de significationNous examinerons les règles de détermination du seuil de signification, d’une part, et le processus du jugement professionnel dans la détermination du seuil de signification, d’autre part. §1. Règles de détermination du seuil de signification Selon la norme d’audit ISA 320, « on considère que des informations sont significatives si leur omission ou leur inexactitude sont susceptibles d’influencer les décisions économiques prises par les utilisateurs se fondant sur les états financiers. »[110]. Selon A. AMRI, « le seuil de signification est défini comme étant le montant à partir duquel des omissions ou inexactitudes, isolées ou cumulées, auraient pour effet d’influencer le jugement d’une personne raisonnable se fiant aux états financiers. »[111]. La détermination du seuil de signification est nécessaire afin de définir la nature et l’étendue des procédures d’audit et d’évaluer l’effet des anomalies dans les états financiers. Lors de la conduite d’une mission d’audit, l’auditeur doit tenir compte du caractère significatif d’une information et de son lien avec le risque d’audit. 1) Le lien entre l’importance relative et les risques Le risque d’audit est « le risque que l’auditeur exprime une opinion incorrecte du fait d’erreurs significatives contenues dans les états financiers. »[112]. Les composants du risque d’audit ( RA ) sont le risque inhérent ( RI ), le risque lié au contrôle interne ( RNC ) et le risque de non détection ( RND ). Il est calculé selon la formule suivante[113] : RA = RI x RNC x RND Le risque inhérent est « la possibilité que le solde d’un compte ou qu’une catégorie de transactions comporte des erreurs significatives isolées ou cumulées à des erreurs dans d’autres soldes ou catégories de transactions, nonobstant les contrôles internes existants. »[114]. Au moment de l’évaluation de ce risque, certains critères peuvent être pris en considération tant au niveau des états financiers qu’au niveau des soldes des comptes et des catégories d’opérations. i) Au niveau des états financiers Au niveau des états financiers, les critères à prendre en considération sont la situation économique et financière de l’entreprise, son organisation interne et la qualité de sa direction[115]. - La situation économique et financière de l’entreprise L’auditeur prend en considération : o L’organisation interne de l’entreprise Les risques ont trait essentiellement à : o l’absence d’un service d’audit interne et de contrôle de gestion; o l’utilisation de systèmes comptables sophistiqués tels que des systèmes informatisés complexes. - La qualité de la direction de l’entreprise La qualité de la direction est appréciée en combinant les éléments suivants : o La sensibilité de la direction au contrôle et son style de direction qui reflètent son attitude diffusée dans l’entreprise. En effet, tout système de contrôle interne, aussi efficace soit-il, peut devenir inopérant lorsqu’un dirigeant passe outre à un contrôle existant. Dans ce cas, le risque est estimé par l’auditeur à un niveau élevé ; o Les influences qui s’exercent sur la direction : Il s’agit des circonstances qui pourraient inciter les dirigeants à présenter des états financiers inexacts. Il en est ainsi lorsque la situation financière de la société est malsaine. Le risque lié aux irrégularités ou aux malversations destinées à présenter un meilleur profil de la situation financière et de meilleurs résultats d’exploitation s’en trouve augmenté. ii) Au niveau des soldes des comptes et des catégories d’opérations Les critères à prendre en considération, au niveau des soldes des comptes et des catégories d’opérations sont la nature de l’élément comptabilisé, les éléments donnant lieu à des estimations comptables et la fréquence de l’élément comptabilisé. [116] § Nature de l’élément comptabilisé : Certains éléments d’actifs sont plus vulnérables aux pertes ou aux détournements que d’autres, tels que l’argent en caisse. § Les éléments donnant lieu à des estimations comptables : Certains comptes sont évalués par des estimations arrêtées par la direction de l’entreprise, telles que les provisions pour dépréciation des créances douteuses, pour dépréciation des stocks, les provisions pour garanties, les provisions pour risques et charges, etc. § Fréquence de l’élément comptabilisé : Lorsque l’activité économique de l’entreprise comprend des périodes engendrant des opérations comptables multiples qui risquent de faire pression sur le contrôle interne. Aussi, la survenance d’évènements exceptionnels ou complexes est de nature à augmenter le risque inhérent. b) Le risque lié au contrôle (RNC) Le risque lié au contrôle est « le risque qu’une erreur significative dans un solde de compte ou dans une catégorie de transactions, isolée ou cumulée à des erreurs dans d’autres soldes ou catégories de transactions, ne soit ni prévenue ni détectée et corrigée en temps voulu par les systèmes comptables et de contrôle interne »[117]. L’auditeur estimera la qualité du système de contrôle interne à partir de la description des procédures puis à l’aide de tests des procédures qui permettront de contrôler le fonctionnement de ces procédures. L’évaluation du contrôle interne comporte les phases suivantes[118] : L’auditeur décrit au cours de cette phase les caractéristiques principales des modules (achats, ventes, paie, trésorerie, etc. ) et des flux de transactions (livraisons, expéditions, encaissements, décaissements, etc.). Il vérifie que les procédures de contrôle interne permettent d’atteindre les objectifs de contrôle suivants [119]: - l’exhaustivité des enregistrements comptables; - la validité des opérations comptabilisées; - l’exactitude des opérations comptabilisées; - l’enregistrement correct des opérations comptabilisées; Afin de s’assurer qu’il a bien compris les procédures de contrôle interne et qu’elles existent, l’auditeur effectuera des tests de cheminement. ii) Appréciation du contrôle interne En analysant les procédures, l’auditeur cherche à dégager, pour chaque cycle significatif, les endroits dans les flux des opérations où les objectifs de contrôle pourraient ne pas être atteints. Ces endroits sont ceux où des contrôles sont nécessaires. Après avoir identifié les endroits dans le flux des opérations où des erreurs pourraient se produire, l’auditeur cherchera si des contrôles efficaces ont été mis en place pour empêcher ou détecter ces erreurs ou si des contrôles nécessaires sont absents. L’existence de contrôles efficaces doit être vérifiée par des tests de procédures pour s’assurer de leur correcte application. L’auditeur pourra alors évaluer le risque lié au contrôle interne. L’appréciation pourra être faite soit en pourcentage soit d’une manière qualitative en termes de faible, modéré ou élevé. c) Le risque de non détection (RND) Le risque de non détection est «le risque que les contrôles substantifs mis en œuvre par l’auditeur ne parviennent pas à détecter une erreur dans un solde de compte ou dans une catégorie de transactions qui, isolée ou cumulée à des erreurs d’autres soldes de comptes ou catégories de transactions, serait significative.»[120]. Ce risque dépend directement des contrôles substantifs mis en place par l’auditeur. Il est impossible de l’éliminer, même si l’auditeur examine exhaustivement les soldes de comptes ou les catégories de transactions, car la plupart des éléments probants réunis par l’auditeur conduisent davantage à des déductions qu’à des certitudes. Le risque inhérent et le risque lié au contrôle se distinguent du risque de non détection en ce qu’ils existent indépendamment de l’audit. Ils sont fonction de l’entreprise, de son environnement économique et de ses contrôles, peu importe qu’un audit soit ou non effectué. Les causes du risque de non détection sont multiples. Elles peuvent être les suivantes[121] : - Les causes propres à l’auditeur : Ces causes sont dues à l’inefficacité des procédures de contrôle; à l’évaluation incorrecte du système comptable; à la mauvaise organisation de la mission; etc. - Les causes imputables aux tiers : Les causes imputables aux tiers sont dues à une mauvaise information de l’auditeur; à une mauvaise maîtrise des évènements futurs; etc. - Les causes liées aux domaines non contrôlés : Elles sont dues à l’absence de contrôle sur certains postes « non risqués »; à l’impossibilité de contrôler la totalité de certains postes; etc. Le choix de certaines procédures ou contrôles a donc pour corollaire l’existence d’un risque global de mission. La minimisation de ce risque demeure toujours l’objectif essentiel de l’auditeur. d) La relation seuil de signification-risque Seuil de signification et risque sont deux concepts qui ne peuvent être dissociés l’un de l’autre car toute étude du risque aboutit à une notion d’erreur qui peut se quantifier dans les états financiers. Le seuil de signification renvoie à l’ampleur d’une erreur donnée, alors que le risque renvoie à la possibilité qu’une erreur de cette ampleur se soit glissée dans les états financiers. L’auditeur sait donc par intuition que le niveau de risque et le seuil de signification influencent l’étendue de son travail. Toute décision d’abaisser le seuil de signification ou le niveau de risque se traduit en effet par une augmentation de l’effort de révision. Dès lors, il est facile de concevoir la relation qui existe entre ces deux notions, car pour un effort d’audit donné, le seuil de signification et le risque varient en sens inverse. En effet, Le seuil de signification est « inversement proportionnel au niveau du risque d’audit »[122]. Plus le seuil de signification est élevé, plus le risque d’audit est faible et inversement. Ainsi, lorsque le risque d’audit est estimé à un niveau élevé, l’auditeur fixera un seuil de signification faible qui lui servira pour étendre ses travaux d’audit. Inversement, lorsque le risque d’audit est estimé à un niveau faible, l’auditeur fixera le montant du seuil de signification à un niveau élevé afin de réduire les travaux d’audit. Il s’agit donc de notions qui permettent d’augmenter l’efficacité du travail de révision en centrant les contrôles sur les « zones à risque » tout en respectant les contraintes de la mission (coût, temps). 2) L’importance relative et l’identification des domaines significatifs Après avoir déterminé les risques potentiels, l’auditeur cherchera à déceler les éléments significatifs devant faire l’objet de contrôles approfondis. Ces éléments sont fonction du montant du seuil de signification. Ce montant est la résultante d’une base de référence et d’un taux. Afin de déterminer la base de référence du seuil de signification, deux types de critères sont à prendre en considération, à savoir les critères qualitatifs et les critères quantitatifs. Certains critères qualitatifs ont été définis en matière de seuil de signification. Parmi ces critères, on peut citer [123]: Les bases de référence les plus fréquemment utilisées sont les suivantes[124] : - un résultat retraité; par exemple, le bénéfice courant; - un poste d’un état financier auquel l’élément est associé; par exemple, le chiffre d’affaires; Les taux les plus couramment appliqués sont les suivants [125]: - 5% à 10% du résultat courant avant impôt; - 1% à 2% des capitaux propres; - 0,5% à 1% du chiffre d’affaires. L’erreur tolérable est définie comme étant « le montant maximum d’erreurs dans un compte, qui, additionnée avec les erreurs des autres comptes, ne remet pas en cause la fiabilité des états financiers »[126]. La détermination des erreurs tolérables est faite en fonction de la facilité de contrôle de certains postes, en liaison avec l’étude des risques, et selon la probabilité que le client corrige ou non les erreurs. L’erreur tolérable est fixée afin d’identifier les comptes et groupes de comptes significatifs. Afin de déterminer les comptes et les sources d’informations significatifs et l’étendue des tests substantifs, l’associé responsable doit déterminer le seuil de signification. La démarche à suivre pour la détermination du seuil de signification comporte les étapes suivantes : - La description du problème posé ; - La collecte de la documentation ; - L’identification des choix possibles ; - L’évaluation des choix ; et, - La formulation des conclusions. 1) La description du problème posé La problématique consiste à dégager un seuil de signification afin d’élaborer le plan de mission et de déterminer par conséquent les comptes significatifs et l’étendue des tests substantifs. Quelle base de référence et quel taux doit-on choisir afin de déterminer le seuil de signification? A travers l’analyse du dossier permanent et les divers entretiens effectués avec les responsables de la société, les informations suivantes peuvent donner une présentation générale de la société. Présentation générale de la société
Historique de l’entreprise : La société CHIMIE est une société de famille, créée en 1973 sous la forme SARL. Depuis 2 ans, c’est le fils qui a pris la direction mais l’influence du père reste très forte. Activités : Les produits fabriqués par la société CHIMIE sont regroupés sous trois familles à savoir A,B et C. Ces familles représentent respectivement 10%, 10% et 80% de la production totale de la société. Place sur le marché : La société était leader sur le marché, avec une part de marché de 70%. Le secteur des industries chimiques est un secteur très concurrentiel. Au cours de ces dernières années, des concurrents étrangers ont intégré le marché et ont arraché des parts de marché significatives. Principaux clients : Les principaux clients sont des clients locaux. Ils représentent 70% des clients de la société. Les clients à l’exportation représentent 30%. En n-2 et n, les ventes à l’exportation représentent respectivement à 71% et 74%. Principaux fournisseurs : Les fournisseurs de la société sont essentiellement des fournisseurs étrangers (matières premières, matériels, etc.). Caractéristiques : Les caractéristiques de la société concernent essentiellement ses modes de financement, la nature de ses stocks et le caractère familial de sa direction. La société CHIMIE fait recours aux emprunts bancaires pour financer ses investissements. Les stocks sont constitués essentiellement de produits inflammables. Politiques de l’entreprise : En matière de production, la société fonctionne à 100% de sa capacité de production. Ses produits sont fortement influencés par l’innovation technologique. Ses achats sont gérés en recourant à des consultations restreintes. En matière commerciale, pour les ventes locales, la société accorde à ses clients 15% de remise sur les ventes payées au comptant et 10% pour les autres ventes. Etats financiers
