Les
Femmes dans la profession
d’expert-comptable :
Des obstacles à surmonter
Par : Nadia FAKHFAKH MDHAFFAR
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme
d’expertise comptable
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INTRODUCTION
Les femmes dans la profession d’expert-comptable est un thème qui a intéressé la recherche comptable anglo-saxonne depuis une vingtaine d'années. Il n'a été traité en France qu'à partir de 1998 dans la revue Comptabilité Contrôle Audit. En Tunisie, ce thème a été négligé jusqu'ici. Les chercheurs Tunisiens montrent peu d'intérêt pour
ce thème alors qu'on constate une littérature abondante relative à la
femme dans les domaines de l'histoire, de la sociologie et de l'économie
de la recherche Tunisienne. En Tunisie, c’est en 1981 que la
première femme expert-comptable a obtenu son diplôme. En 1983, a eu lieu
l’inscription au tableau de l’OECT de la première femme
expert-comptable, soit l’année même de la création de l’ordre. Les
données de l’OECT mises à jour en Mai 2012
montrent que la profession se féminise progressivement mais seuls 12%
des experts-comptables inscrits à l’ordre sont des femmes Tunisiennes.
Quels obstacles et quelles préventions peuvent expliquer ce chiffre ? Selon les dernières données fournies par l’INS dans le cadre de son enquête sur l’emploi, la population active féminine Tunisienne atteindrait au second trimestre 2011 près de 1026,7 (en milliers) sur une population active globale de 3844,6 (en milliers); soit 26,7% de la population active totale.[1] Ces avancées sont dues à deux types de facteurs: · Les changements des mentalités par rapport au travail féminin. · Les mesures positives entreprises depuis l’indépendance: l’article 5 bis du code du travail Tunisien affirme le principe de non discrimination entre l’homme et la femme. Depuis 1992, ce principe a été généralisé pour concerner tous les aspects du travail (recrutement, promotion et salaire) aussi bien pour le secteur public que pour le secteur privé. Par ailleurs, la politique de démocratisation de l’enseignement instaurée au lendemain de l’indépendance a permis d’atteindre en 2010/2011 un taux de 61.2%[2] de filles parmi l’effectif global d’étudiants inscrits à l’enseignement supérieur. Elles sont majoritaires dans des filières aussi importantes les unes que les autres. Puisque aucun obstacle juridique ne s’oppose à l’entrée des femmes dans la profession d’expert-comptable, cette proportion de 12% reste à expliquer. Résulte-t-elle uniquement d’une entrée tardive des femmes dans la profession ? Ou c’est dû à une profession qui nécessite un investissement en temps incompatible avec des responsabilités parentales (et plus précisément maternelles) ? Quelles sont donc les mesures qui permettent à ces femmes de réussir et de surmonter ces obstacles, et de s'en servir pour gommer les irrégularités dans le monde professionnel au sens large ? Il est intéressant de noter qu’aucun travail n’a été mené en Tunisie pour s’interroger sur le faible nombre de femme dans la profession d’expert-comptable et pour étudier comment peut-on remédier à cette situation : ni les instances ordinales ni les syndicats professionnels ne sont jamais saisi de cette question. Même silence chez les universitaires seule une doctorante de l’Université IAE de Toulouse sous la responsabilité du Professeur Michèle Saboly, a embauché une recherche sur ce sujet (Saboly et Khemiri, 2011).[3] Il est sans doute souhaitable que notre profession anticipe une telle évolution des femmes en s’interrogeant dès aujourd’hui sur la répartition par genre de sa sociologie, sur les causes de cet état de fait et sur les moyens d’y remédier.
Il
en résulte que notre problématique sera scindée en deux sous questions
auxquelles nous tenterons de répondre à savoir
:
Pour répondre à ces questions, nous effectuerons une revue de la littérature traitant du thème choisi et nous appuierons ces idées par les résultats d’une enquête réalisée à l’aide d’un questionnaire auprès des professionnels experts-comptables membres de l’ordre des experts comptables de Tunisie (OECT) et auprès des experts-comptables stagiaires. La présente étude a pour objectifs de : · Contribuer à la compréhension de la faible présence des femmes dans la profession d’expert-comptable. · Rendre visible les obstacles rencontrés par les femmes experts-comptables. · Augmenter le nombre de femmes dans la profession d’expert-comptable en présentant quelques mesures pour surmonter les obstacles subits. En vue de répondre aux questions posées dans la problématique et atteindre les objectifs qui lui sont fixés, ce mémoire respectera la démarche suivante : Dans la première partie, et dans un premier chapitre nous allons étudier l’état actuel des femmes dans la profession d'experts-comptables en Tunisie et le situer par rapport à d’autres professions libérales et à d’autres pays. Puis, on comparera la féminisation des instances représentatives de la profession à celle des instances d’autres professions libérales. A travers ce premier chapitre nous montrerons à partir d’une synthèse des données que la présence des femmes dans la profession comptable nous permet de confirmer leur rareté aux plus hauts niveaux hiérarchiques, ce phénomène qui est souvent décrit comme le résultat d’un « plafond de verre ». Nous identifierons dans un deuxième chapitre, à partir d’une revue de la littérature, les obstacles liés à l’avancement hiérarchique ainsi que les obstacles qui sont propre à la profession d’expert-comptable et nous réaliserons une enquête pour voir les obstacles rencontrés par les femmes Tunisiennes experts-comptables. La deuxième partie
présentera une réflexion sur
les propositions à mettre en œuvre pour surmonter ces obstacles. Cette
réflexion issue de conclusions des chercheurs et des idées recueillies
de notre enquête sera présentée selon deux axes : les mesures portant
sur les études et le stage d’expertise comptable (chapitre 1) et les
mesures portant sur la vie professionnelle (chapitre 2). Le premier
chapitre présentera quelques mesures pour améliorer l’image de la
profession par l’instauration de programmes de formation destinés aux
femmes experts-comptables stagiaires d’une part et pour améliorer
l’information et la communication autour des études d’expertise
comptable d’autre part. Dans le second chapitre
nous essayerons de donner quelques repères ; tout
d’abord, pour développer des compétences relationnelles
à travers l’intégration
d’un réseau et
l’adoption d’une démarche de mentorat et
ensuite, pour une meilleur organisation et gestion du cabinet à travers
des stratégies qui visent la gestion de la maternité et la réduction de
son impact sur la vie professionnelle
et des stratégies de gestion professionnelle.
Nous proposerons enfin
quelques pratiques pour surmonter les obstacles liés à l’installation
des femmes.
[1]
Touhami,
H. (2012), « L’emploi féminin en Tunisie, actualités et
perspectives », Leaders,
http://www.leaders.com.tn/article/l-emploi-feminin-en-tunisie-actualites-et-perspectives,
visité en janvier 2012.
[2]
Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche
scientifique, bureau des études, de la planification et de la
programmation, « l’enseignement supérieur en chiffre », année
universitaire 2010/2011. [3] Saboly, M. et Khemiri, R., « Les femmes experts-comptables en Tunisie : perceptions et réalités » , communication présentée au 32ème Congrès de l’AFC -Association Francophone de Comptabilité, Montpellier, 2011. |