Le jugement professionnel
de l’expert-comptable dans les missions
liées aux états financiers
Par :
Karim AMOUS
Expert
comptable
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Le
système comptable des entreprises, les normes professionnelles ainsi que
les ordres professionnels font appel au jugement professionnel sans le
définir. La question qui se pose consiste à savoir si le jugement
professionnel peut être éliminé en instaurant des règles très
détaillées. La réponse est négative, puisque les définitions des actifs,
des passifs et des évènements à prendre en compte dans la comptabilité
impliquent un degré de probabilité, qui nécessite l’exercice d’un
jugement. Aussi, le cadre conceptuel de l’IFAC, comme celui de l’IASB ou
du système comptable des entreprises, fonts-ils appel explicitement au
jugement professionnel.
Par ailleurs, nous avons
examiné la relation entre le jugement professionnel et les normes
professionnelles :
-
Le jugement
professionnel est nécessaire pour aussi bien appliquer les normes, que
pour résoudre les problèmes normalisés ;
-
Les normes sont
nécessaires pour porter un bon jugement.
Il existe donc une
relation dialectique entre jugement professionnel et normes
professionnelles.
Le jugement
professionnel de l’expert-comptable est défini comme étant un processus
qui consiste à appliquer des connaissances et une expérience pertinente
avec les habiletés professionnelles et personnelles, dans le cadre
défini par les normes professionnelles et le code d’éthique des
professionnels comptables, pour prendre une décision dans le cas où il
faut choisir entre différentes lignes de conduite.
Le jugement
professionnel est donc un processus de prise de décision. Ce processus
subit des influences liées à l’environnement, aux normes
professionnelles, aux données et aux personnes. A travers l’étude des
principes de la psychologie cognitive, nous avons pu dégager les
différentes étapes du processus du jugement professionnel. Ces étapes
sont : la description du problème posé, la collecte de la documentation,
l’identification des solutions possibles, l’évaluation des solutions, et
la formulation de la conclusion.
Un bon jugement est un
jugement qui revêt les qualités d’objectivité, de pertinence et de
globalité. Pour porter de bons jugements, l’expert-comptable doit
développer des aptitudes qui constituent les déterminants d’un bon
jugement. Ces aptitudes sont l’aptitude à rechercher un consensus, à
défaut de solution exacte, l’aptitude à délivrer un diagnostic objectif,
l’aptitude à démontrer la logique du jugement, et l’aptitude à démontrer
la diligence professionnelle.
Les qualités nécessaires
à l’expert-comptable pour exercer son jugement sont des qualités
personnelles et professionnelles. Les qualités personnelles nécessaires
à l’expert-comptable pour exercer son jugement sont : l’objectivité,
l’intégrité, la probité, la courtoisie professionnelle, la compétence
professionnelle, la confidentialité, le professionnalisme,
l’indépendance, le respect des normes professionnelles et la maturité.
Quant aux qualités professionnelles, elles regroupent l’esprit critique
et l’expertise.
Après examen du cadre
théorique du jugement professionnel, nous avons illustré le processus du
jugement professionnel, à travers l’enchaînement des cinq étapes, dans
des missions d’audit et de présentation des états financiers. Les
illustrations du processus du jugement professionnel, dans le cadre des
missions d’audit, portent sur la détermination du seuil de signification
pour établir le programme des tests substantifs, et l’audit des
estimations comptables.
La présentation d’une
note sur l’information sectorielle constitue l’illustration du processus
du jugement professionnel dans les missions de présentation des états
financiers.
Pour explorer les avis
et les actions nécessaires en vue d’améliorer l’aptitude au jugement
dans la profession, nous avons réalisé une enquête auprès des
universitaires, des dirigeants d’entreprises et des experts-comptables.
Le nombre de la population contactée s’élève à 513. Le nombre des
réponses obtenues s’élève à 228 soit 44,44% de la population contactée.
Les propositions
avancées en vue d’améliorer l’aptitude au jugement dans la profession
sont articulées autour des acteurs qui sont l’université, les instances
professionnelles et les professionnels.
Le rôle de l’université
consiste à mieux préparer les futurs professionnels à l’exercice du
jugement professionnel et à instaurer un programme d’évaluation de la
formation universitaire. Aussi, l’université doit-elle insister sur
l’éthique professionnelle et son utilité pour la reconnaissance de la
qualité du travail comptable.
Les instances
professionnelles doivent veiller au développement du contrôle qualité et
à la planification d’actions de formation pertinentes.
Enfin, le rôle des
professionnels consiste essentiellement à développer le
professionnalisme, à respecter l’éthique et la déontologie
professionnelles, et à entretenir et développer leurs connaissances
ainsi que celles de leurs collaborateurs. Les professionnels doivent-ils
aussi instaurer un système de contrôle qualité, développer le travail
d’équipe et garder à l’esprit l’importance du jugement collectif et de
la consultation. |