b) Investigations complémentaires Les investigations complémentaires effectuées ont débouché sur les résultats suivants : - Trois incendies sont survenus durant les 2 dernières années dans 3 sociétés du même secteur. Les incendies survenus sont dus au caractère inflammable des produits de la société; - L’analyse de la section juridique du dossier permanent a permis de constater que le gérant, CHIMIE fils, perçoit une gratification annuelle de 2% nette d’impôt calculée sur la base du bénéfice net. Cette gratification est indiquée dans le procès-verbal de l’assemblée générale ordinaire du 14 avril n-7. - La direction est en principe intéressée par les résultats. Toutefois, puisque les résultats dégagés au titre des 3 dernières années sont fluctuants et oscillent entre pertes et profits, le souci de la direction est de préserver l’image de marque et le patrimoine de la société constitué auparavant par CHIMIE père. Pour s’informer sur la position de la société sur le marché, un entretien a été effectué avec la direction. Cette dernière a affirmé que la société n’est pas affectée par l’introduction des concurrents locaux et étrangers et qu’elle a lancé sur le marché, début de l’année n, de nouveaux produits avec des qualités et des marges différentes. Une étude récente effectuée par un institut d’études économiques sur le secteur des industries chimiques fait apparaître que la part de marché de la société a été réduite de 15%. 2) La collecte de la documentation La détermination du seuil de signification est une étape importante dans la mission d’audit. En effet, son niveau conditionne la nature, le calendrier et l’étendue des tests substantifs qui seront mis en œuvre par l’auditeur. Elle doit être faite dans le cadre des normes internationales d’audit de l’IFAC et plus particulièrement la norme d’audit ISA 320, relative au caractère significatif en matière d’audit. Le manuel d’audit du cabinet XYZ, prévoit les règles suivantes en matière de détermination du seuil de signification : « Le résultat courant avant impôts constitue généralement le critère le plus important pour la prise de décision des utilisateurs externes des états financiers. Lorsque le résultat courant avant impôts constitue un critère approprié de mesure du seuil de signification, nous prenons 5% à 10% du résultat courant avant impôt, avec comme principe que les ajustements inférieurs à 5% sont le plus souvent non significatif, etc. Si la société réalise un résultat proche de zéro ou qui oscille entre bénéfice et perte d’une année à l’autre, le bénéfice avant impôts peut ne pas être le meilleur critère de détermination du seuil de signification. 0,5% à 1% des ventes peut être une meilleure méthode de détermination du seuil de signification dans de telles situations. Si le résultat courant avant impôts n’est pas un critère pertinent pour déterminer le seuil de signification, par exemple, parce que les résultats d’exploitation ont été si mauvais que la liquidité et la solvabilité sont devenues un problème majeur, il peut être alors plus judicieux de calculer le seuil de signification en fonction de la situation financière. 1% des capitaux propres peut être un point de départ approprié. Lorsque les capitaux propres diminuent et tendent vers zéro, leur utilité en tant que critère de détermination du seuil de signification diminue également, au même titre que celle du résultat net en situation proche de l’équilibre. Dans de telles circonstances, nous pouvons envisager l’utilisation d’un faible pourcentage du total de l’actif, si cela nous semble approprié ». 2) L’identification des choix possibles Les informations recueillies sur la société et son secteur d’activité permettent d’estimer le risque d’audit à un niveau élevé. En effet, le secteur d’activité est fortement concurrentiel et influencé par l’innovation technologique. Par ailleurs, l’organisation interne de la société n’est pas formalisée et ne comporte pas de service d’audit interne. Enfin, l’audit des états financiers de l’exercice n constitue la première intervention du cabinet XYZ. Le seuil de signification est inversement proportionnel au risque d’audit. Puisque le risque d’audit est estimé à un niveau élevé, le taux de référence sera la borne inférieure des fourchettes généralement admises. Le tableau synoptique des différentes solutions possibles se présente comme suit :
Le bénéfice constitue en principe la préoccupation principale des associés. Toutefois, dans le cas de la société CHIMIE, la base de référence correspondant au résultat courant n’est pas une base appropriée. En effet, les résultats oscillent entre bénéfice et perte et varient de façon significative d’une année à l’autre. Les variations des seuils, calculés sur la base du résultat courant, se détaillent comme suit :
La variation des seuils basés sur le critère des capitaux propres n’est pas significative. Les seuils calculés sur la base de l’actif total se détaillent comme suit :
Les seuils calculés sur la base de l’actif total varient de façon significative et fournissent une moyenne de 266 kilos dinars. 3) L’évaluation des choix La détermination du seuil de signification affecte l’audit puisqu’elle détermine l’étendue des tests substantifs. Cependant, il faut tenir compte des attentes des utilisateurs des états financiers. Les associés, sont en principe, intéressés par le résultat. Leur préoccupation concerne alors les capitaux propres puisque les résultats sont instables et oscillent entre bénéfice et perte. Par ailleurs, les seuils de signification calculés sur la base des critères, autres que celui des capitaux propres, varient de façon significative. Les variations des seuils de signification calculés se résument dans le tableau suivant :
Le seuil de signification calculé sur la base des capitaux propres ne varie pas de façon significative. 4) La formulation des conclusions a) Revue des données et hypothèses prises en compte Les données utilisées pour déterminer le seuil de signification sont les états financiers de la société CHIMIE des trois dernières années, tels qu’ils ont été certifiés par le précédent commissaire aux comptes. b) Résoudre effectivement le problème Conformément à la politique du cabinet, l’équipe d’audit s’est réunie afin de discuter des points évoqués dans le plan de mission. Le seuil de signification retenu, qui servira pour la détermination des comptes significatifs et l’étendue des tests substantifs, s’élève à 174 kilos dinars. Il correspond au seuil le plus bas et qui ne varie pas de façon significative d’une année à l’autre. La détermination du seuil de signification permet de déterminer l’erreur tolérable. Selon le manuel d’audit du cabinet, l’erreur tolérable est comprise entre 50% et 75% du seuil de signification. Puisque le risque d’audit est élevé, l’erreur tolérable sera calculée sur la base du taux le plus bas, soit 50% du seuil de signification. Le montant de l’erreur tolérable s’élève donc à 87 kilos dinars. Ainsi, les comptes qui présentent un solde supérieur à 87 kilos dinars sont considérés comme significatifs. Par contre, ceux qui présentent un solde inférieur au montant de l’erreur tolérable ne feront pas l’objet d’un examen détaillé. c) Faire valoir son point de vue Ce choix est expliqué par les faits suivants : - Le secteur d’activité de la société CHIMIE est fortement concurrentiel et influencé par l’innovation technologique. Elle présente un risque d’audit élevé; - Le niveau du seuil de signification est inversement proportionnel au risque d’audit. Ainsi, le taux de référence du seuil de signification choisi sera la limite inférieure de la fourchette généralement utilisée; - La base de référence du seuil de signification est généralement le résultat de l’exercice. Toutefois, le choix de la base est fonction de la préoccupation des utilisateurs des états financiers. Puisque les résultats des trois dernières années sont instables et oscillent entre perte et profit, ils ne constituent pas une base raisonnable du seuil de signification. Par ailleurs, le seuil basé sur le critère du chiffre d’affaires est assez élevé et varie de façon significative d’une année à l’autre. Il en est de même pour celui calculé sur la base de l’actif total. Par contre, le seuil de signification basé sur le critère des capitaux propres ne varie pas de manière significative d’une année à l’autre, n’est pas assez élevé par rapport à l’estimation du risque d’audit, et correspond aux attentes des utilisateurs des états financiers. L’équipe d’audit, chargée du dossier, après analyse de la démarche suivie, des choix effectués, a été convaincue de retenir :
Sous section 2 : Audit des estimations comptables de la direction§1. Règles d’audit des estimations comptables Une estimation comptable désigne « une évaluation approximative du montant d’un élément en l’absence de mesure précise »[127]. Les estimations comprennent notamment les provisions pour clients douteux, les provisions pour dépréciation des stocks pour les ramener à leur valeur de réalisation estimée, l’amortissement des immobilisations sur leur durée d’utilisation estimée, les produits constatés d’avance, les pertes sur des contrats à long terme, les provisions pour risque pour un procès en cours et les provisions pour garantie. Comme les estimations comptables dépendent généralement de jugements sur les conséquences d’évènements futurs et ne sont normalement pas soumises à des contrôles spécifiques, elles sont davantage susceptibles de contenir des erreurs importantes pour l’audit que les données répétitives. - examen et test de la procédure suivie par la direction; - utilisation d’une estimation indépendante; - et, revue des évènements postérieurs à la clôture. 1) Examen et test de la procédure suivie par la direction Cette première étape comprend généralement les phases suivantes: - évaluation des données et des hypothèses sur lesquelles se base l’estimation; - comparaison des estimations précédentes avec les résultats réels; - examen des procédures d’approbation de la direction. a) Evaluation des données et des hypothèses L’auditeur évaluera si les données sur lesquelles l’estimation s’appuie sont exactes, complètes et pertinentes. Cette évaluation peut conduire l’auditeur à tester directement les données utilisées ou elle peut être fondée sur l’évaluation des contrôles sur les traitements des données répétitives ou des données non répétitives si cette évaluation couvre les données en question. Si les contrôles sur les données utilisées ont été évalués comme non efficaces, l’auditeur doit tenir compte de l’effet de ces faiblesses sur les estimations comptables. Ensuite, l’auditeur déterminera si les principales hypothèses utilisées par la direction pour l’estimation s’appuient sur une base valable. Il analysera si les hypothèses de la direction sont fondées et si elles représentent en conséquence des interprétations raisonnables de la situation et des tendances actuelles de l’activité d’une part, et des informations disponibles les plus récentes d’autre part. Pour ce faire, l’auditeur examinera notamment les points suivants : - les choix étaient subjectifs ou justifiés par des informations fiables; - les hypothèses représentent une interprétation raisonnable des données pertinentes; ii) La cohérence des hypothèses L’auditeur analysera la cohérence des hypothèses avec les tendances historiques et avec les hypothèses retenues au cours des années précédentes. Pour ce faire, il vérifiera si les changements d’hypothèses sont justifiés ou imposés par des changements de faits ou de situations et si les hypothèses sont cohérentes entre elles, ainsi qu’avec les plans de la direction et les autres informations obtenues au cours de l’audit. c) Comparaison des estimations précédentes avec les résultats réels L’auditeur comparera les estimations comptables effectuées pour les périodes précédentes avec les résultats réels afin de réunir des éléments probants sur la fiabilité des procédures d’estimation de la direction, de déterminer s’il faut rectifier les données de base, et de déterminer si les différences entre les résultats réels et les estimations précédentes ont été quantifiées et si les ajustements nécessaires ont été effectués. d) Examen des procédures d’approbation de la direction 2) Utilisation d’une estimation indépendante 3) Revue des estimations postérieures à la clôture - La description du problème posé ; - La collecte de la documentation ; - L’identification des solutions possibles; - L’évaluation des solutions; et, - La formulation des conclusions. 1) La description du problème posé Les garanties données par la société CHIMIE pour ses clients couvrent tous les produits fabriqués par la société. Elles s’étalent sur une période d’une année à partir de la date de réalisation de la vente. Les frais de garantie sont supportés par la société sans aucune contrepartie. Les questions qui se posent sont alors les suivantes : - Faut-il comptabiliser une provision pour garanties? - Quelle base doit-on retenir pour estimer la provision pour garanties? - Quel est le montant de la provision pour garanties? Les garanties données aux clients couvrent tous les produits fabriqués par la société. Les retours effectués par les clients sont expliqués par le fait que les produits sont, soit périmés, soit qu’ils ne sont pas conformes à la législation environnementale ou aux commandes. Le responsable commercial de la société a préparé des statistiques commerciales qui indiquent que les retours des produits effectués pendant la période de garantie s’élève à 5,3% des ventes de l’année dont 0,3% sont retournés et couverts par la garantie au cours du même exercice. Ces retours se détaillent comme suit :
Les statistiques fournies par le service technique montrent que les pourcentages des pertes subies, dans le cadre de la garantie des produits vendus, se détaillent comme suit :
