La nécessaire transformation des associations sportives tunisiennes en sociétés
Par : Haykal SLAMA Expert comptable
Vous pouvez consulter le texte intégral de ce papier en format PDF ou en format HTM
Le sport ne cesse de drainer les spectateurs par centaines de millions et prend une place prépondérante dans la vie sociale et culturelle dans le monde entier. Il est devenu une économie à part entière qui draine des milliards de dollars, emploie des centaines de millions et participe au développement économique des pays, surtout ceux qui ont la chance d’organiser les manifestations internationales, en l’occurrence la coupe du monde de football et les jeux olympiques. A titre d’exemple, 941 millions d’euros ont été générés seulement par les droits de retransmission télévisée en Angleterre lors de la saison 2001-2002, contre 486 millions en Italie et 397 en France.[1] En Tunisie, le sport intéresse plusieurs partenaires : le public, les sportifs, les sociétés commerciales et les autorités publiques. Les enjeux financiers ne peuvent que les encourager à participer de plus en plus aux manifestations organisées à l’échelle nationale et internationale. De ce fait, l’organisation de cette activité (les règles de jeu, les clubs et les fédérations) devient de plus en plus une nécessité. En effet, le législateur tunisien a principalement réglementé les activités physiques et sportives en 1984 à travers la loi n° 84-64 du 6 Août 1984 qui a été modifiée et complétée par la loi n° 94-104 du 3 Août 1994. Cependant, ce n’est en 1995 que notre législateur s’est intéressé de plus prêt aux structures sportives et notamment les associations sportives à travers la loi n° 95-11 du 6 Février 1995. Cette année a connu aussi l’instauration en Tunisie d’un nouveau régime pour les clubs sportifs : le non amateurisme. En effet, les autorités publiques ont cherché à travers ce nouveau système à faire progresser le niveau de la compétition nationale qui rejaillira nécessairement sur celui de l’équipe nationale, tout en offrant un meilleur cadre de travail aux joueurs. Les autorités publiques ont tenu également à responsabiliser davantage les clubs sportifs et parvenir à leur faire inculquer les notions de droit et de devoirs pour aboutir à un sport d’élite. Le passage vers le non amateurisme permettrait aux clubs une meilleure rigueur dans la gestion administrative et financière des affaires courantes dans le but d’être compétitifs au niveau national et international. Le non amateurisme a régi uniquement l’activité football puisque c’est la seule discipline en Tunisie qui draine des masses financières importantes aux clubs eu égard à notre culture sportive et aux divers produits proposés. Depuis la saison 1996-1997[2], les autorités publiques espéraient voir nos clubs sportifs atteindre les objectifs et les espérances assignés, et réaliser un saut qualitatif tant au niveau continental qu’international. Or, ils ont été confrontés à des clubs souffrant de déficits budgétaires, incapables d’assurer une bonne gestion administrative et financière et d’atteindre le niveau des compétitions internationales. Nous assistons également depuis plusieurs années à une réticence progressive et relativement importante des spectateurs dans les stades et dans les différentes compétitions du fait de l’absence de véritables enjeux compétitifs (à l’exception de quelques matchs à l’instar des finales de coupe ou de championnat où les enjeux sont plutôt moraux et non financiers). Ceci affecte sensiblement le niveau des recettes et ne facilite pas aux clubs sportifs d’investir ni en équipements, ni en ressources humaines. Nos clubs sont également confrontés à certains échecs dans les compétitions internationales, surtout pour les sports collectifs. Ces mauvais résultats se traduisent par l’absence future des mécènes et sponsors, qui constituent une part importante du financement du sport en Tunisie. La principale source de recettes étant les compétitions nationales et internationales à travers la billetterie, le sponsoring, le mécénat, les abonnements et les dons de l’Etat et des collectivités locales, l’absence de résultats pour les clubs affecte sensiblement les recettes et cause souvent des difficultés financières. Par ailleurs, d’autres pays comme ceux du golfe et également les pays asiatiques, notamment le Japon et la Corée ont entrepris depuis quelques années de vastes mouvements de restructuration touchant tous les domaines du sport et notamment le football. Ces pays ont consacré beaucoup de capitaux matériels et humains pour améliorer leur sport et organiser cette activité. Ils ont connu, par conséquent le succès escompté en seulement quelques années. Il suffit de voir les résultats de ces nations dans la coupe du monde tenue au Japon et en Corée en 2002.[3] Cette situation a amené les autorités publiques, les médias, les joueurs et les fédérations sportives à s’interroger sur le bienfait de cette formule spéciale qui se situe entre l’amateurisme et le professionnalisme, et sur l’éventualité de mise en place de nouvelles mesures tendant à assurer une meilleure gestion et contrôle des clubs sportifs. Afin de faire face à cette situation particulière, les autorités de tutelle ont procédé durant la période Novembre 2002 - Avril 2003 à une consultation sportive globale dans toute la République. Cette consultation a touché tous les milieux liés directement ou indirectement au domaine du sport, et a essayé de présenter des solutions pratiques à même de rehausser le sport en Tunisie vers les plus hauts sommets. La question du statut juridique des clubs sportifs étant au fonds de ce débat, il est intéressant de chercher la cause de la faiblesse de l’organisation des associations sportives. Dans ce cadre, une question se pose : Quelles sont les caractéristiques des associations sportives tunisiennes et dans quelle mesure leur transformation en sociétés sportives est-elle nécessaire afin de pallier aux insuffisances et limites nées de leur statut juridique particulier, et dépasser les difficultés actuelles du sport en Tunisie ? Dans le cadre de ce mémoire, nous commencerons par l’étude de la situation actuelle des associations sportives tunisiennes en s’intéressant de près à leur cadre juridique, leur gestion et à leur contrôle, et à l’analyse des points faibles existants et affectant la réalisation des objectifs assignés tant par les autorités publiques que par les dirigeants (Partie I). Ensuite, nous analyserons les modalités pratiques, avantages et difficultés naissant de la transformation éventuelle des associations en sociétés (Partie II). |