b) Investigations complémentaires Les investigations complémentaires ont consisté à faire des entretiens avec le comptable de la société. Ce dernier a affirmé que, conformément aux dispositions de l’article 12 du code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés, les provisions pour garanties ne sont pas déductibles. La comptabilisation d’une telle provision n’aura aucun effet sur le résultat fiscal et donc sur la charge de l’impôt sur les sociétés. La position du comptable de la société, qui consiste à ne pas comptabiliser les provisions pour garanties, est motivée par le fait que la politique comptable de la société CHIMIE en matière des provisions est conforme à la réglementation fiscale en vigueur. D’ailleurs, cette position du comptable est confirmée par le gérant CHIMIE fils. 2) La collecte de la documentation L’audit des provisions pour garanties se fait dans le cadre des normes internationales d’audit et plus particulièrement la norme ISA 540, relative à l’audit des estimations comptables et de la norme comptable tunisienne NC 14, relative aux éventualités et événements postérieurs à la date de clôture. 3) L’identification des solutions possibles Lors de l’évaluation d’une estimation de la direction, il n’y pas de bonnes ou de mauvaises réponses tranchées mais plutôt une fourchette de réponses jugée raisonnable. Conformément aux dispositions de la norme comptable tunisienne NC 14, relative aux éventualités et aux évènements postérieurs à la clôture, lorsque la perte est probable et que son montant peut être estimé de façon fiable, la provision doit être comptabilisée. L’estimation des provisions pour garanties, sur la base des statistiques commerciales concernant les retours des clients, se présente comme suit :
Le montant de la provision pour garanties s’élève à 2.419 kilos dinars. Conformément aux dispositions de la norme ISA 540, relative à l’audit des estimations comptables, l’auditeur comparera les estimations comptables effectuées pour les périodes précédentes avec les résultats réels afin de déterminer s’il faut rectifier les données de base et si les ajustements correspondant aux différences dégagées ont été effectués. Les évènements postérieurs à la date de clôture sont pris en compte jusqu’à la date du 28 février de l’année n+1, date d’arrêté des comptes de la société. L’information disponible concernant les retours effectués par les clients concerne les deux premiers mois de l’année n+1. Ces retours sont relatifs aux ventes effectuées au cours des deux premiers mois de l’année n. Le pourcentage des retours, pour une période mobile jusqu’au 28 février n+1, relatifs à la période du 1er janvier n au 28 février n, est de 5,9% des ventes des deux premiers mois de l’année n dont 0,3% des ventes ont été retournés et couverts par la garantie au cours du même exercice. Les pourcentages de pertes subies, suite à ces retours, se détaillent comme suit :
Le chiffre d’affaires des deux premiers mois de l’année n s’élève à 10.608 kilos dinars. Les pertes réellement subies au cours des deux premiers mois de l’année n s’élèvent à 431 kilos dinars. Elles se détaillent comme suit :
Les pertes probables, au cours des deux premiers mois de l’année n, suite aux retours effectués par les clients de la société CHIMIE et calculées sur la base des statistiques commerciales s’élèvent à 403 kilos dinars. Elles se détaillent comme suit :
La variation entre les pertes probables basées sur les statistiques commerciales et les pertes réellement subies est de 6,95% soit 28 kilos dinars. Cette variation est significative. Selon les statistiques commerciales, les retours concernant les ventes des dix mois restant de l’exercice n et qui ont été réalisés l’année même s’élève à 0,3%. Pour les dix mois de l’année n, l’estimation de la provision pour garanties données aux clients, calculée sur la base des statistiques commerciales, se présente ainsi :
L’estimation de cette provision sur la base des pertes subies au cours de l’année n+1 et relatives aux garanties de l’année n est récapitulée dans le tableau suivant :
L’écart entre la provision pour garanties calculée sur la base des données commerciales actualisées de n+1 et celle calculée sur la base des données commerciales historiques est de 140 kilos dinars soit 6,95%. Cet écart est significatif. L’estimation de la provision pour garanties données aux clients doit être effectuée en tenant compte du fait que la société a contracté ou non un contrat d’assurance contre les risques de pertes découlant de la garantie. Pour ce faire, l’examen des assurances contractées a révélé que la société n’a pas contracté un contrat de couverture contre les risques de garanties. a) Prise en compte de l’attente des utilisateurs financiers Les utilisateurs des états financiers sont en principe intéressés par le niveau des résultats. Toutefois, puisque les résultats sont instables, ils sont préoccupés par le niveau des capitaux propres. Ils insistent sur le respect de la réglementation comptable et fiscale. b) Primauté du fond sur la forme L’objectif principal de l’audit des états financiers est de s’assurer de la régularité, de la sincérité et de la représentation fidèle des états financiers. Cet objectif fait que les dispositions fiscales ne sont pas les seules à prendre en considération. 5) La formulation des conclusions a) Revue des données et hypothèses prises en compte Les données utilisées sont les données comptables qui sont conformes avec celles fournies par le service commercial. Quant aux hypothèses retenues, elles ont été fournies par le service technique. Ces hypothèses concernent les pourcentages de retours et les pourcentages de pertes subies par la société. Elles ont été confrontées avec les retours et les pertes subies au cours des deux premiers mois de l’année n+1 afin de dégager les ajustements nécessaires. L’écart dégagé entre les pertes subies au cours des deux premiers mois de l’année n+1 avec les statistiques commerciales est de l’ordre de 6,94%. Cet écart est significatif. La projection de la provision pour garanties au titre des dix mois restant de l’année n doit tenir compte du niveau des pertes subies au cours de l’année n+1. b) Résoudre effectivement le problème Compte tenu du risque que court la société suite aux garanties accordées à ses clients lors de la vente de ses produits, elle doit comptabiliser une provision pour garanties. L’estimation du montant de la provision pour garanties peut être faite sur la base des pertes réellement subies jusqu’au 28 février n+1, concernant les ventes des deux premiers mois de l’année n, et sur la base des statistiques techniques pour les mois restant de l’année n. Le montant correspondant à cette base, s’élève à 2.447 kilos dinars. Par contre, la projection des pertes probables, sur la base de celles subies jusqu’au 28 février n+1, fournit un montant de provision de 2.587 kilos dinars. La variation entre les deux estimations est de 140 kilos dinars soit 5,73% du montant des pertes probables au titre des garanties données aux clients. Cette variation est significative. Il convient donc de comptabiliser une provision pour garanties à hauteur de 2.587 kilos dinars. Puisqu’on peut estimer que les conditions de prise en compte d’actif fiscal différé sont réunies, et conformément aux dispositions de la norme comptable IAS 12, la provision pour garanties donne lieu à un actif fiscal différé de 905 kilos dinars. Par ailleurs, le montant des provisions pour garanties au titre des ventes de l’exercice n-1 et qui aurait du être comptabilisé au cours de l’exercice n est significatif. Il s’élève à 1.521 kilos dinars. Aussi, un actif d’impôt différé doit-il être comptabilisé d’un montant de 532 kilos dinars puisqu’on peut estimer que les conditions de prise en compte d’actif fiscal différé sont réunies. Il s’agit d’une erreur fondamentale qui doit être traitée comme telle conformément aux dispositions de la norme comptable 11 du système comptable tunisien des entreprises et de la norme 8 de l’IASB. Par conséquent, le montant de la provision doit être présenté en ajustant les soldes d’ouverture des résultats reportés. Par ailleurs, les données comparatives doivent être retraitées. Les notes aux états financiers doivent indiquer les éléments suivants : - La nature de l’erreur fondamentale ; - Le montant de la correction au titre de l’exercice et de l’exercice antérieur présenté ; - Et, le fait que l’information comparative a été retraitée ou non. c) Faire valoir son point de vue Au cours de la réunion avec l’équipe d’audit, le problème de comptabilisation et d’estimation du montant de la provision a été évoqué. La solution proposée a été expliquée par les points suivants :
L’équipe d’audit, chargée du dossier, après analyse de la démarche suivie et des choix effectués, a été convaincu de :
Sous section 3 : Appréciation du comportement a posterioriLes études des cas illustrant le processus du jugement professionnel montrent que nous avons respecté les cinq étapes d’un processus de prise de décision à savoir : - La description du problème posé; - La collecte de la documentation; - La détermination des solutions possibles; - L’évaluation des diverses solutions; et, - La formulation des conclusions. Ces étapes ne sont pas nécessairement suivies à la lettre ni documentées en détail, toutefois, elles n’en sont pas moins présentes. La prise de décision que ce soit en matière de détermination du seuil de signification pour la programmation des tests substantifs ou d’estimations de provisions pour garanties a montré qu’elle comporte des jugements intermédiaires. Quant aux facteurs déterminants d’un bon jugement, à savoir la détermination d’une solution avec exactitude ou à défaut la recherche d’un consensus, et l’aptitude de l’expert-comptable à démontrer sa logique et sa diligence, les études de cas montrent qu’en matière de : - Seuil de signification, l’auditeur a obtenu un consensus avec l’équipe d’audit, chargée du dossier, concernant le taux et la base de référence du seuil de signification. Pour ce faire, il a démontré la logique du jugement effectué et documenté les diligences mises en œuvre ; - Provisions pour garanties, l’auditeur a démontré l’obligation de la constatation de la provision, en application des principes comptables, et déterminé son montant avec exactitude. La provision pour garanties jugée acceptable est égale à 2.587 kilos dinars. Par ailleurs, un actif d’impôt différé doit être comptabilisé à hauteur de 905 kilos dinars puisque l’équipe a jugé que cet actif est recouvrable ; Aussi, le respect de la démarche du processus du jugement professionnel donne-t-il le sentiment d’une assurance raisonnable qu’il s’agit d’un bon jugement. Chapitre 2 : illustrations du processus de prise de décision dans les missions de présentation des états financiersCe chapitre examine la part accordée au jugement professionnel dans les référentiels comptables, d’une part, et illustre le processus du jugement professionnel dans les missions de présentation des états financiers, d’autre part. Section 1 : La part accordée au jugement professionnel dans les référentiels comptablesL’analyse concerne aussi bien les normes comptables tunisiennes, autres que les normes sectorielles, que les normes comptables internationales de l’IASB. Elle consiste à recenser, manuellement, le nombre d’occurrences où le jugement est exigé dans le libellé de la norme et la fréquence à laquelle les utilisateurs des normes comptables ont à poser des jugements, soit du fait du vocabulaire de la norme, soit du sens des phrases employées. Sous section 1 : Les normes comptables tunisiennesL’analyse des normes comptables tunisiennes, autres que les normes sectorielles, a permis de relever le nombre d’occurrences où le jugement est exigé dans le libellé des normes comptables. Cette analyse consiste à la recherche des termes suivants « juger », « jugement » et « jugement professionnel ». Les résultats de cette analyse figurent dans l’annexe 3. Le nombre d’occurrences est de vingt. Parmi les situations où il est exigé expressément le recours au jugement professionnel dans le libellé de la norme, on trouve par exemple : - Dans le cadre conceptuel, l’évaluation de l’équilibre avantages-coûts et l’arbitrage entre les caractéristiques qualitatives font appel au jugement professionnel. Par ailleurs, la convention de l’importance relative est une notion qui nécessite l’exercice du jugement professionnel; - Selon la norme comptable générale (NC 1), la présentation de l’état de résultat selon la méthode de référence nécessite un effort considérable de jugement de la part du professionnel; - La norme relative aux immobilisations corporelles (NC 5), le choix des modes d’amortissement et l’appréciation de la durée d’utilisation d’une immobilisation nécessitent le recours au jugement professionnel; - Selon la norme relative aux éventualités et aux évènements postérieurs à la date de clôture (NC 14), les estimations des provisions pour éventualités nécessitent un effort de jugement de la part du professionnel. Par ailleurs, le nombre de référence au jugement dans les normes comptables tunisiennes s’élève à cent quarante deux fois. L’analyse du nombre de référence au jugement professionnel figure dans l’annexe 4. Elle reflète la fréquence à laquelle ceux qui appliquent les normes comptables tunisiennes ont à poser des jugements. Cette référence au jugement découle, soit du vocabulaire de la norme, soit du sens des phrases utilisées dans la norme. La moyenne de ces occurrences est de huit. Parmi les situations où il est fait référence au jugement professionnel, on peut citer : - Dans la norme générale (NC 1), la définition des éléments d’actifs, de passifs, la présentation de l’état de résultat selon la méthode de référence et la structure des notes aux états financiers. Aussi, la présentation au niveau de l’état de résultat selon le modèle autorisé de la production immobilisée dans les produits d’exploitation fait appel au jugement. En effet, cette présentation est contradictoire avec la définition avancée au paragraphe relatif au fonctionnement général des comptes; - Dans la norme des stocks (NC 4), l’identification des charges incorporables et leur affectation dans le coût de production des stocks; - Dans la norme relative aux contrats de construction (NC 9), la détermination des coûts relatifs à un contrat de construction. En effet, elle prévoit que les coûts d’assurance, de conception et d’assistance technique et les frais généraux de production sont affectés moyennant des méthodes systématiques et rationnelles. Outre les situations qui nécessitent le recours au jugement professionnel, certaines contradictions existantes dans le système comptable obligent le professionnel ou l’utilisateur des normes comptables tunisiennes à recourir au jugement. Sous section 2 : Les normes comptables internationales de l’IASBL’analyse des normes comptables internationales de l’IASB est regroupée en deux rubriques. En premier lieu, l’analyse du nombre d’occurrences du terme « jugement » dans les normes comptables internationales. Elle figure dans l’annexe 5. En second lieu, l’analyse couvre le nombre de référence au jugement professionnel et figure dans l’annexe 6. Le nombre des termes « juger », « jugement » et « jugement professionnel » dans les normes comptables internationales de l’IASB au 31 décembre 1999, s’élève à quarante neuf dont six dans le cadre de la préparation et de présentation des états financiers permettant de jeter les bases du processus normatif. On remarque également que la norme relative à la présentation des états financiers reprend à six reprises l’occurrence « jugement » mettant ainsi en relief la corrélation entre la complexité d’un problème et l’importance du jugement. La seconde analyse effectuée consiste à relever le nombre d’occurrence où la norme, du fait du vocabulaire et du sens des phrases employées, faisait référence à un jugement. Le nombre d’occurrence relevé dans les normes comptables internationales est de quatre cent quatre vingt trois. Parmi les situations qui font appel au jugement professionnel, on trouve : - Dans le cadre conceptuel de la comptabilité, la définition de l’importance relative et la définition des éléments des états financiers; - Dans la norme IAS 1, relative à la présentation des états financiers, l’appréciation de la continuité d’exploitation, le regroupement des éléments jugés non significatifs, le choix de la direction dans la distinction entre les éléments non courants et les éléments courants du bilan, etc. - Dans la norme IAS 37, relative aux provisions, passifs éventuels et actifs éventuels, la définition des provisions ou encore leur évaluation. Ainsi, la norme stipule que « le montant comptabilisé en provisions doit être la meilleure estimation de la dépense nécessaire à l’extinction de l’obligation actuelle à la date de clôture ». Ce nombre est fortement élevé par rapport au nombre relevé dans les normes comptables tunisiennes. La comparaison entre les normes comptables tunisiennes et les normes comptables internationales de l’IASB et les interprétations des normes comptables internationales est difficile du fait que les thèmes ne sont pas abordés de la même façon et qu’il n’existe pas de norme nationale pour certains thèmes, tels que les instruments financiers, la consolidation, etc. L’ensemble des ces observations a permis de mettre en évidence l’importance accordée au jugement professionnel par les normes comptables nationales ou internationales, que ce soit dans le libellé même des normes ou dans la manière dont elles sont rédigées. Section 2 : Etudes de cas de jugement professionnel dans les missions de présentation des états financiersCette étude de cas porte sur les notes aux états financiers et vise à illustrer le processus du jugement professionnel en matière de notes aux états financiers. Sous section 1 : Les notes aux états financiers§1. Les caractéristiques des notes aux états financiers de qualité Les notes aux états financiers permettent d’expliquer et de compléter les composantes des états financiers en vue d’atteindre une représentation fidèle. « La qualité des notes aux états financiers tient beaucoup plus à leur intelligibilité et à la pertinence des informations qu’elles ajoutent qu’à leur volume »[128]. Les caractéristiques des notes aux états financiers sont les suivantes : a) Les notes aux états financiers doivent être claires et concises Afin d’atteindre les objectifs assignés aux notes aux états financiers, elles doivent être claires, concises et exemptes de toute ambiguïté. L’utilisation conjointe de tableaux et de commentaires aide à clarifier les données figurant dans les états financiers. Aussi, « le volume des notes aux états financiers doit être raisonnable pour que son exploitation soit aisée par l’utilisateur »[129]. b) Les notes aux états financiers doivent être intelligibles Les notes aux états financiers sont conçues pour faciliter la compréhension des états financiers qu’elles accompagnent. Les états financiers étant destinés à un très large public, l’information doit être compréhensible par des non professionnels et ne pas être réservée à des spécialistes. c) Les notes aux états financiers doivent fournir toutes les informations significatives L’élaboration des notes aux états financiers conduit à rechercher les informations qui ont une importance significative, soit pour expliquer, soit pour compléter les éléments donnés dans les états financiers. Toutefois, la primauté du caractère significatif dans la sélection des informations à fournir ne doit pas conduire à l’effet inverse, c’est-à-dire, à une réduction trop importante des informations, qui serait-elle aussi, préjudiciable à l’intelligibilité des états financiers. L’application d’un tel principe a évidemment des conséquences sur les notes aux états financiers. Ainsi : - Le référentiel des principes et méthodes comptables utilisés par l’entreprise doit être mentionné dans une note aux états financiers; - Les informations sur les principes et méthodes comptables utilisés doivent être fournies; - Seules sont à fournir les informations significatives dont la présentation est prévue par les normes comptables ou est nécessaire à l’image fidèle. Pour les informations qui sont a priori significatives, il est nécessaire de mentionner l’absence de l’élément concerné, car une mention de type « aucun changement de méthodes comptables n’est intervenu durant l’exercice » sera préférable à l’absence totale d’information sur le sujet. D’ailleurs, la note relative au respect des principes comptables généralement admis doit préciser notamment « le référentiel comptable utilisé, les dérogations, les changements éventuels de méthodes, et les principes comptables particuliers pertinents »[130]. §2. L’influence de l’importance relative sur les notes aux états financiers La prééminence dans les notes aux états financiers du principe d’importance significative comme critère absolu de détermination de l’information à fournir se traduit, dans les faits, par une influence marquée de ce principe sur la structure et le contenu des notes aux états financiers, ce qui n’est pas sans conséquence pour les utilisateurs des états financiers. a) L’influence de l’importance relative sur la structure des notes aux états financiers La structure des notes aux états financiers n’a pas été explicitement définie par le système comptable tunisien. Toutefois, la norme comptable générale dispose que « les notes aux états financiers sont, en règle générale, présentées dans l’ordre suivant … » et qu’une « structure systématique doit être retenue, autant que possible, pour la présentation des notes ». Les notes aux états financiers ne constituent donc pas un document formalisé. Les notes aux états financiers constituent un document ouvert qui doit s’adapter à chaque cas particulier et à chaque spécificité de l’entreprise. C’est pourquoi, le normalisateur a laissé volontairement une entière liberté dans les choix de présentation des notes aux états financiers car il appartient à l’entreprise, compte tenu de ses spécificités, de trouver un ordre de classement et un enchaînement logique qui conviennent au souci de la bonne information. Cette liberté de choix, quant à la structure des notes aux états financiers, implique un degré élevé d’exercice du jugement professionnel. Néanmoins, le système comptable prévoit des informations obligatoires qui doivent figurer dans tous les cas dans les notes aux états financiers. La structure des notes aux états financiers est donc fortement influencée par le principe de l’importance relative dans la mesure où doivent être portés en début des notes aux états financiers les éléments d’information essentiels parce qu’ils sont les plus susceptibles d’améliorer l’intelligibilité et la pertinence des états financiers. Cette référence au principe d’importance relative permet d’opérer l’ordonnancement des informations en distinguant les informations toujours significatives, de celles susceptibles d’être significatives : - Les informations généralement significatives : Ce sont des informations généralement nécessaires au lecteur des états financiers, quelle que soit l’entreprise et quel que soit le lecteur. Il s’agit notamment des principes généraux (prudence, permanence des méthodes, etc.) et des méthodes d’évaluation retenues. - Les informations susceptibles d’être significatives : Ce sont les informations qui n’entrent pas dans la catégorie précédente. Il s’agit notamment des éléments énumérés par les normes comptables tunisiennes ou toute autre information qui répond par avance à une question susceptible de se poser à la lecture des états financiers. b) L’influence de l’importance relative sur le contenu des notes aux états financiers La norme comptable générale exige, pour la présentation des notes aux états financiers, qu’une structure systématique soit retenue. Les notes aux états financiers sont présentées généralement comme suit : - Date d’élaboration des états financiers ; - Déclaration sur la responsabilité des états financiers ; - Note confirmant le respect des normes comptables tunisiennes ; - Note sur les bases de mesure et les principes comptables pertinents appliqués ; - Informations afférentes à des éléments figurant dans le corps des états financiers ; - Note sur les engagements, les passifs éventuels et les actifs éventuels ; et, - Autres informations à caractère financier et non financier. Le principe d’importance relative joue également un rôle non négligeable car il permet de solutionner les problèmes relatifs à la sélection des informations à fournir. i) Date d’élaboration des états financiers ii) Déclaration sur la responsabilité des états financiers iii) Les faits marquants Seuls les faits marquants de l’exercice significatifs et qui sont nécessaires à une bonne perception de la situation de l’entreprise sont à mentionner. iv) La place privilégiée du référentiel comptable Non seulement le référentiel comptable utilisé est porté en début des notes aux états financiers, mais il doit être donné dans tous les cas, tant son importance est considérable pour les utilisateurs des états financiers. Il représente en effet, la règle du jeu applicable au cours de l’exercice. Les notes aux états financiers voulant contribuer à l’objectif d’une représentation fidèle devront donc informer les utilisateurs des états financiers sur : - La conformité avec les règles en vigueur; - Les règles et méthodes appliquées pour l’établissement des états financiers; - Les changements de méthodes comptables éventuellement survenus. - La conformité avec les règles en vigueur Les principes comptables généralement admis qui régissent l’établissement des états financiers n’ont pas à être énumérés de façon systématique. Une formulation du type « les états financiers sont établis conformément aux principes comptables généralement admis »[131] est généralement utilisée pour englober les références à la loi comptable, le cadre conceptuel et les normes comptables techniques,… En revanche, les éventuelles dérogations à ces principes devront être explicitement mentionnées. - Les règles et méthodes appliquées pour l’établissement des états financiers : La note relative aux principes comptables adoptés par l’entreprise doit décrire les bases de mesures utilisées pour l’élaboration des états financiers. A ce niveau, de plus amples précisions doivent être fournies et notamment dans les cas où l’entreprise : - développe un choix particulier entre plusieurs méthodes réglementaires; - indique les dérogations par rapport aux méthodes comptables; et, - expose les règles fiscales à l’origine de certains postes comptables. - Les changements de méthodes éventuellement survenus : L’obligation de comparabilité des états financiers dans le temps implique une permanence des méthodes de présentation et d’évaluation des états financiers. Un changement de méthodes comptables ne doit être opéré que lorsqu’il est rendu obligatoire par une nouvelle norme ou que la nouvelle norme conduit à une meilleure présentation des opérations dans les états financiers de l’entreprise. v) Les informations relatives aux éléments figurant dans le corps des états financiers Les notes aux états financiers doivent mentionner également un certain nombre d’informations significatives liées aux postes composant les états financiers. Il s’agit des notes exigées par les normes comptables. Les notes relatives aux postes des états financiers contiennent toutes les autres informations qui peuvent être jugées significatives et qui nécessitent une explication ou un commentaire additionnel. Elles doivent être présentées de telle sorte que chacune d’elles soit rattachée à un poste des états financiers dans l’ordre d’apparition des rubriques. Notons enfin que les informations que doivent donner les notes aux états financiers ne peuvent résulter d’une énumération de points visés par les normes comptables car c’est la réalité d’une entreprise particulière qu’il convient de retracer et c’est en fonction de cette réalité qu’un certain nombre d’informations devront être mentionnées. vi) Note sur les engagements, les passifs éventuels et les actifs éventuels vii) Les autres informations significatives Cette partie comporte essentiellement les notes relatives aux évènements postérieurs à la date de clôture et les autres informations dont la présentation est nécessaire à l’obtention d’une image fidèle. - Les évènements postérieurs à la clôture de l’exercice Il s’agit des évènements survenus entre la date de clôture et la date de publication des états financiers qui, sans être liés à une situation existant à la date de clôture de l’exercice, « entraîneront des modifications importantes de l’actif ou du passif au cours du nouvel exercice, et/ou qui auront ou risquent d’avoir des répercussions importantes sur les activités futures de l’entreprise »[132]. Les informations à fournir relatives à ces évènements doivent comprendre une description de la nature de l’événement et une estimation de son incidence financière, lorsqu’il est possible de la faire ou une déclaration indiquant que cette estimation ne peut être faite. Cette rubrique est réservée aux notes dont la présentation est nécessaire à une image fidèle. Ces notes sont des notes explicatives d’éléments comptables significatifs, dans le contexte propre de l’entreprise, non expressément exigées par des normes comptables, mais qui sont nécessaires à l’intelligibilité et à la présentation fidèle. Ces notes peuvent revêtir des informations à caractère non financier. L’influence de l’importance significative sur le contenu des notes aux états financiers fait de celles-ci un véritable document de synthèse, ce qui favorise l’utilisateur des états financiers, qui trouvera dans ce document l’information essentielle à la prise de décision. Sous section 2 : IllustrationLa société XML est une société cotée en bourse et mère d’un groupe actif dans la plupart des secteurs de l’industrie chimique, des huiles et dérivés, des emballages, de la promotion immobilière et d’autres activités commerciales et agricoles. Lors de l’établissement de ses notes aux états financiers consolidés de l’exercice n, le premier responsable de la société mère charge un expert-comptable de l’établissement de la note relative à l’information sectorielle. Il s’agit de la première année où la société prépare des états financiers consolidés. §1. Description du problème posé Les notes aux états financiers consolidés comprennent, entre autres, une note relative à l’information sectorielle. Toutefois, la société XML est-elle dans l’obligation de publier de telles notes. Aussi, si elle est dans l’obligation de publier de telle note, les questions qui se posent concernent alors : - L’identification du premier et du second niveau d’information sectorielle; - L’identification du secteur d’information sectorielle; - L’identification des opérations entre les secteurs d’information sectorielle. La société est organisée en divisions; chacune est gérée par un gérant. Bien que les trois divisions de l’entreprise soient gérées au niveau international, elles opèrent dans trois zones géographiques principales : - En Tunisie, qui est le pays d’origine, l’entreprise produit et vend une vaste gamme de produits chimiques, d’huiles et dérivés et d’emballages. - L’entreprise produit et vend les mêmes produits en Algérie, au Maroc et en Libye. - Au sein de l’union européenne, l’entreprise exploite des installations de fabrication d’emballages et possède des bureaux de vente en France, en Autriche et en Belgique. §2. La collecte de la documentation L’examen des normes comptables nationales a démontré le défaut de norme comptable tunisienne relative à l’information sectorielle. Les normes comptables internationales constituent une doctrine à laquelle on peut se référer, à défaut de normes tunisiennes. La société XML applique la norme comptable internationale 14, relative à l’information sectorielle. L’IAS 14 dispose qu’elle « s’applique aux entreprises dont les titres de capitaux propres ou d’emprunts sont négociés sur un marché organisé ainsi qu’aux entreprises dont les titres de capitaux propres ou d’emprunt sont en cours d’émission sur un marché public de valeurs mobilières »[133]. Elle stipule que la structure d’organisation et de gestion de l’entreprise ainsi que son système d’information interne constituent la base d’identification des différents taux de rentabilité auxquels l’entreprise est confrontée et par conséquent la base de détermination des premier et second niveaux de l’information sectorielle. §3. L’identification des solutions possibles Les entretiens menés avec le premier responsable indiquent que l’information financière, les tableaux de bord de gestion et les reporting de gestion sont organisés selon les secteurs d’activités suivants : - La fabrication d’huiles et dérivés; - L’industrie chimique; - L’industrie d’emballages industriels; - La promotion immobilière; - Le commerce; - Et, l’agriculture. Par ailleurs, les secteurs géographiques suivis par la direction sont la Tunisie, la Libye, l’Algérie et l’Union européenne. La présentation de l’information sectorielle doit être faite dans le cadre de la norme internationale IAS 14. Selon cette norme et en fonction de l’organisation interne de la société mère, le premier niveau d’information sectorielle est le secteur d’activité et le second niveau est par conséquent le secteur géographique. Les données des secteurs d’activité se présentent comme suit :
Les secteurs d’activité de l’entreprise XML ne sont pas similaires. A priori, tous les secteurs d’activité de la société peuvent être considérés comme étant isolables séparément. Toutefois, selon la norme comptable IAS 14, un secteur d’activité ou géographique est à présenter s’il remplit les 2 conditions suivantes : - la majorité de ces ventes provient des ventes à des clients externes, - si les produits sectoriels sont supérieurs à 10% du total des produits ou le résultat est supérieur à 10% du résultat cumulé de tous les secteurs ou si ces actifs représentent 10% au moins du total des actifs de tous les secteurs. Le secteur des huiles et dérivés opère principalement pour l’industrie chimique. Il constitue une intégration en amont de l’industrie chimique.
L’identification des secteurs isolables selon le critère de 10% proposé par la norme comptable internationale IAS 14 se présente comme suit : Critère du résultat sectoriel Le critère de 10% doit être appliqué en comparaison du montant le plus élevé du total des pertes des secteurs affichant des pertes sectorielles et du total des bénéfices des secteurs affichant des bénéfices sectoriels soit 5,69. Tout secteur affichant, en valeur absolue, un bénéfice ou une perte sectorielle supérieur à 0,569 est donc considéré comme isolable selon ce critère. Critère des produits sectoriels Les produits sectoriels incluent, conformément à la norme IAS 14, les cessions intersectorielles. Un secteur est considéré comme isolable si les produits sectoriels excèdent 4,5 soit 10% du total des produits sectoriels 45 MDT. Critère des actifs sectoriels Un secteur est considéré comme isolable si le total de l’actif sectoriel excède 5,7 MDT soit 10% du total des actifs sectoriels de 57 MDT. Selon l’un de ces critères, les secteurs isolables sont les suivants : - L’industrie des huiles et dérivés ; - L’industrie des produits chimiques ; - L’industrie des emballages industriels ; - La promotion immobilière. L’industrie des huiles et dérivés est destinée exclusivement à l’industrie chimique. Elle constitue une intégration en amont. Les deux secteurs peuvent donc être regroupés. Par ailleurs, l’entreprise a annoncé en septembre n l’acquisition d’une société opérant dans l’industrie de l’emballage industriel et alimentaire. Ce secteur ne répond à aucun des critères énoncés par la norme comptable internationale IAS 14. La question qui se pose alors est de savoir s’il faut présenter ce secteur avec celui de l’industrie d’emballage industriel ou le présenter séparément. L’entretien mené avec le premier responsable, au sujet de cette nouvelle société, laisse penser que ce secteur est un secteur stratégique, puisqu’il constitue un élargissement des champs d’activités du groupe. En effet, cette société fabrique et vend, outre les emballages industriels, identiques à ceux fabriqués par le groupe, des emballages alimentaires. Ces derniers présentent un marché en croissance et présentent une performance différente de l’emballage industriel. La technologie utilisée dans la production des emballages alimentaires est différente de celle utilisée dans la fabrication des emballages industriels. Les ventes des emballages alimentaires représentent 50% du chiffre d’affaires de la société nouvellement acquise et ne représentent que 0,5% du chiffre d’affaires consolidé. Par contre, 25% des ventes d’emballages industriels étaient effectuées au profit de la société d’emballages industriels du groupe. Cette dernière effectue des travaux d’impression et les commercialisent. Au vu des ces données, le premier responsable du groupe nous a affirmé que le secteur de l’industrie alimentaire sera pris en considération dans l’élaboration des reporting de gestion du groupe. Les données du secteur de l’industrie d’emballages alimentaires se présentent comme suit :
L’analyse des états financiers de la société d’emballages, nouvellement acquise par le groupe, a confirmé les données fournies par le directeur. Par ailleurs, les types de clients, auxquels sont destinés les emballages alimentaires, sont différents de ceux des emballages industriels. §4. L’évaluation des solutions Les données contenues dans les reporting de gestion et l’analyse des critères quantitatifs montrent que les secteurs d’activité qui peuvent être présentés séparément sont les suivants : - L’industrie des produits chimiques, ; - L’industrie des emballages industriels ; - Et, la promotion immobilière. L’entretien mené avec la direction de la société fait ressortir que le secteur d’emballages alimentaires peut être considérée comme un secteur indépendant vue que la technologie est différente, qu’elle présente des critères de performance différents de ceux valables pour l’industrie d’emballages industriels, que les types de clients sont différents du secteur d’emballages industriels, et que les reporting de gestion tiendront compte de ce nouveau secteur. Les ventes de ce secteur par rapport au total des ventes n’excèdent pas 10%. Ce critère n’est pas satisfait pour les résultats ni pour les actifs sectoriels. §5. La formulation des conclusions a) Revue des données et hypothèses prises en compte Les secteurs à présenter sont ceux qui remplissent les critères relatifs à la direction et les critères quantitatifs prévus par la norme comptable internationale 14, relative à l’information sectorielle. Toutefois, bien que l’industrie d’emballages alimentaires présente des taux inférieurs à ceux prévus par la norme, la direction la considère comme étant un secteur significatif en raison de sa taille et du type des clients, etc. b) Résoudre effectivement le problème Compte tenu des critères fixés par la norme comptable internationale 14, relative à l’information sectorielle, et des attentes de la direction de la société, les secteurs à présenter dans la note relative à l’information sectorielle sont les suivants : - L’industrie des produits chimiques ; - L’industrie des emballages industriels ; - La promotion immobilière; - Et, l’industrie d’emballages alimentaires. La note aux états financiers consolidés, relative à l’information sectorielle, est la suivante :
c) Faire valoir son point de vue Au cours de la réunion de validation des notes aux états financiers consolidés, on s’est interrogé sur la validité du fait que l’industrie des huiles et dérivés soit regroupée avec l’industrie chimique. Selon ce point de vue, les deux secteurs sont distincts puisque les technologies utilisées sont différentes. Le regroupement de ces deux secteurs s’appuie sur la définition donnée par le paragraphe 9 de la norme comptable internationale 14, relative à l’information sectorielle. En outre, l’IAS 14 stipule que « si le système d’information interne d’une entreprise considère les activités intégrées verticalement comme des secteurs distincts et si l’entreprise ne choisit pas de les présenter comme des secteurs d’activité dans son information externe, le secteur vendeur doit être regroupé avec le secteur acheteur dans l’identification des secteurs d’activités faisant l’objet d’une information financière externe sauf s’il n’y a pas de base raisonnable pour le faire, auquel cas le secteur vendeur sera pris en compte comme un élément de rapprochement non affecté »[134]. Les notes aux états financiers doivent être établies dans le cadre des normes comptables nationales et internationales. Le premier responsable a été convaincu des arguments qui lui ont été avancées. Après confrontation de vues, le consensus s’est établi sur : - L’identification faite, quant aux secteurs à présenter, à savoir l’industrie chimique, l’industrie des emballages industriels, l’industrie d’emballages alimentaires et la promotion immobilière. - La présentation des activités commerciales et agricoles en éléments de rapprochement non affectés. Sous section 3 : Appréciation du comportement a posterioriLa présentation de la note aux états financiers consolidés de la société XML, relative à la l’information sectorielle, est faite dans le respect des étapes du processus du jugement professionnel. Certes, ces étapes sont omniprésentes, mais la séparation physique entre elles n’est pas toujours évidente. Aussi, au cours des investigations faites, est-il nécessaire de répéter certaines étapes, surtout lorsqu’il y a contestation, désaccord ou la connaissance d’éléments nouveaux. Si la situation est particulièrement problématique, il faudra probablement revenir en arrière et reprendre une ou plusieurs étapes. Tel est le cas de la société d’industrie d’emballages alimentaires acquise au cours de l’exercice n. Quant aux facteurs déterminants d’un bon jugement, à savoir la détermination d’une solution pertinente ou à défaut la recherche d’un consensus, et l’aptitude de l’expert-comptable à démontrer sa logique et sa diligence, l’étude de cas montre qu’en matière de préparation et présentation des notes aux états financiers, l’exercice du jugement professionnel peut ne pas susciter de consensus. Le regroupement des secteurs d’industrie chimique et des huiles et dérivés est déterminé conformément aux dispositions de la norme comptable 14 de l’IASB. Par contre, la présentation du secteur de l’industrie d’emballage alimentaire relève du jugement de la direction. En effet, bien qu’il ne remplisse pas les critères quantitatifs prévus par la norme comptable internationale 14, la direction a choisi de le présenter séparément. Ses arguments reposent sur le fait que, les technologies utilisées, les types de clients et les indicateurs de performance sont différents de ceux des emballages industriels. L’obtention du consensus avec la direction de la société donne un sentiment qu’il s’agit d’un bon jugement. Bien qu’un consensus soit réalisé entre l’expert-comptable et la direction de la société, les jugements émis dans le cadre des missions de présentation des états financiers ont la particularité par rapport à ceux émis dans le cadre des missions d’audit des états financiers d’être révisés par l’auditeur ou le commissaire aux comptes de la société. Selon DION, « un bon jugement s’acquiert grâce aux réactions provoquées par nos décisions »[135]. Ainsi, lorsqu’on obtient des réactions directes, quant aux jugements effectués dans le cadre des missions de présentation des états financiers, il est essentiel de les analyser d’une manière approfondie afin d’améliorer la qualité des jugements futurs. Chapitre 3 : Propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la professionPartant de l’idée que cette recherche devrait déboucher sur des propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession, nous avons arrêté notre méthodologie de recueil des données, qui a été réalisée à travers un questionnaire dans lequel nous avons combiné des questions fermées et d’autres ouvertes. Section 1 : Présentation de l’enquêteSous section 1 : Objet de l’enquêteCette enquête a pour but de connaître les appréciations des experts-comptables, des universitaires et des membres de direction des sociétés en matière du jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers et leurs propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement professionnel. Sous section 2 : MéthodologieL’enquête a été menée à l’aide d’un questionnaire. Nous avons d’abord communiqué avec des experts-comptables, membres de l’OECT, des enseignants universitaires et des membres de direction, pour leur demander s’ils acceptent de participer au questionnaire. Les personnes qui ont répondu positivement à notre requête, ont reçu un questionnaire qui a été, soit déposé dans les cabinets, dans les sociétés ou dans les universités, soit envoyé par e-mail, par fax ou par poste. Nous avons opté pour deux types de questionnaires ; l’un réservé aux universitaires et aux membres de direction et l’autre aux experts-comptables. Le questionnaire, réservé aux universitaires et aux membres de direction, tel qu’il figure dans l’annexe 7, comporte 11 questions regroupées en trois sections. Il est structuré de la manière suivante : La première section du questionnaire a trait au rôle de l’université : la formation universitaire prépare-t-elle les futurs professionnels à l’exercice du jugement professionnel ? Existe-t-il un programme du système de formation des étudiants afin de savoir s’ils ont un niveau satisfaisant de compétence qui leur permet d’exercer leur jugement professionnel au niveau professionnel requis ? Les recommandations relatives à la formation universitaire afin que les futurs professionnels soient apte à l’exercice de jugement au niveau professionnel requis. La seconde section du questionnaire traite du rôle des instances professionnelles. Elle porte essentiellement sur l’existence ou non d’actions de formation visant à informer les professionnels et les stagiaires que l’exercice du jugement professionnel nécessite des qualités personnelles et professionnelles. Par ailleurs, elle traite l’existence ou non d’un système d’évaluation de la formation professionnelle continue pour savoir si les experts-comptables ont un niveau satisfaisant de compétence pour exercer leur jugement professionnel au niveau professionnel requis. La troisième section traite du rôle des professionnels : les questions portent sur le professionnalisme des experts-comptables, le respect des règles d’éthique, le maintien de leurs compétences professionnelles, etc. Le questionnaire réservé aux experts-comptables, tel qu’il figure dans l’annexe 8, comporte, outre les questions figurant dans le questionnaire réservé aux universitaires et aux membres de direction, les questions suivantes : - Des informations générales sur les cabinets : date de constitution du cabinet, nombre d’employés, la qualification des employés et la répartition en pourcentage des services présentés par le cabinet ; - Au niveau du rôle des professionnels : le budget de la documentation dans le cabinet par rapport au chiffre d’affaires hors taxes, le coût de la formation par rapport au chiffre d’affaires hors taxes, le cabinet dispose t-il d’un manuel de travail pour les missions récurrentes ? Le cabinet dispose t-il d’un système de contrôle qualité ? Existe t-il une revue indépendante des dossiers relatifs aux missions liées aux états financiers ? Utilisez-vous des systèmes d’aides à la décision ? Sous section 3 : Le champ de l’enquête et caractéristiques de l’échantillonNotre démarche a consisté à retenir comme échantillon les experts-comptables inscrits au tableau de l’OECT (313 membres), 100 universitaires et 100 membres de direction d’entreprises de tailles différentes. Malgré leurs accords préalables à la participation à notre enquête, certaines personnes n’ont pas donné suite à notre questionnaire malgré les relances effectuées. Le nombre total de réponses s’élève à 228. Le nombre des universitaires ayant répondu au questionnaire s’élève à 61. Le nombre des membres de direction qui ont répondu au questionnaire s’élève à 60. Enfin, le nombre de réponses des experts-comptables s’élève à 107. Le taux global des réponses s’élève à 44,44%, ce qui nous a paru relativement satisfaisant pour le dépouillement des résultats. Les données relatives à l’échantillon de l’enquête et aux réponses obtenues, se présentent comme suit (tableau 4) :
Section 2 : Synthèse de l’enquêteAprès une présentation des résultats de l’enquête, nous nous appliquons à présenter des propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement des professionnels. Sous section 1 : Présentation des résultats de l’enquêteLe tableau 5 présente les résultats de l’enquête concernant le rôle de l’université dans l’amélioration de l’aptitude du professionnel au jugement : Tableau 5 : Présentation des résultats de l’enquête concernant le rôle de l’université
Les dirigeants d’entreprises estiment, contrairement aux universitaires et aux experts-comptables, que la formation universitaire prépare les futurs professionnels à l’exercice du jugement professionnel. Cette opinion peut s’expliquer par le fait qu’ils sont en contact direct avec des professionnels généralement expérimentés. Concernant les recommandations au sujet de la formation universitaire axée sur le jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers, les réponses ont été très variées : - Instauration d’une obligation de stages par alternance avec la formation universitaire ; - Etude des pratiques internationales, leurs fondements et leurs applications en Tunisie ; - Etude du jugement professionnel et de ses composantes ; - Intégration de l’étude du jugement professionnel dans l’université ; - Mise à jour régulière des normes sur la base des critiques pertinentes résultant de l’expérimentation. §2. Rôle des instances professionnelles Les résultats de l’enquête, concernant le rôle des instances professionnelles, se présentent dans le tableau suivant (tableau 6) :
Les actions proposées pour garantir un niveau de formation professionnelle satisfaisant étaient très variées : - Organisation de séminaires périodiques et des séances de formation ; - Obligation d’un minimum d’heures de formation par année ; - Rôle accru pour la commission de contrôle de l’OECT ; - Mise en place d’un centre de formation spécialisé dans la formation continue des experts. D’autres répondants ont souligné que la formation professionnelle et le maintien des connaissances professionnelles constituent une obligation légale du fait qu’ils figurent dans le code des devoirs professionnels et le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC. La principale recommandation concernant le contrôle qualité consiste à intensifier le contrôle qualité. Ce contrôle est assuré aussi bien par l’OECT et par le conseil du marché financier pour les sociétés faisant appel public à l’épargne ; Les cabinets interrogés sont relativement jeunes. 44 cabinets parmi les 107 cabinets de l’enquête sont créés dans les années quatre vingt, 36 cabinets sont créés dans les années quatre vingt dix et les autres sont constitués dans les années deux mille. Ceci est tout à fait compréhensible du fait que la profession d’expert-comptable n’a été réglementée en Tunisie que depuis 1982 par la loi 82-61 du 30 juin 1982. Le nombre de collaborateurs dans les cabinets qui nous ont répondu est très variable. Il varie de 2 à 65 collaborateurs. Nous avons réparti les cabinets répondants en trois catégories : ceux ayant 2 à 10 collaborateurs (55 cabinets), ceux ayant 11 à 30 collaborateurs (39 cabinets) et enfin ceux ayant plus que 30 collaborateurs (13 cabinets). Parmi les cabinets répondants, 45 cabinets appartiennent à des réseaux internationaux. La répartition par effectif des cabinets affiliés à des réseaux se détaille comme suit : - 3 cabinets, soit 6,67% ont un effectif compris entre 2 et 10 collaborateurs. - 29 cabinets, soit 64,44% ont un effectif compris entre 11 et 30 collaborateurs ; - 13 cabinets, soit 28,89% ont un effectif supérieur à 30 collaborateurs ; Les résultats de l’enquête, concernant le rôle des professionnels, se présentent dans le tableau suivant (tableau 7) : Tableau 7 : Présentation des résultats de l’enquête concernant le rôle des professionnels
A la question relative au budget de la documentation dans les cabinets d’expertise comptable par rapport au chiffre d’affaires hors taxes, 75 cabinets ont répondu à cette question alors que 32 cabinets n’ont pas répondu. La moyenne du budget de la documentation dans les cabinets d’expertise comptable par rapport au chiffre d’affaires hors taxes s’élève à 4,47%. 33 cabinets parmi les 75 cabinets répondants dépensent un budget de documentation supérieure à la moyenne de 4,47%. Ces cabinets se répartissent par effectif comme suit : 17 cabinets soit 35,42% ont un effectif compris entre 2 et 10 collaborateurs, 13 cabinets soit 59,09% ont un effectif compris entre 11 et 30 collaborateurs et 3 cabinets soit 60% ont un effectif supérieur à 30 collaborateurs. La répartition par effectif des 42 cabinets d’expertise comptable, dont le budget de la documentation est inférieure à la moyenne, se présente ainsi : 31 cabinets soit 64,58% ont un effectif compris entre 2 et 10 collaborateurs, 9 cabinets soit 40,91% ont un effectif compris entre 11 et 30 collaborateurs et 2 cabinets soit 40% ont plus que 30 collaborateurs. A la question relative à la représentation du coût de la formation dans les cabinets d’expertise comptable par rapport au chiffre d’affaires hors taxes, 69 cabinets ont répondu à cette question alors que 38 cabinets n’y ont pas répondu. La moyenne du coût de la formation dans les cabinets d’expertise comptable par rapport au chiffre d’affaires hors taxes s’élève à 2,74%. La répartition par effectif des 23 cabinets d’expertise comptable dont le coût de la formation est supérieur à la moyenne de 2,74%, se présente comme suit : 11 cabinets soit 27,50% ont un effectif compris entre 2 et 10 ; 9 cabinets soit 39,13% ont un effectif compris entre 11 et 30 collaborateurs et 3 cabinets soit 50% ont plus que 30 collaborateurs. La répartition par effectif des 46 cabinets d’expertise comptable dont le coût de la formation est inférieur à la moyenne se présente comme suit : 29 cabinets soit 72,50% ont un effectif compris entre 2 et 10, 14 cabinets soit 60,87% ont un effectif compris entre 11 et 30 collaborateurs et 3 cabinets soit 50% ont plus que 30 collaborateurs. A la lumière des résultats de l’enquête, nous essayerons d’avancer des propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession. Sous section 2 : Propositions en vue d’améliorer l’aptitude au jugementLes propositions que nous avançons en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession sont axées sur trois acteurs, à savoir l’université, les instances professionnelles et les professionnels. Les propositions concernant le rôle de l’université en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession sont les suivantes : - Mieux préparer les futurs professionnels à l’exercice du jugement professionnel La compréhension de la façon dont l’expert-comptable exerce son jugement a également des répercussions sur le partage et le développement des connaissances. Il peut être possible d’enseigner des techniques d’exercice du jugement et transmettre ainsi les connaissances acquises aux nouveaux experts-comptables. Les concepteurs des programmes de formation universitaire comptable devraient axer davantage sur l’importance du jugement professionnel. Ainsi, les cours universitaires de comptabilité devraient mettre l’accent sur la capacité de choisir des solutions au delà de l’apprentissage mécanique de solutions uniques. Il s’ensuit que les cours professionnels et les examens professionnels devraient également mettre l’accent sur le jugement professionnel et permettre que les compétences acquises à cet égard soient testées[136]. Selon GIBBINS et MASON, il convient d’attribuer une importance réduite aux cours portant essentiellement sur des sujets techniques, en faveur de programmes conçus pour développer les facultés de jugement de l’étudiant en l’exposant à un enseignement général susceptible de stimuler la réflexion, le raisonnement et l’analyse1. Dans le même sens, SUNDEM précise que « la formation comptable doit mettre l’accent sur l’objectif premier des cours de formation qui est d’apprendre aux étudiants d’apprendre » [137]. - Instaurer un programme d’évaluation de la formation universitaire pour savoir si la formation universitaire prépare les futurs professionnels à l’exercice de jugement au niveau professionnel requis ; - Insister sur l’éthique professionnelle et son utilité pour l’expert-comptable et la profession. Ainsi, le futur professionnel sera tenté de respecter l’éthique professionnelle lors de l’exercice de ses fonctions. §2. Rôle des instances professionnelles Les propositions concernant le rôle des instances professionnelles en vue d’améliorer l’aptitude des professionnels au jugement professionnel sont les suivantes : - Insister sur le contrôle qualité : L’adoption d’une norme sur le contrôle de la qualité par l’IFAC porte à croire que l’on se soucie de plus en plus de la qualité des missions d’audit. Il est donc nécessaire que les cabinets d’experts-comptables disposent de systèmes de contrôle de la qualité non seulement pour leurs missions d’audit mais pour toutes leurs missions afin d’atteindre l’excellence. Par ailleurs, même en cas de litige, les experts-comptables pourront ainsi démontrer qu’ils se sont conformés aux normes professionnelles et réduire ainsi les risques de perte au minimum. - Instaurer un contrôle plus rigoureux des dossiers par la commission de contrôle de l’OECT ; - Instaurer un contrôle plus rigoureux au niveau du conseil du marché financier des sociétés faisant appel public à l’épargne ; - Planifier des actions de formation visant à mettre en valeur l’importance de la formation professionnelle continue et sa pertinence pour le jugement professionnel. Par ailleurs, la planification de séminaires de formation organisés par des professionnels peut être envisagée. Aussi, l’instauration d’une obligation d’un minimum d’heures de formation est-elle utile afin que les experts-comptables prennent connaissance des nouveautés technologiques et des disciplines juridiques, comptables, fiscales, de gestion, etc. Les propositions que nous avançons, concernant le rôle des professionnels, en vue d’améliorer leurs aptitudes au jugement sont les suivantes : - Développer le professionnalisme : Comme nous l’avons examiné dans la première partie, le professionnalisme est une des qualités nécessaires à l’expert-comptable pour émettre de bons jugements. Ainsi, afin d’améliorer l’aptitude des experts-comptables au jugement, il est primordial qu’ils fassent preuve de professionnalisme. L’absence de normes professionnelles détaillées combinée à des facteurs comme la faillite des entreprises et l’incapacité de répondre aux attentes du public augmente le risque que les commissaires aux comptes fassent l’objet de poursuites en responsabilité de la part du public. Selon l’ICCA, « l’augmentation des poursuites intentées contre les vérificateurs est en grande partie attribuable à un problème de jugement professionnel »[138]. Il affirme par ailleurs que l’étude des principaux échecs en matière de vérification qui ont causé des difficultés aux cabinets de commissaires aux comptes a montré que ces problèmes découlaient largement de mauvais jugements portés dans des conditions de stress et de tension[139]. - Développer l’éthique et la déontologie professionnelles : Les normes professionnelles et les règles déontologiques sont inséparables du processus du jugement professionnel dans les missions liées aux états financiers. Ainsi, l’expert-comptable qui va exercer son jugement doit respecter l’éthique comptable et les règles déontologiques de la profession. - Entretenir et développer ses connaissances : Comme nous l’avons déjà indiqué, les connaissances et l’expérience sont des qualités nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement. Sans elles, le professionnel ne pourrait satisfaire aux besoins du client ni aux normes de la profession. Il va de soi que tous les professionnels doivent recevoir une formation suffisante. Cela ne se limite pas à la formation requise pour obtenir le diplôme d’expert-comptable mais plutôt une formation continue pour maintenir sa compétence professionnelle. Selon l’ICCA, « il incombe aux experts-comptables de tenir leurs connaissances à jour en lisant les publications et les prises de position de la profession, la presse financière et d’autres textes pertinents. L’évolution constante du milieu de la comptabilité et des affaires exige un auto-perfectionnement continu »[140]. Pour ce faire, l’expert-comptable peut utiliser les outils technologiques tels que les bases de données et l’Internet afin d’atteindre cet objectif. D’ailleurs, le guide des compétences du cabinet d’expertise comptable 2002 précise que les nouvelles technologies permettent d’assurer les missions de l’expert-comptable avec rapidité, efficacité et seront le vecteur incontournable de la diffusion et de l’accès au savoir[141]. Aussi, la grille de compétences des comptables agréés de l’ICCA prévoit-elle parmi les compétences professionnelles particulières l’utilisation compétente des ressources technologiques[142]. - Instaurer un système de contrôle qualité : L’existence d’une norme sur le contrôle de la qualité fait ressortir la nécessité que les cabinets d’experts-comptables disposent de systèmes de contrôle de la qualité. Ainsi, les experts-comptables pourront, en cas de litige, démontrer qu’ils se sont conformés aux normes professionnelles et réduire par voie de conséquence les risques de perte au minimum. - Développer le travail d’équipe : Le guide des compétences du cabinet d’expertise comptable 2002 a prévu parmi les compétences essentielles de l’expert-comptable qui favorisent le potentiel de croissance, le travail en équipe. Son développement passe par l’aptitude à implanter un esprit d’équipe et la création d’une synergie entre ses membres. - Garder à l’esprit l’importance du jugement collectif et de la consultation : Le jugement professionnel dans les missions liées aux états financiers est en grande partie un processus collectif : il s’exerce habituellement au sein de l’entreprise ou au cabinet et plusieurs personnes peuvent y être associées[143]. Les recherches révèlent que les jugements collectifs ont toutes les chances d’être supérieurs à ceux exercés individuellement, ce qui laisse entendre que, la consultation et le travail d’équipe améliorent la qualité du jugement. Conclusion générale Dans le cadre de ce mémoire, nous avons examiné la relation entre le jugement professionnel et les normes professionnelles. Les normes sont nécessaires pour porter un jugement mais le jugement demeure primordial pour appliquer les normes. Ensuite, nous avons essayé de définir le jugement professionnel. Ce dernier consiste à appliquer des connaissances et une expérience pertinente avec les habiletés professionnelles et personnelles, dans le cadre défini par les normes professionnelles et le code d’éthique des professionnels comptables, pour prendre une décision dans le cas où il faut choisir entre différentes lignes de conduite. Le jugement professionnel est un processus de prise de décision. L’analyse synchronique a permis d’identifier le cadre environnemental et de relever les facteurs qui affectent le jugement professionnel. Cette analyse met en évidence le caractère évolutif de ce processus, facteur de sa complexité. Le fonctionnement de ce processus est aussi tributaire de l’expérience de l’expert-comptable. Avec l’appui de la psychologie cognitive, l’analyse diachronique a permis de décomposer ce processus en cinq étapes devant être suivies pour résoudre les problèmes complexes liés au jugement professionnel. Ces étapes sont la description du problème posé, la collecte de la documentation, l’identification des solutions possibles, l’évaluation des solutions et la formulation des conclusions. Le processus ayant été décrit sous ces différents angles, il reste à dégager les qualités d’un bon jugement, les déterminants d’un bon jugement ainsi que les qualités nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement. Les qualités nécessaires à l’expert-comptable pour exercer son jugement sont d’une part, le respect de l’éthique comptable et de ses composantes, et d’autre part, des qualités personnelles et professionnelles. Le code des devoirs professionnels ainsi que le code d’éthique des professionnels comptables de l’IFAC contribuent à apporter à l’expert-comptable ces repères, mais au-delà de ce référentiel professionnel, il nous est apparu nécessaire que l’expert-comptable dispose d’une éthique personnelle. L’opinion de l’expert-comptable comprend une part de subjectivité qu’il faut tenter de réduire en développant les qualités nécessaires. L’expert-comptable se doit d’être compétent et consciencieux ce qui induit une remise continue en question, une ouverture d’esprit, une probité et une honnêteté intellectuelle et de l’humilité. Il doit aussi, pour être objectif, intègre et indépendant, être indépendant d’esprit et paraître indépendant. L’ensemble de ces qualités peut être synthétisé par la devise de l’OECT « science, conscience, indépendance ». L’expert-comptable doit réunir un ensemble de qualités visant à optimiser ses connaissances et son expérience, qui combinées, feront de lui un expert, c’est-à-dire un professionnel apte à émettre des jugements professionnels pertinents. Afin d’atteindre les qualités d’un bon jugement, à savoir l’objectivité, la pertinence et la globalité, l’expert-comptable doit satisfaire les critères déterminants d’un bon jugement. En effet, au cours de l’acquisition de son expérience, l’expert-comptable doit développer l’aptitude à écouter, l’aptitude à rechercher un consensus, l’aptitude à délivrer un diagnostic, l’aptitude à pouvoir démontrer la logique du jugement et l’aptitude à démontrer la diligence. Le jugement professionnel relève du processus de prise de décisions. Nous avons illustré le processus d’exercice du jugement professionnel, d’une part, dans le cadre des missions d’audit des états financiers et d’autre part, dans le cadre des missions de présentation des états financiers. Dans le cadre des missions d’audit, nous avons d’abord examiné la détermination du seuil de signification pour la définition du programme des tests substantifs et ensuite l’audit des estimations comptables. Dans le cadre de ces deux cas, nous avons présenté un aperçu théorique sur les règles régissant ces deux thèmes puis nous avons illustré le processus d’exercice du jugement, à travers ses cinq étapes, et apprécié enfin le comportement a posteriori. Dans le cadre des missions de présentation des états financiers, nous avons présenté les règles de présentation des notes aux états financiers, puis illustré le processus d’exercice du jugement dans le cadre de la présentation de l’information sectorielle pour enfin apprécier le comportement a posteriori. En vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession, nous avons réalisé un questionnaire, combiné de questions fermées et ouvertes, destiné aux universitaires, aux membres de direction d’entreprises et aux experts-comptables. La responsabilité de l’amélioration de l’aptitude au jugement de l’expert-comptable incombe à l’université, aux instances professionnelles et aux professionnels. Le rôle de l’université consiste essentiellement à mieux préparer les futurs professionnels à l’exercice du jugement professionnel en repensant les méthodes d’éducation et en rapprochant l’université du milieu professionnel. Le rôle des instances professionnelles concerne essentiellement le développement des connaissances et des compétences des professionnels ainsi que l’assurance que des services de qualité soient rendus par les professionnels. Enfin, le rôle des professionnels consiste à valoriser l’image de marque de la profession en fournissant des services de qualité, en respectant l’éthique comptable et en développant leurs connaissances ainsi que celles de leurs collaborateurs. L’amélioration de l’aptitude de l’expert-comptable au jugement professionnel nécessite l’accomplissement des rôles complémentaires de ces acteurs. Cette amélioration entraîne un coût additionnel pour ces acteurs. Se posent alors les questions suivantes : - Les experts-comptables sont-ils prêts à assumer ce coût ? - Le marché est-il mûr pour valoriser la démarche d’amélioration des aptitudes des experts-comptables au jugement professionnel ?
Annexe 7 : Questionnaire destiné aux universitaires et aux membres de direction d’entreprises
Karim AMOUS Avenue habib thameur – Immeuble Manar – Escalier A – 2ème étage – A 10 3000 Sfax - Tunisie E-mail : [email protected] Téléphone : 74 22 22 39 Fax : 74 29 74 09
Sfax, le 20 août 2002 Objet : Questionnaire Monsieur, Je prépare actuellement un mémoire d’expert-comptable qui porte sur le jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers. A cet effet, votre expérience et vos réflexions me seront d’une grande utilité. Pour vérifier les aspects théoriques de cette recherche, je procède à une enquête auprès des membres de l’OECT, des universitaires et des membres de direction d’entreprises à partir d’un questionnaire. Aussi, vous saurai-je gré de bien vouloir répondre au questionnaire ci-joint attaché. Je tiens à vous informer qu’aucune exploitation individuelle des réponses ne sera faite. Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur, mes sentiments les plus respectueux.
Karim AMOUS
Annexe 8 : Questionnaire destiné aux experts-comptables
Karim AMOUS Avenue habib thameur – Immeuble Manar – Escalier A – 2ème étage – A 10 3000 Sfax - Tunisie E-mail : [email protected] Téléphone : 74 22 22 39 Fax : 74 29 74 09
Sfax, le 20 août 2002 Objet : Questionnaire Monsieur, Je prépare actuellement un mémoire d’expert-comptable qui porte sur le jugement professionnel de l’expert-comptable dans les missions liées aux états financiers. A cet effet, votre expérience et vos réflexions me seront d’une grande utilité. Pour vérifier les aspects théoriques de cette recherche, je procède à une enquête auprès des membres de l’OECT, des universitaires et des membres de direction d’entreprises à partir d’un questionnaire. Aussi, vous saurai-je gré de bien vouloir répondre au questionnaire ci-joint attaché. Je tiens à vous informer qu’aucune exploitation individuelle des réponses ne sera faite. Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur, mes sentiments les plus respectueux.
Karim AMOUS
Liste des abréviations
1. OUVRAGES GENERAUX
2. ARTICLES
3. COURS
4. MEMOIRE D’EXPERTISE COMPTABLE ET DE DIPLOMES D’ETUDES APPROFONDIES
5. SOURCES OFFICIELLES
6. SITES INTERNET
[1] R.H. ASHTON, “An experimental study of internal control judgments”, Journal of accountancy research, printemps 1994, page 143 à 157 [2] Ces recherches sont essentiellement celles de R.H. ASHTON, “An experimental study of internal control judgments”, Journal of accountancy research, printemps 1994 et I. SOLOMON, “Multi-Auditor Judgment/Decision Making Research”, Journal of accounting Litterature, Vol. 6, 1987 [3] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 16 à 17 [4] R. SKINNER, « Pierre angulaire », CA Magazine, novembre 1995, page 12 [5] N. LUSCOMBE, « Règles ou jugement », CA Magazine, novembre 1995 [6] Décret n° 96-2459 du 30 décembre 1996, relatif au cadre conceptuel de la comptabilité tunisienne, paragraphe 51 [7] Décret n° 96-2459 du 30 décembre 1996, relatif au cadre conceptuel de la comptabilité tunisienne, paragraphe 53 [8] Décret n° 96-2459 du 30 décembre 1996, relatif au cadre conceptuel de la comptabilité tunisienne, paragraphe 50 [9] IFAC, Normes internationales d’audit, IFAC Handbook, 1998, ISA 120, paragraphe 13 [10] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 2 [11] R. SKINNER, « Pierre angulaire », CA Magazine, novembre 1995, page 12 [12] Rapportée in, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 37 [13] Petit Robert, Dictionnaire de la langue française [14] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 153 [15] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 5 à 6 [16] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 174 [17] IFAC, Code d’éthique des professionnels comptables, IFAC Handbook, 1998, page 10, paragraphe 16 [18] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 174 [19] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 6 [20] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 153 [21] « Relatif aux aspects différents d’un même ensemble à un même moment d’une évolution », Le petit robert – Dictionnaire de la langue française, septembre 1990, page 1906 [22] « Evolution des faits dans le temps », Le petit robert – Dictionnaire de la langue française, septembre 1990, page 534 [23] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 192 à 196 [24] Ibid. [25] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 192 [26] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 193 [27] ICCA, Mieux connaître le risque : choix, liens et compétences, ICCA, 1998, page 6 [28] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 193 [29] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 193 à 194 [30] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 194 [31] Ibid. [32] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 19 à 21 [33] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 196 [34] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 200 à 201 [35] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 196 à 200 [36] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 198 [37] M. RENNIE, M. GIBBINS, « Au-delà de l’expérience, l’intelligence », CA Magazine, mai 1993, page 40 [38] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 198 [39] M. GIBBINS, A.K. MASON, op. cit., page 199 [40] A. BELKAOUI, Judgment in international accounting, Quorum books, 1990, page 42 [41] M. RENNIE, M. GIBBINS, « Au-delà de l’expérience, l’intelligence », CA Magazine, mai 1993, page 41 [42] M. RENNIE, M. GIBBINS, « Au-delà de l’expérience, l’intelligence », CA Magazine, mai 1993, page 45 [43] M. GIBBINS, « Propositions about the psychology of professional judgment in public accounting », Journal of accounting research, Vol. 22 n° 1, spring 1984, page 110 [44] M. GIBBINS, loc. cit., page 105 [45] A. BELKAOUI, Judgment in international accounting, Quorum books, 1990, page 8 à 15 [46] J.F. RICHARD, Les activités mentales : Comprendre, raisonner, trouver des solutions, DEA Communication HM et ingénierie éducative, décembre 1995, page 12 [47] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 51 à 54 [48] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 87 à 89 [49] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 53 [50] ICCA, op. cit., page 53 à 54 [51] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 92 [52] M.B. DION, « De Descartes à l’expert-comptable », CA Magazine, février 1985, page 51 [53] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 27 [54] C. EMBY et M. GIBBINS, « Good judgment in public accounting: quality and justification », Contemporary accounting research, spring 1988, page 293 [55] C. EMBY et M.GIBBINS, « Good judgment in public accounting : quality and justification », Contemporary accounting research, spring 1988, page 296 [56] Ibid. [57] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 55 [58] M. FALISE, J. REGNIER, Repères pour une éthique d’entreprise, Centre d’éthique contemporaine, 1992, page 100 [59] L.M. MORFAUX, Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Armand Colin, 1984 [60] A. YAICH, Normes, pratiques et procédures de contrôle interne, A. Yaîch, 1996, page 3 [61] P. DELANNOY, Réflexions éthiques sur la pratique de l’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 1991, Page 31 [62] J. MOUSSE, Fondements d’une éthique professionnelle, Les éditions d’organisation, 1989, page 88 [63] J. MOUSSE, op. cit., Les éditions d’organisation, 1989, page 90 [64] ICCA, Grille de compétences des CA – Autres informations supplémentaires pour les candidats CA, ICCA, septembre 2001, page 150 [65] Ibid. [66] Art. 89 du code des obligations et des contrats [67] M. FALISE, J. REGNIER, Repères pour une éthique d’entreprise, Centre d’éthique contemporaine, 1992, page 57 [68] J. MOUSSÉ, Fondements d’une éthique professionnelle, Les éditions d’organisation, 1989, page 82 [69] Ibid. [70] P. DELANNOY, Réflexions éthiques sur la pratique de l’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 1991, page 30 [71] P. DELANNOY, Réflexions éthiques sur la pratique de l’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 1991, page 31 [72] M. FALISE, J. REGNIER, Repères pour une éthique d’entreprise, Centre d’éthique contemporaine, 1992, page 58 [73] A. MIKOL, Principes d’éthique professionnelle des auditeurs, Les cahiers de recherche ESCP, 1993, page 7 [74] P. DELANNOY, Réflexions éthiques sur la pratique de l’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 1991, page 27 [75] J. MOUSSÉ, Fondements d’une éthique professionnelle, Les éditions d’organisation, 1989, page 25 [76] IFAC, Code d’éthique des professionnels comptables, IFAC Handbook, 1998, page 10, paragraphe 16 [77] Rapportée in, Ethique et compétences comptables, Editions Raouf YAICH, 2003, page 11 [78] Rapportée in, Ethique et compétences comptables, Editions Raouf YAICH, 2003, page 11 [79] Ibid. [80] A. LEMAIGNAN et E. LAMPERT, L’essentiel de la déontologie de l’expert-comptable - Code des devoirs professionnels, CSOEC, 2001, page 19 [81] http://www.icaew.co.uk/index.cfm?AUB=TB2I_30245, Statement 1.210 – Fees, révisée au 1er octobre 2002, visité le 10 janvier 2003 [82] A. YAICH, Ethique et compétences comptables, Les éditions Raouf YAICH, 2003, page 27 [83] Rapportée in, Ethique et compétences comptables, Editions Raouf YAICH, 2003, page 15 [84] A. YAICH, Ethique et compétences comptables, Editions Raouf YAICH, 2003, page 18 [85] A. YAICH, op. cit., page 9 [86] A. YAICH, op. cit., page 18 [87] IFAC, Code d’éthique des professionnels comptables, IFAC Handbook, 1998, page 10, paragraphe 16 [88] M.A. PENDARGAST, « L’harmonisation des règles d’éthique », Les cahiers de l’audit, hors série, 4ème trimestre 2001, CNCC Edition, page 29 [89] IFAC, Code d’éthique des professionnels comptables, IFAC Handbook, 1998, page 10, paragraphe 16 [90] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 41 [91] www.experts-comptables.fr/57/download/guide_competences_full.pdf, Guide des compétences du cabinet d’expertise comptable 2002, 57ème congés, octobre 2002, page 17, visité le 26 octobre 2002 [92] ICCA, Grille de compétences des CA – Autres informations supplémentaires pour les candidats CA, ICCA, septembre 2001, page 4 [93] A. YAICH, « L’éthique comptable », ESC & FSEG Sfax, Année universitaire 2000-2001, page 3 [94] CNCC, Code d’éthique professionnelle de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, CNCC, 1988, France, page 19 [95] E. LAUNAY , Formation du personnel à la déontologie professionnelle dans les cabinets d’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 2ème session 1987 [96] P. DELANNOY, Réflexions éthiques sur la pratique de l’expertise comptable, Mémoire d’expertise comptable, France, 1991, page 40 [97] P. DELANNOY, loc. cit., page 41 [98] A. YAICH, Ethique et compétence comptables, Les éditions Raouf YAICH, 2003, page 69 à 70 [99] www.experts-comptables.fr/57/download/guide_competences_full.pdf, Guide des compétences du cabinet d’expertise comptable 2002, octobre 2002, page 18, visité le 26 octobre 2002 [100] M.A. PENDARGAST, « L’harmonisation des règles d’éthique », Les cahiers de l’audit, hors série, 4ème trimestre 2001, CNCC Edition, page 29 [101] www.cica.ca/multimedia/Download_Library/Public_Interest/Independance_FR.pdf, Normes d’indépendance, octobre 2002, page iv, visité le 29 décembre 2002 [102] Ibid. [103] M.A. PENDARGAST, « L’harmonisation des règles d’éthique », Les cahiers de l’audit, hors série, 4ème trimestre 2001, CNCC Edition, page 30 [104] IFAC, Code of ethics for professional accountants, Novembre 2001, page 28, paragraphe 8.8 [105] Ibid. [106] M.B. DION, « De Descartes à l’expert-comptable », CA magazine, février 1985, page 48 [107] Rapportée in « Le jugement professionnel en vérification », ICCA, 1995, page 22 [108] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 22 [109] ICCA, le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 22 à 23 [110] ISA 320, Caractère significatif en matière d’audit, Paragraphe 3, IFAC Handbook, 1998 [111] A. AMRI, L’exercice du jugement professionnel dans les missions de vérification des états financiers, Mémoire d’expertise comptable, Tunis, 1994, page 45 [112] ISA 400, Evaluation du risque et contrôle interne, paragraphe 3, IFAC Handbook, 1998 [113] D. CORMIER, Utilisation des méthodes quantitatives en vérification, PUL, 1994, page 21 [114] ISA 400, Evaluation du risque et contrôle interne, paragraphe 4, IFAC Handbook, 1998 [115] I. CHIESA, « Les risques et le seuil de signification dans la révision comptable », Revue française de comptabilité, n° 198, février 1989, page 29 [116] I. CHIESA, « Les risques et le seuil de signification dans la révision comptable », Revue française de comptabilité, n° 198, février 1989, page 29 à 30 [117] ISA 400, Evaluation du risque et contrôle interne, Paragraphe 5, IFAC Handbook, 1998 [118] I. CHIESA, « Les risques et le seuil de signification dans la révision comptable », Revue française de comptabilité, n° 198, février 1989, page 30 à 31 [119] Norme comptable générale, paragraphe 18 al. 4 [120] ISA 400, Evaluation du risque et contrôle interne, Paragraphe 6, IFAC Handbook, 1998 [121] J.M. PIUMATO, L’importance relative : un concept difficile mais qui présente des avantages considérables pour les professionnels comptables et les utilisateurs des comptes annuels, Mémoire d’expertise comptable, France, 1992, page 61 à 62 [122] ISA 320, Caractère significatif en matière d’audit, paragraphe 10, IFAC Handbook, 1998 [123] D. CORMIER, Utilisation des méthodes quantitatives en vérification, PUL, 1994, page 13 [124] D. CORMIER, Utilisation des méthodes quantitatives en vérification, PUL, 1994, page 7 à 13 [125] I. CHIESA, « Les risques et le seuil de signification dans la révision comptable », Revue française de comptabilité, n° 198, février 1989, page 33 [126] I. CHIESA, loc. cit., page 34 [127] ISA 540, Audit des estimations comptables, IFAC Handbook, 1998 [128] A. YAICH, Préparation et présentation des états financiers, Ed. Raouf YAICH, 2000, page 543 [129] A. YAICH, Préparation et présentation des états financiers, Ed. Raouf YAICH, 2000, page 552 [130] A. YAICH, Préparation et présentation des états financiers, Ed. Raouf YAICH, 2000, page 550 [131] A. YAICH, Préparation et présentation des états financiers, Ed. Raouf YAICH, 2000, page 554 [132] Norme Comptable 14, Eventualités et évènements postérieurs à la date de clôture, paragraphe 36 [133] IAS 14, Information sectorielle, IASC, 1999, paragraphe 3 [134] IAS 14, Information sectorielle, IASC, 1999, paragraphe 41 [135] M.B. DION, « De Descartes à l’expert-comptable », CA Magazine, février 1985, page 49 [136] M. GIBBINS, A.K. MASON, Jugement professionnel et information financière, ICCA, 1989, page 156 [137] G. L. SUNDEM, « Repenser la formation en comptabilité », CA Magazine, Avril 1994, page 41 [138] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 12 [139] Ibid. [140] ICCA, Le jugement professionnel en vérification, ICCA, 1995, page 44 [141] www.experts-comptables.fr/57/download/guide_competences_full.pdf, Guide des compétences du cabinet d’expertise comptable 2002, 57ème congés, octobre 2002, page 10, visité le 26 octobre 2002 [142] ICCA, Grille de compétences des CA – Autres informations supplémentaires pour les candidats CA, ICCA, septembre 2001, page 25 [143] I. SOLOMON, “Multi-auditor judgment/Decision making research”, Journal of accounting litterature, vol. 6, 1987, page 23 |